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ÉVANGILE

Du II. Dimanche après l'Epiphanie.

En ce temps-là, il se fit des noces à Cana en Galilée, et la Mère de Jésus y était. Jésus y fut aussi convié avec ses disciples. Et comme le vin vint à manquer, la mère de Jésus lui dit: Ils n'ont point de vin. Jésus lui répondit : Femme, qu'y a-t-il de commun entre vous et moi? Mon heure n'est pas encore venue. Sa mère dit à ceux qui servaient: Faites tout ce qu'il vous dira. Or il y avait là six grandes urnes de pierre, pour servir aux purifications qui étaient en usage parmi les Juifs, dont chacune tenait deux ou trois mesurs. Jésus leur dit: Emplissez les urnes d'eau ; et ils les emplirent jusqu'au haut. Alors il leur dit : Puisez maintenant, et portez-en au maître-d'hôtel, ét ils lui en portèrent. Le maître-d'hôtel ayant goûté de celte eau qui avait été changée en vín, et ne sachant d'où venait ce vin, quoique les serviteurs qui avaient puisé l'eau le sussent bien, il appela l'époux, et lui dit: Tout homme sert d'abord le bon vin ; et après qu'on a beaucoup bu, il en sert alors de moindre : mais pour vous, vous avez réservé jusqu'à cette heure le bon vin. Ce fut là le premier des miracles de Jésus, qui fut fait à Cana en Galilée, pour manifester sa gloire, et ses disciples crurent en lui.

Homélie sur le Mariage.

La fin que se propose l'Eglise en fisant aujourd'hui cette partie de l'Evangile à ses enfants, est de les instruire sur le Sacrement de mariage. Depuis le premier dimanche de l'Avent jusqu'au lendemain de l'Epiphanie, elle leur avait interdit les noces corporelles, elle avait même désiré qu'ils s'en interdissent l'usage légitime, afin de pouvoir s'occuper uniquement des noces spirituelles que le Verbe éternel ve

nait célébrer avec l'Église et avec la nature humaine par le mystère de l'Incarnation; aujourd'hui que la défense est levée, elle veut leur apprendre comment ils doivent user de sa permission; et pour cela que fait-elle ? Elle leur propose l'exemple d'un saint mariage, qui puisse tracer un plan de conduite à ceux qui se disposent à cet état, et qui fasse voir à tous les chrétiens les grâces abondantes dont Dieu bénit ceux qui ne se marient qu'en lui, que pour sa plus grande gloire et pour leur salut. Voyons-le donc cet exemple, considérez-le attentivement, vous qui êtes déjà, ou qui serez un jour engagés dans cet état si périlleux : considérez ce que les époux de Cana font pour le Seigneur, et ce que le Seigneur fait pour eux: ils l'appellent à leurs noces, ils désirent qu'il soit à la tête de leurs conseils, qu'il entre dans toutes leurs délibérations, qu'il conduise toutes leurs démarches: ils s'assurent de sa protection, en s'appuyant du crédit de Marie et de ses disciples. Voilà l'attention avec laquelle ils traitent l'affaire importante de leur mariage. Ce respect profond, cette juste déférence qu'ils ont pour Jésus, attire sur eux les bénédictions les plus précieuses. Marie emploie sa médiation en leur faveur, lorsque tout semble désespéré pour la grâce qu'ils attendent; elle les soutient de ses avis pleins de lumières, et bientôt ils éprouvent ce qu'a dit saint Bernard depuis, que jamais on n'a invoqué Maric, sans obtenir d'elle ce qu'on demandait dans sa nécessité. Non-seulement JésusChrist consent à sa prière de changer l'eau en vin ; mais, parce qu'il doit bientôt rétablir le mariage dans son premier état, défendre la polygamie permise aux Juifs, déclarer que le libelle de divorce accordé à la dureté des Juifs n'aura plus lieu, pas même en cas d'adultère décider, que quiconque alors passerait à un nouvel établissement, deviendrait iuimême adultère; parce qu'il connaît le poids de toutes ces charges, avant de les avoir imposées, il les allége par sa grâce, en élevant le mariage à la dignité de Sacrement ; c'est pour cela (1) qu'il assiste aujourd'hui aux noces, afin de bénir notre naissance jusque dans son principe, en perfection

(1) Cyrillus Alexand. Ep. ad Nestorium.

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nant, dit le Concile de Trente, en perfectionnant de sa grâce l'amour naturel des époux, en affermissant de sa grâce leur union indissoluble, en sanctifiant les époux de la grâce qu'il leur a méritée par la passion (1). Voilà en peu de mots ce que les époux de Cana ont fait pour assurer à leur mariage la grâce de Jésus, et ce que Jésus a fait pour eux : voilà ce que l'Eglise veut que vous considériez, afin de vous bien préparer, afin de vous conduire saintement dans l'état du mariage; et voilà, mes frères, ce que je vous demande avec toutes les instances, le zèle et l'ardeur que peut me suggérer mon ministère. De quelle importance n'est-il point que vous pensiez mèrement à un état qui intéresse votre salut et la gloire de Dieu, l'État et l'Église, le ciel et la terre! Or tel est le mariage, il intéresse votre salut éternel; un mauvais mariage entraîne après soi la mauvaise éducation des enfants, les froideurs, les aversions, le dégoût de la piété, l'oubli de Dieu; il intéresse la gloire de Dieu, puisque les seules vues qu'on doit s'y proposer, c'est de le servir, et de lui procurer des saints; il intéresse l'État, à qui il doit donner des sujets fidèles; l'Église, à qui il doit élever de saints ministres ; la terre, à qui il doit laisser des exemples d'édification; le ciel, qu'il doit peupler de citoyens. Pensez-y donc, mes frères, et voyez avec moi, 1. les dispositions nécessaires à un saint mariage, ce sera le sujet de mon premier point; 2. les grâces que Dieu verse sur un saint mariage, ce sera le sujet du second l'un et l'autre serviront à vous faire connaître, et je l'espère, à vous faire remplir vos obligations. Elevez votre cœur à Dieu pour lui en demander la grâce.

