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même ; celle que l'Eglise vous a annoncée tout le temps de l'Avent, en prolongeant ses offices, en prenant ses ornements de mortification, en ordonnant les jeûnes que nous venons de pratiquer; celle que faisaient autrefois, et que font encore aujourd'hui la plupart des maisons religieuses en observant un carême de plus de deux mois, Non, mes frères, nous ne sommes pas plus exempts de la pénitence extérieure que tant d'hommes consacrés à Dieu, dont la vie austère nous étonne. Ils se couchent durement, ils s'habillent de draps grossiers, ils se nourrissent pauvrement, ils interrompent leur sommeil, ils font toujours le difficile sacrifice de leur volonté particulière, ils se privent de toutes les consolations humaines. Pourquoi tant de travaux, tant de veilles, tant de prières, tant de mortifications? pour expier leurs péchés et ceux du peuple, pour dompter leurs propres passions. Hé! qui de nous n'a pas plus de péchés à expier ? qui de nous n'a pas les mêmes passions à dompter? Justes, ne vous y trompez dohc pas, vous êtes obligés à la pénitence, à accepter en esprit de pénitence tous les maux de la nature, le froid, le chaud, la rigueur des saisons; tous les maux de l'humanité, la maladie, la douleur, la mort même ; tous les maux de votre état, toutes les humiliations de la servitude, si vous êtes domestiques; toutes les pertes qu'entraîne la négligence des inférieurs, si vous êtes maîtres; toutes les peines que cause l'éducation de la jeunesse, si vous êtes chefs de famille; en un mot, toutes les croix attachées à votre condition, celles que Dieu vous envoie, celles qui vous viennent de la part des hommes.

Il faut offrir tout cela à Dieu en esprit de pénitence, joindre à tout cela des confessions plus fréquentes, des aumônes plus abondantes, des prières plus longues et plus ferventes, dés austérités plus rigoureuses. Justes, qui avez toujours conservé votre justice, voilà votre pénitence; et vous, pécheurs, quelle sera donc la vôtre, si la vie du juste doit être une pénitence continuelle (1)? Quelle pourra être votre vie? le moins que vous puissiez et que vous soyez obligés de faire,

(1) Conc. Trid.

c'est, dit saint Paul (1), de faire servir votre corps et vos membres aux œuvres de la justice, autant qu'ils ont servi à l'iniquité, de donner à Dieu autant de veilles que vous en avez donné au monde, de passer autant de nuits à la prière que vous en avez passé à vos plaisirs, de mortifier votre goût autant que vous avez satisfait votre sensualité, d'être aussi retirés du monde que vous y avez été répandus, en un mot, de mettre, autant qu'il est possible, quelque proportion entre vos péchés et votre satisfaction; c'est de suivre dans leurs pratiques de pénitence ceux que vous avez suivis dans leurs égarements: en voici quelques-unes de nos anciens pénitents, écoutez, mes frères, et profitez.

Pour un simple parjure ils faisaient sept ans de pénitence, dont quarante jours étaient au pain et à l'eau ; pour une œuvre servile un jour de fête, ils passaient trois jours au pain et à l'eau; pour avoir méprisé les ordres de leur évêque ou de ses ministres, ils jeûnaient au pain et à l'eau quarante jours; deux personnes libres qui commettaient le péché faisaient une pénitence de trois ans, le seul désir était puni par une pénitence de deux ans ; un voleur, un usurier étaient condamnés à une pénitence de trois ans, la première année au pain et à l'eau. Voilà, mes frères, une idée des pénitences en usage dans les beaux siècles de l'Eglise, celles que méri tent encore aujourd'hui de semblables péchés, vous qui en avez commis de plus grands encore. Qu'est-ce donc qui nous rassurera contre ces pratiques des premiers temps? direz-vous que l'usage en a cessé ? il est vrai, elles ne sont plus en usage dans les tribunaux de la confession, mais elles ne sont pas moins la matière de notre condamnation, elles nous montrent que nous n'entrerons véritablement dans l'esprit de l'Eglise, que nous ne satisferons pleinement à Dieu, qu'autant que nous ferons des œuvres satisfactoires qui en approchent. Consultez donc, car je ne puis ici trácer des règles propres à chaque pécheur, consultez vos directeurs, et sur leur avis, mettez la cognée à la racine, retranchez de votre cœur, de votre esprit, de votre volonté tout ce que celle du Seigneur

