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remarquable,c'est que toutes ces coJonnes difperfées par troupes favent où le réunir pour former deux nouvelles colonnes d'une épaiffeur énorme & retourner dans leur patrie: l'une y arrive du côté de l'orient & l'autre du feptentrion.

tinuent promptement leur chemin pour remplir ailleurs le grand but de la nature, c'est-à-dire pour deve

nir pères des générations de l'année fuivante.

Si quelque chofe eft digne d'admiration dans la marche de ces animaux, c'eft l'attention que ceux de la première rangée portent fur les mouvemens des harengs royaux leurs conducteurs; lorfque les harengs fortent du nord, la colonne eft incompara. blement plus longue que large; mais dès qu'elle entre dans une vafte mer, elle s'élargir au point d'avoir une étendue plus confidérable que la longueur de la Grande-Bretagne & de l'Irlande enfemble. S'agit-il d'enfiler un canal, auffitôt la colonne s'alonge aux dépens de la larfans que la vîteffe de la marche en foit aucunement rallentie c'eft ici furtout où les fignaux & les mouvemens font un fpectacle digne de remarque: nulle armée quelque bien difciplinée qu'elle

Le temps du départ des harengs eft également fixé ; ils quittent nos cores aux mois de Juin & d'Août : la route eft preferite & la marche réglée. Tous ces poiffons partent enfemble, & ils continuent de côte en côte leur marche jufqu'au terme marqué. Ce peuple eft nombreux, & le paffage eft long; on a cherché ce qui pouvoit infpirer aux harengs le goût de voyager, la police qu'ils obfervent dans leur route, & le défir de retourner dans leur patrie. Nos pêcheurs & ceux de Hollande ont remarqué qu'il naiffoit en été geur, le long de la Manche une multitude innombrable de certains vers qu'ils appellent furfs, & de petits poiffons dont les harengs fe nourriffent : c'est une manne qu'ils viennent recueillir exactement. Quand ils ont tout enlevé durant l'été & l'automne, le long des parties feptentrionales de l'Europe, ils descendent vers le midi où une nouvelle pâture les appelle : fi ces nourritures manquent, les harengs vont chercher leur vie ailleurs; le paffageeft plus prompt & la pêche moins bonne. Au refte les harengs ne fe mettent en route ou ne la rermiment qu'après avoir frayé ainfi il paroît que l'appas des infectes attire autant les Karengs que la pour fuite de leurs ennemis les chaffent fur nos côtes, La même loi ou le même inftinct appelle après eux leurs petits dès qu'ils ont affez de force pour & tous ceux qui échapvoyager; pant aux filers des pêcheurs con

foit ne les exécute avec tant d'harmonie & de précision.

Pêche des harengs par différentes nations. On a déjà dit que pour certe expédition les Hollandois affembloient leurs buy fes aux environs de Hithland, où arrive la feconde divifion des harengs. Leurs buyfes. font au nombre de douze à quinze cens; ils les mettent en mer en tirant au nord-nord-oueft, & elles; jettent le premier filet près Fayrhill, la nuit du lendemain de la St. Jean le 25 Juin, auffitôt après minuit. On ne pêche que la nuit, parcequ'on reconnoît mieux le fil du banc des harengs que l'on diftingue clairement par le brillant de leurs yeux. & de leurs écailles. Le jour on ne

les diftingue que par la noirceur de la mer & par l'agitation qu'ils excitent dans l'eau en s'élevant fouvent jufqu'à la furface, & en fautant même en l'air pour éviter la fureur dévorante de leurs ennemis; d'ailleurs pendant la nuit le poiffon eft attiré par la clarté des lanternes qui le fait venir droit aux buyfes, & l'empêche, en l'éblouissant, de difcerner les filets. Les pêcheurs de fardine fe fervent fort utilement de ces mêmes manœuvres fur les côtes de Dalmatie.