PREMIER POINT.

Il se fit des noces à Cana en Galilée, et tous les jours il s'en fait parmi nous, c'est l'état auquel le plus grand nombre semble être appelé, ou du moins celui qu'embrasse le plus grand nombre. Qu'est-ce donc que les noces ? qu'est-ce que le mariage? Avant de vous parler des dispositions qui y sont

(1) Conc. Trid. Sess. 24,

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nécessaires, il ne sera peut-être pas hors de propos de vous rappeler la notion qu'on vous en a donnée dès vos plus tendres années le mariage, vous a-t-on dit alors, c'est un sacrement qui unit l'homme et la femme pour vivre ensemble chrétiennement, et élever des enfants selon Dieu. Je vous expliquerai ceci en peu de mots. 1. Le mariage est un sacrement, il en a la nature et les qualités; les Sacrements, selon la doctrine reçue dans l'Église, sont des signes et le mariage signifie l'union ineffable du Verbe éternel avec la nature humaine, et l'union mystique de Jésus-Christ avec son Église; les sacrements sont des signes sensibles, et le mariage est un signe qui le devient par les paroles ou les gestes qui expriment le consentement mutuel des futurs époux; les sacre :ments sont des signes de choses saintes et sacrées, et le mariage est un signe de cette grâce dont les époux ont besoin pour se sanctifier en leur état ; les sacrements sont des signes établis par Jésus-Christ, et le mariage est un signe institué par Jésus-Christ; comment cela, mes frères? pour le com prendre, il faut considérer le mariage sous trois rapports différents, comme contrat naturel, civil et ecclésiastique : comme contrat naturel, il a été établi de Dieu même dans le paradis terrestre (1): Dès-lors il répandit un profond someil dans Adam, il lui ôta une de ses côtes, mit de la chair en sa place et il forma la femme de cette côte qu'il avait ôtée à Adam; il l'amena ensuite à Adam, et il la lui donna pour femme; pourquoi ? pour lui servir d'aide, et pour peupler la terre (2); voilà l'essence du mariage, comme contrat naturel. Ce contrat naturel est encore appelé contrat civil, quand il est revêtu des formalités requises par les lois et les ordonnances des princes: et contrat ecclésias.. tique, quand il se fait selon les rits de l'Eglise, lorsque le ministre prononce la forme de ce sacrement avec l'intention de faire ce que fait l'Église. En tout cela qu'y a-t-ii donc qui soit de l'institution de Jésus-Christ? c'est la grâce qu'il a attachée à ce contrat ecclésiastique; cela seul suffit pour dire que le mariage est un signe institué de Jésus-Christ. Enfin les

(1) Gen. 2.- (2) Gen. 1.

sacrements sont institués pour la sanctification de nos âmes, et le mariage est encore élevé à la dignité de sacrement pour la sanctification des époux comme je le dirai bientôt : ainsi le mariage est un vrai sacrement, un grand sacrement, dit saint Paul, Sacramentum magnum (1); un sacrement véritablement grand par le rapport qu'il a avec Jésus-Christ et avec l'Église qui est l'épouse de Jésus-Christ, et surtout par la grâce qu'il produit dans les cœurs bien disposés.

2o Ce sacrement unit l'homme et la femme, c'est-à-dire, qu'il unit leur esprit et leur cœur en leur donnant un esprit de paix et de concorde, de continence et de chasteté conjugale. {3o Ce sacrement les unit pour vivre ensemble et élever des enfants selon Dieu; ce sont les deux fins pour lesquelles le mariage a été établi : il l'a été afin que deux époux vivant ensemble se prêtassent un secours mutuel dans leurs nécessités, et encore afin qu'ils élevassent des enfants qui bénissent le Seigneur: voilà, mes frères, les réflexions que j'avais à faire d'abord sur la nature du sacrement de mariage; elles m'ont paru essentielles, parce qu'elles renferment en un sens toutes celles que nous ferons et qu'on peut faire sur cette matièrc; en effet, vous y avez pu remarquer ce que saint Augustin a observé dans plusieurs endroits de ses ouvrages (2), que dans le mariage des chrétiens il se trouve trois biens qui méritent toute leur attention : le sacrement, la foi mutuelle, et la naissance des enfants; or c'est sur ces trois biens que j'établis la nécessité de n'entrer dans l'état du mariage qu'après s'y être bien disposé. Notre Evangile dit que Marie était aux noces de Cana, que Jésus y fut aussi convié avec ses disciples; c'est ce qui doit s'observer spirituellement dans toutes les noces des chrétiens. Il faut que le premier soin des époux soit d'y inviter Jésus-Christ, c'est-àdire de purifier leur âme, de penser mûrement à la grandeur de leur action, et de diriger leur intention. Voilà les trois principales dispositions à un saint mariage. Pureté de cœur, première disposition au mariage.

(1) Ephes. 5 (2) Aug. lib. 1. de nupt, et concup's. lib. 3. contrà Julian, lib. de bono conjug.

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