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les chargeant de ce qui les regarde : & une Maîtreffe entendue fçaura ménager les plumes d'Oyes, de Cannes & autres volailles, même les laines pour en faire faire des Serges, des Matelats, des Lits, Tour-de-lits, même de la Tapisserie fi elle a des Domestiques propres à cela.

茶茶茶

LA NOUVELLE

MAISON RUSTIQUE,

ov

ÉCONOMIE GENERALE

DE LA CAMPAGNE.

PREMIERE PARTIE.

CONTENANT

L'Interieur & la Baffe-cour de la Maifon

N

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CHAPITRE PREMIFR.

Des Cocqs, Poules, Poulets & Chapons.

OTRE Maifon de Campagne étant bâtie, gouvernée & pourvûë au dedans fuivant les préceptes que nous en avons donné ci deffus, il faut maintenant paffer aux autres foins du ménage des Champs. La Baffe-court s'offre d'abord, Nous en parlerons dans le refte de cette premiere partie, fuivant l'ordre des matieres que le titre de chaque Chapitre annoncera. Commençons par la Volaille la plus commune..

Pour réuffir à élever des Poules, il faut d'abord en fçavoir faire le choix ; on estime que celles de moyenne grandeur & noires ont la chair plus délicate & pondent d'avantage : les blanches font auffi plus en danger d'être prifes par les oyfeaux ou autres animaux de proye, que le plumage blanc frape plus que

toute autre couleur.

Les Poules qui ont la tête grande, la crête pendante & rouge, les pieds & les jambes jaunes & l'œil éveillé, paffent encore pour bonnes & fécondes; au lieu que celle qui a les ergots hauts montez, pond beaucoup moins, & eft fujette à caffer fes œufs lorfqu'on la met couver, par l'impatience naturelle qu'elle a de quitter fon nid.

Il y a des Poules naines, dont les Naturaliftes font beaucoup de cas, à caufe de la fecondité de leurs pontes. On en nourrit quantité dans la Bretagne : elles ont la chair fort délicate. Ces Poules vont toûjours fautant, au lieu que les autres marchent.

Les Poules qui aiment à fe battre, font celles qui font les moins eftimées, foit parce qu'elles donnent peu d'œufs, foit parce qu'elles couvent rarement; encore font-elles fi impatientes alors, qu'elles laiffent fouvent leur couvée imparfaite, ou caffent leurs œufs; on fait le même jugement de celles qui ont cing ergots comme le Cocq.

Les Poules trop graffes pondent peu; pour leur faire perdre le trop de graiffe, on mêle dans leur nourriture de la poudre de brique, & de la craie dans leur

eau.

On voit des Poules frifées, de maniere qu'on diroit qu'au lieu de plumes elles feroient couvertes de laine. Elles font de grand profit. dans une Baffe cour; mais les Pouffins qui en proviennent, font fi fufceptibles de froid, que pour peu qu'ils en fentent, c'en eft affez pour les faire mourir ; c'eft ce qui en fait la

rareté.

Les Poules font fort differentes fuivant les endroits d'où elles viennent, & les alimens dont on les nourrit ; celles de Caux font des plus eftimées pour la délicateffe de leur goût : il s'en trouve à Padouë qui font bien plus groffes & bien plus grandes que celles des autres païs, on en voit en Turquie d'un plutrès-beau & très-varié ; il y en a en Perfe qui n'ont ni queue ni croupion; il y en a d'autres à la Chine qui portent de la laine femblable à celle de nos Moutons ; & dans quelques endroits des Indes, elles ont la chair & les os noirs & font cependant d'un goût fort agréable.

mage

Nous avons encore les Cocqs-d'Inde dont il fera parlé au Chapitre fuivant, & les Cocqs de Bruyere dont je ne dirai rien, parce que ce font des Cocqs fauvages qui volent fort bas & qu'on prend à la paffée comme les Bécalles.