(1) Rom. 6

įy condamne ; mortifiez votre corps, mais ce qui est plus essentiel encore, mortiñez vos passions: cette démangeaison de parler et de médire, en parlant peu et toujours à l'avantage du prochain; cette jalousie de la réputation du prochain, en travaillant à l'augmenter; cette inclination criminelle que vous avez pour une personne, en vous éloignant d'elle et de ce qui en rappelle le dangereux souvenir; ce désir de plaire. qui vous occupe en considérant la vanité de votre désir, et tout ce qui peut vous humilier; cette ambition qui fait votre croix, en renonçant aux honneurs, et même à tout ce qui conduit aux vains honneurs du monde ; cette sensualité qui vous guide, en mortifiant votre appétit sur ce qui lui plairait davantage. Voilà la mortification importante à laquelle doivent tendre toutes les mortifications corporelles, celle sans laquelle toutes les autres sont illusoires et inutiles, celle qui conserve notre âme dans l'innocence chrétienne, celle qui contribue à la paix intérieure de votre cœur, celle que nous ont prêchée les Apôtres, que nous a recommandée JésusChrist en nous ordonnant de renoncer à nous-mêmes, car qu'est-ce que renoncer à soi-même, sinon réprimer les convoitises de la chair, et tous les mouvements de la nature corrompue? Mortifions donc notre corps, mais travaillons encore plus à la réforme de notre intérieur, sans cela c'cn est fait de notre salut ; nisi pœnitentiam habueritis, omnes similiter peribitis. Pensous, mes frères, pensons sincèrcment à cet avis du Seigneur, humilions notre cœur en sa présence, par les jeûnes et les austérités compatibles avee notre état; agissons, souffrons tout en esprit de pénitence; et vous, Seigneur, de qui vient la force et la conversion de l'homme, armez-vous contre nous-mêmes, convertissez-nous à vous, faites de nous de vrais pénitents jusqu'à la mort, afin qu'alors rien ne retarde notre union éternelle avec vous. Amen.

ÉVANGILE

Du Dimanche dans l'octave de la Nativilė.

En ce temps-là, Joseph et Marie mère de Jésus, étaient dans l'admiration des choses qu'on disait de lui, et Siméon le bénit, et dit à Marie sa mère: Cet enfant que vous voyez est pour la ruine et la résurrection de plusieurs dans Israël, et pour être en butte à la contradiction des hommes. Votre âme même sera percée par un glaive, afin que les pensées de plusieurs qui étaient cachées dans le fond de leur cœur soient découvertes. Il y avait aussi une prophetesse nommée Anne, fille de Phanuel, de la tribu d'Aser, qui était déjà fort avancée en âge, n'ayant vécu que sept ans avec son mari depuis qu'elle l'avait épousé étant vierge. Elle était alors veuve, âgée de quatre-vingt-quatre ans, et elle était continuellement dans le temple, servant Dieu jour et nuit dans les jeûnes et dans les prières. Etant donc survenue à la même heure, elle se mit aussi à louer le Seigneur, et à parler de lui à tous ceux qui attendaient la rédemption d'Israël. Après qu'ils eurent accompli tout ce qui était ordonné par la loi du Seigneur, ils retournèrent en Nazareth ville de Galilée, et l'enfant croissait et se formait, et la grâce de Dieu demeurait en lui.

Homélie sur l'accomplissement de la loi.

Craignez Dieu, observez ses commandements, c'est là tout l'homme, tout l'essentiel de l'homme; ses obligations, son bonheur, le point capital auquel on peut réduire tout ce qui le concerne; qu'il craigne le Seigneur, et qu'il observe sa loi, il est dans l'ordre moral tout ce qu'il doit être; qu'il cesse de faire l'un et l'autre, c'est un monstre dans la nature plus extraordinaire et plus horrible que ne le serait un corps vivant sans âme : il est autant nécessaire que l'homme tende

à Dieu par l'observance de sa loi, qu'il est essentiel qu'il y ait une âme dans son corps pour qu'il soit véritablement homme. Aussi quelle exactitude dans tous les saints à observer la loi de Dieu, et en particulier dans ces saintes femmes dont parle notre Evangile! quelle exactitude de la part de Marie à suivre les pieux usages de sa nation! Non-seulement elle accomplit toute justice, mais ce qui est plus essentiel, elle l'observe comme le veut le sage justement (1) dans la crainte de Dieu, dans les dispositions sans lesquelles toutes nos justices ne sont, pour me servir de l'expression du Prophète, qu'un linge souillé, dans des dispositions de la piété la plus tendre, de la charité la plus héroïque, et du zèle à son égard le plus austère. Et pour dire encore un mot de la sainte veuve dont l'Evangile fait mention, son amour pour la continence, ses jeûnes, ses prières, tout cela ne vous a-til pas édifié? Ces deux saintes femmes peuvent donc vous être proposées, l'une comme un modèle des dispositions avec lesquelles nous devons observer la loi ; l'autre comme un exemple qui vous anime, qui vous fasse remplir les devoirs de votre état, vous surtout, filles et femmes, dont le sexe a donné tant d'exemples de vertu. Que dirons-nous encore de la consolation que la seconde procure à la première en publiant les louanges de son fils? n'est-elle pas une preuve des consolations que procure le parfait accomplissement de ses obligations? Le tendre amour de Jésus-Christ pour nous, les grâces dont il est rempli, ne semblent-elles pas nous assurer de sa part les secours qui nous sont nécessaires? Tâchons, mes frères, de les mériter ces consolations et ces secours : examinons ce que les personnes de notre Evangile font pour la loi de Dicu, et ce que Dieu fait pour récompenser leur fidélité; et afin que ces considérations puissent nous être utiles, apprenons deux choses qui feront le sujet de cette homélie. Voyons d'abord les dispositions avec lesquelles nous devons observer la loi de Dieu, ce sera le sujet de mon premier point; voyons ensuite les motifs que nous propose notre Evangile pour observer cette loi, ce sera le sujet

(') sap 6.

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