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Les filets qui fervent à la pêche des harengs font longs de mille à douze cens pas & faits de bon chanvre, fuivant l'ordonnance avec des mailles bien ferrées afin que le poiffon en y approchant s'accroche auffitôt par les ouies; ceux qu'on fait aujourd'hui font prefque tous tricottés d'une espèce de groffe foie de Perfe; ils durent au moins trois ans : dès qu'ils font faits on les teint en brun avec la fumée de copeaux de chêne pour les rendre moins vifibles dans l'eau.

Il n'eft pas permis de jeter les filets avant le 25 de Juin, parceque le poiffon n'eft pas encore arrivé à la perfection, & qu'on ne fauroit le transporter loin fans qu'il fe gâte. C'eft en vertu d'une ordonnance expreffe & des placards publiés par les Etats & par la ville de Hambourg, que les maîtres des buyfes, les pilotes & les matelots prêtent ferment avant leur départ de Hollande & de Dantzic, de ne pas précipiter la pêche, & qu'ils le renouvellent à leur retour pour attefter que ni leur vaiffeau, ni aucun autre de leur connoillance n'a fait infraction à cette loi. En conféquence de ces fermens on expédie

des certificats à chaque vaiffeau deftiné au tranfport des nouveaux harengs, pour empêcher la fraude & pour conferver le crédit de ce

commerce.

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Depuis le 25 Juin jusqu'au 15 Juillet, on met tout le hareng qu'on prend pêle-mêle dans des tonneaux qu'on délivre à mefure à certains bâtimens bons voiliers, appelés chaffeurs qui les tranfportent promptementen Hollande, où le premier hareng qui arrive porte auff le nom de hareng chaffeur. Quant au poiffon qu'on pêche après le 15 Juillet, auffitôt qu'il eft à bord des buyfes, & qu'on lui a ôté les ouies, on a grand foin d'en faire trois claffes; favoir, le hareng vierge, le hareng plein & le hareng vide. On fale chaque efpèce à part, & on la met dans des tonneaux particuliers. Le hareng vierge cft celui qui eft prêt à frayer; il eft fort délicat. Le hareng plein eft celui qui eft rempli de laites ou d'œufs, c'est-à-dire, qui eft dans fon état de perfection. Le hareng vide eft celui qui a frayé, qui eft un peu coriace, qui fe conferve bien moins; c'eft le moins eftimé ces deux dernières espèces de harengs forment la charge ordinaire des buyfes, qui partent mefure qu'elles font remplies ou quand la pêche et finie.

La pêche du côté de la Norwège eft beaucoup diminuée depuis l'an 1560, temps auquel le commerce du hareng étoit très-floriffant, furtout à Berghen où il y avoit un comptoir pour cette pêche établi fous le nom de Confrérie de Berghen ou de Scandinavie. Jufqu'à ce temps plufieurs milliers de vaiffeaux de Dannemarck, d'Allemagne, de Hollande, d'Angleterre & de France, avoient coutume d'aller tous

les ans chercher fur les côtes de Scandinavie les provifions de l'Europe; mais le gros banc de harengs a pris une autre route vers le Hithland & du côté de l'Ecoffe. Quand les pêcheurs Ecoflois ont fait leur coup fur le hareng, ceux de Dunbar, de France, du Brabant, & mêmes des buyfes hollandoifes réquipées une feconde fois, vont audevant de ce poiffon vers les bancs, les baies, les rivières par où doivent pafler les colonnes, & ils en font encore une capture confidérable. Toute la côte de Suède & de Finlande, &c. fournit un mauvais hareng, à l'exception de la petite efpèce qui fe trouve dans le golfe Bothnique, & qui eft d'un goût exquis. Le hareng de la mer Baltiqne & du Holstein fe pêche vers l'équinoxe du printemps. Une chofe affez fingulière, c'eft que dans les mois de Décembre, Janvier & Février, on pêche du hareng auprès du Caire en Egypte & qu'on n'en voit ni à Rofette, ni à Damiette, ni dans la Méditerranée.