Pour revenir à nos Poules & Cocqs domeftiques, nos jeunes Poules commencent à pondre dès le mois de Fevrier quand il eft moderé, & produifent beaucoup plus d'œufs que les vieilles, mais auffi les vieilles valent mieux pour couver. Comme une jeune Poule fait bien plus de profit par fes pontes, dès qu'on connoît par fon gloffement qu'elle a envie de couver, on l'en empêche de la maniere que nous dirons ci-après.

A l'égard de la groffeur des œufs, cela dépend des differentes groffeurs des Poules. Le vulgaire préfere les noires; les anciens ont eftimé les Poules à plumes rouges, aîles noires & groffe tête; les Poules pomelées de noir & de blanc font encore affez fécondes; on ne fait pas tant de cas des grifes.

L'on connoît un bon Cocq par fa taille, qui doit être moyenne, cependant plus grande que petite, de plumage noir ou d'un rouge obfcur, ayant de gros pieds garnis d'ongles & d'argots, les cuiffes longues, groffes & fournies de plula poitrine large, le cou élevé & garni de plumes de diverfes couleurs;

mes,

on juge encore d'un bon Cocq lorfqu'il a le bec court & gros, les yeux noirs ou bleus, les oreilles blanches, larges & grandes, les barbes rouges, pendantes & longues, de couleur grife, ou d'un rouge blanchâtre, & que les plumes qui lui pendent du cou & de la tête, s'étendent jufque fur les épaules, & font de couleur changeante, tirant fur l'or, qu'il a les ailes & la queue grandes & fortes, les cuiffes longues, charnues & emplumées, la queue a deux rangs recourbée & élevée au-deffus de la tête, les ergots longs, qu'il eft fier, éveillé, courageux, prompt à chanter, ardent à careffer fes Poules, à les défendre & à les folliciter à manger.

Les Cocqs les plus amoureux font les meilleurs, il faut qu'ils ayent encore la créte élevée, de couleur de fang & non longue; il y a des Cocqs qui par trop de chaleur ou autrement ne font que coqueter autour des Poules, grater la terre prêts à fe battre à tous momens & à détourner les autres : ils font ordinairement impuiffants tant que cette vivacité leur tient; & pour la calmer on leur fait pafler le pied dans le milieu d'un morceau de cuir taillé en rond comme un liard & percé au milieu, cette chauffe rend l'oifeau honteux & tranquille.

Les Poules de la grande efpece quoiqu'elles foient beaucoup moins abondantes en œufs que les autres, peuvent être mêlées néanmoins parmi les autres; & pour le peu d'œufs qu'elles faffent, on aura foin de les garder à part, afin de les donner à couver pour avoir de gros Chapons.

Il ne faut fe charger de volailles qu'à proportion de ce qu'on a à leur donner à manger; bien des gens s'imaginent qu'il n'y a qu'à avoir des Poules, fauf à diminuer la portion des autres: ils fe trompent, car un petit nombre de Poules à qui le grain ne manque point, rend plus de profit à fon maître, qu'une grande quantité qu'on laille jeûner, ou qui ne vit que de ce qu'elle trouvé dans la cour.

Le nombre des Poules qu'on donne à chaque Cocq n'eft pas fixé. Un Cocq peut fuffire à douze ou quinze Poules; ainfi on s'en pourvoira fuivant le nombre de Poules qu'on voudra élever; que ce foit toûjours le plus qu'il fera poffible, & qu'on ait foin d'avoir des Cocqs à proportion du nombre des Poules, afin de ménager ces mâles qui s'épuiferoient, parce qu'ils font trop lafcifs.