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goût infiniment plus délicieux que celui des harengs pris & préparés par d'autres nations, c'eft que les pêcheurs hollandois y prennent des foins & des précautions particulières ils lui coupent les ouies à mefure qu'ils le prennent; & l'ayant préparé avec grand foin, ils ne manquent jamais de ferrer tout ce qu'ils ont pris dans une nuit avant la chute du jour. Les tonneaux dans lefquels ils encaquent leurs harengs font de bois de chêne, & ils les y arrangent avec beaucoup d'ordre dans des couches de gros fel d'Efpagne ou de Portugal. Les tonneaux dont les Norwégiens fe fervent, font de bois de fapin; ce qui communique un mauvais goût au poiffon; d'ailleurs ils le falent trop ou point affez, & l'empâtent mal dans les tonneaux. De plus le hareng de leur pêche et moins gras que celui du Hithland; il eft même défendu dans les Provinces-unies par un édit de 1720, de pêcher aucun hareng entre les rochers de Norwège, ou d'en acheter des gens de ces pays, fous peine de confifcation de la marchandise, & de trois cens florins d'amende.

L'Angleterre a fait de grands efforts faire fleurir en Ecoffe pour le commerce du hareng; mais les Ecoffois fe font avifés de pêcher ce poiffon avant fa perfection; de plus ils n'en font la pêche qu'avec de petites chaloupes en cotoyant la terre ils font même dans l'ufage

point préparer leur poiffon fur le champ: ils attendent pour cela que leurs chaloupes en foient remplies. Cette façon lente de le préparer ôte au poiffon fa délicateffe naturelle, & la faculté de fe conferver. Les habitans d'Yarmouth fe contentent d'en pêcher cinquante

mille tonneaux ou environ, dont l ils font leur hareng rouge ou enfumé.

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Les Flamans qui étoient autrefois de grands pêcheurs, ont inventé les premiers la meilleure façon de préparer & de faler le hareng; mais trop voifins d'un peuple induftrieux jaloux du commerce & du gain, ils ont été bannis de la mer. Il n'y a pas long-temps qu'on difoit hareng de Flandres ; aujourd'hui l'on dit hareng de Hollande: l'ufage d'encaquer les harengs n'eft guère connu que depuis 360 ans: quelques hiftoriens fixent l'époque de cette fimple & utile invention à l'an 1397 & d'autres à 1416 l'inventeur s'appeloit Guillaume Benckels natif de Biérulier, en Flandres. Le fouvenir du nom de Benckels fut par la fuite fiagréable, que l'Empereur Charles V & la Reine de Hongrie allèrent en 1536 en perfonnes voir fon tombeau à Bierulier, comme pour té moigner leur reconnoiffance d'une découverte fi avantageufe à leurs fujets de Hollande.

Tout le hareng que les Hollanlandois prennent par un fecond équipement, ainfi que les François & les habitans de Galles, &c. eft mangé frais en partie; le refte qui va à plufieurs milliers de tonneaux eft falé, & c'eft celui que l'on envoie en Espagne & dans la méditerranée fous le faux nom de hareng de Hollande. Ce font fartout les négocians de Devonshire & de Cronwal qui favent le préparer en le preffant d'une façon particulière, & qui en envoient la plus grande quantité à Cadix, à Lisbonne, a Venise, à Livourne & jufqu'en Afri

que.

M. Anderson dit que fur les cô

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tes d'Yarmouth on vide & on coupe les ouies au hareng dès qu'on en a amené une barque à terre; enfuite on le met dans des tonneaux avec du fel d'Espagne, ayant foin de le remuer de temps en temps: au bout de 16 à 24 heures les pêcheurs l'ôtent des tonneaux, le lavent bien avec de l'eau fraîche, & le fufpendent à des bâtons pofés fur des lates dans des cabannes faires exprès pour cet ufage : ils y font enfuite du feu avec du bois fendu bien menu qu'ils rallument toutes les quatre heures ayant grand foin de fermer exactement les cabanes pour y contenir la fumée & la faire recevoir par le poiffon. Ils y laiffent pendant fix femaines celui qui doit être envoyé hors du Royaume & on l'empaquette bien pour l'envoi. Tel eft, dit M. Anderfon, le principal fecret pour bien enfumer le ha

reng.