Si on achète un nouveau Cocq, il ne faudra pas tout d'un coup le laiffer aller parmi la troupe : car le Cocq cet Oifeau fier, hardi, chaud, vigilant & courageux, qui, dit-on, de fon chant feul fait fuir le Lyon & mourir de peur le Bafilic, ne fouffre pas volontiers de Concurrent; ainfi il faut attacher le nouveau venu par le pied avec une ficelle de deux ou trois coudées de long qui tiendra à un petit pieu planté au milieu de vôtre Bafle cour: jettez y du grain tout autour de lui, appellez toutes les autres volailles pour en venir manger; d'abord les Cocqs vieux domeftiques, regarderont le nouveau d'un œil farouche, ils s'approcheront pour le battre, mais il faudra les en empêcher. On n'aura pas plûtôt fait cela trois ou quatre fois, que tous les Cocqs s'accoûtumeront les uns avec les autres, & iront de compagnie fans fe battre. Il y en a cependant qui difent, qu'à la verité ces Cocqs nouveaux venus font expofez à quelques coups de bec, qu'ils fe cachent quelquefois pour les éviter, lors qu'ils ne fe fentent pas allez forts pour y refifter, mais que

pour cela 'ils ne s'enfuyent point tout-à fait de la troupe, à moins qu'ils n'ayent été achetez dans le voisinage. Les Poules ne laiffent point que de pondre fans la cooperation du Cocq; mais ces œufs ne font point fi fains que les autres & ne valent rien pour donner à couver, parce qu'il n'y a pas de germe..

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Les Poules qui chantent & les Cocqs qui pondent. ne valent rien; les œufs des Cocqs font plus petits que ceux des Poules ; & quelques-uns croyent que ce n'eft que par le fouffle de certains vents doux que les Cocqs pondent & que: les Poules conçoivent fans mâles..

De l'heure de donner à manger à la Volaillé

C'eft lorfque le Soleil fe leve, cette Volaille étant accoûtumée de fortir du matin ; & le foir, un peu auparavant qu'il fe couche ; mais pendant la moisson, & toutes les fois qu'on bat les grains, les Poules trouvent toûjours affez de quoi vivre, fi ce n'eft lorfque la neige couvre la terre..

Les heures pour leur donner à manger doivent être toûjours les mêmes, pour qu'elles ne fe dérangent point de leurs pontes, & qu'elles n'aillent pas courir ailleurs ou faire du dégât dans les jardins ; il faut auffi que ce foit toûjours au même endroit, & qu'il foit plat, uni & à l'abri des vents & des orages, parce qu'ils font très-contraires à la Volaille..

De la nourriture de la Volaille.

On amaffe toutes les criblûres & les vannures des grains, qu'on a foin de ferrer; & pour les ménager, on les entremêle quelquefois d'herbes qu'on hache, de fruits qu'on découpe, ou d'autres chofes fuivant la faifon; on leur donne encore du fon boüilli; & lorfqu'on veut échauffer cette Volaille pour l'obliger à pondre beaucoup, on fe fert d'avoine pure, de bled farrafin ou de: chennevi; & le temps de la nourrir ainfi, eft d'ordinaire dans l'Hyver car lorfque la faifon nouvelle commence à fe faire fentir, les Poules naturelle-ment deviennent affez échauffées pour produire quantité d'œufs, lorfqu'elles font nourries comme il faut.

On leur donne auffi de l'orge moulu, de la vefce, des pois chiches, du millet & du panis, & tout cela felon les lieux où la commodité permettra de le faire; l'ivroye boüilli leur eft encore très - bon, mais le froment les› engraiffe trop & les empêche de pondre.

Quelques uns, pour avoir de gros œufs, leur donnent de l'orge à demi cuit, & d'autres de la femence de creffon broyée & mêlée avec du fon & du vin.

D'autres prennent de la brique qu'ils broyent bien menu, ils la mêlent parmi du fon, & la donnent ainfi a la Volaille: d'autres font bouillir du guy, & prétendent que ces alimens les rendent fecondes, ainfi que la graine de la Ruta Capraria, autrement Rue aux Chévres, qui eft une herbe ces animaux cherchent pardeflus tout.

que

!

Le marc de railin rend les Poules peu fecondes ; c'eft pourquoi on ne leur en donne que depuis le mois de Novembre jufqu'a Noël, temps où elles ceffent de pondre; encore y mêle-t-on des criblûres de froment. Horsce temps, on leur interdit tout-à-fait le marc de raifins. Bien des gens ne veulent pas, non-plus leur donner des féves; d'autres leur en donnent, mais peu,.

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