Les Iflandois prennent encore aujourd'hui des quantités prodigieufes de petits harengs qu'ils entaffent vivans fur le bord de la mer, & qu'ils partagent enfuite entr'eux par tête. Dans la Bothnie occidentale on le met dans de grands tonneaux avec beaucoup de fel;& après l'avoir bien remué avec un bâton on le laiffe dans le fel pendant vingt quatre heures jufqu'à ce que le fang foit forti & que le poiffon fe roidiffe: on l'ôte le lendemain & on l'empaquette bien dans des tonneaux de toutes fortes de grandeurs: on le débite foit dans le pays même foit dans le voifinage. On choififfoir autrefois les plus petits harengs & après les avoir falés on les faitoit fécher au four pour les envoyer en préfent dans les pays étrangers : c'étoit dans certains cantons un régal auffi délicieux que le raff ou rekel

le

du nord. La bonté de ce poiffon fe perd fur nos côtes ; & d'ailleurs on n'y a pas la bonne façon de le faler & préparer pour le tranfport, comme les Hollandois ; ce qui fait qu'on mange frais, ou que tout au plus on l'enfume pour en faire une marchandife un peu durable. On eftime affez cette préparation dont la manière eft rapportée dans les annales de Breslau, Avril 1720. Dans tous les pays ou côtes à harengs on eft obligé d'enfumer ceux de ces poiffons qui font maigres & coriaces; tels font les harengs de Lubeck, de Pruffe & de Dantzick. Les Hollandois font encore beaucoup de harengs faures ou enfumés avec ce poillon qui étant pourfuivi par l'épaular & le marfouin, vient fouvent jufques dans l'Ygrec, devant la ville d'Amfterdam. On le prépare en Novembre & en Décembre: il est trèsgras & d'un goût exquis; mais on le confomme dans le pays, car il feroit difficile de le tranfporter bien loin à caufe de l'abondance de fa graiffe. On envoie le hareng fumé le plus maigre à Hambourg, à Brême, & de-là plus loin dans l'Empire.

Le hareng fréquente auffi les côtes de l'Amérique feptentrionale, mais on y en voit bien moins qu'en Europe: il ne va pas plus loin que les fleuves de la Caroline.

A l'égard des harengs d'Amboine & de Banda que l'on y fale & enfume, ce ne font point de vrais harengs mais des poiffons qui leur reffemblent beaucoup. Il n'en eft pas de même de ceux qui fe trouvent au cap de bonne Efpérance: on les y voit par troupes très-femblables à nos harengs d'Europe: ils remontent quelquefois dans les rivières où ils fe nourriffent d'herbes, de charro

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Le hareng frais fe nomme-hareng blanc: il eft d'une chair blanche & d'un bon goût : il convient à bien des tempéramens. Celui qui eft falé fe nomme blanc falé : il est assez mal fain; il ne convient qu'à des eftomacs robuftes: celui qui eft deffalé fe nomme hareng pek: il eft moins mal-faifant mais moins délicat que le hareng frais. Quant au hareng faure ou enfumé il eft pernicieux, quoique le menu peuple l'appelle appétit ou rouge falé: il eft fec,, dur & très-difficile à digérer. En 1764 un Épicier de Paris annonça aux habitans de cette capitale une efpèce de poiffon d'un goût fort exquis, & qu'il diftribuoit (fous le nom de frigard) à quatre fous la pièce. Ce poiffon qui lui venoit des côtes de Flandres en très-petits barils n'étoit qu'un hareng cuit dans une forte de court-bouillon aromatifé par la fauge, le laurier, le thym, &c. Le hareng eft apéritif. La faumure de ce poiffon convient pour déterger les ulcères fétides : elle arrête les progrès de la gangrène. On en fait entrer dans les lavemens pour la sciatique.

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On dit proverbialement de plufieurs perfonnes ou de plufieurs cho fes rangées & preflées l'une contre

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