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saints dont il fera le bonheur, 6 la funeste sentence ! Etre chargé des malédictions du Seigneur, maudit dans son corps, maudit dans son âme, maudit dans toutes les facultés de ce corps et de cette âme, ô l'accablant anathême ! Être brûlé dans un feu allumé par la colère du Seigneur, un feu qui pénètre le corps et l'âme, le supplice désespérant! une éternité dans ce supplice, ô rage ! ô désespoir ! Montes, cadile super nos.... Montagnes, tombez sur nous, dérobez-nous à nousmêmes.

Mon Dieu, serais-je comme eux placé à la gauche ? entendrais-je comme eux cet arrêt, allez, maudits 2 vomirais-je tous ces blasphêmes ? puis-je y penser sans frémir? Dieu de bonté, inspirez-moi ici toute la confiance dont j'ai besoin, je veux éviter ce jugement terrible, je veux être jugé avec les justes, rien de plus consolant pour eux que le jugement général, vous le verrez dans mon second point.

SECOND POINT.

Pous vous, lorsque ces choses commenceront d'arriver regardez et levez la tête. His autem, etc. Il est donc des hommes que les signes du jugement dernier doivent faire sécher de frayeur, et ceux-là sont les pécheurs. Il en est d'autres (et ceux-ci sont les justes) à qui ces signes doivent faire lever la tête, c'est-à-dire, que ces signes doivent pénétrer de joie et de la consolation la plus douce; pourquoi cela, mes frères? par deux raisons que nous donne l'Evangile ; la première est que leur rédemption approche, appropinquat, etc, la seconde est que le royaume de Dieu n'est pas loin, propè est, etc.

Le terme de rédemption dont se sert ici l'Evangile, vous fait comprendre, justes, ce que vous ne sentez déjà que trop, que ce monde est une vraie Babylone, que la vie qu'on y mène est une vraie captivité, et que tout respire après la liberté des enfants de Dieu : elle vous fait comprendre cette expression, que votre esprit est assujetti malgré lui à l'ignorance et à mille pensées involontaires, que votre volonté fait le mal qu'elle bait, et qu'elle ne fait pas le bien qu'elle aime (1), (1) Rm. 7.

'que dans votre cœur il se glisse contre votre gré des desirs dangereux qui la portent vers le mal; que votre corps est sujet à la maladie et à la mort, que dans ces membres il y a une loi de péché qui se révolte contre l'esprit; (1) elle vous fait comprendre cette expression, que la société des hommes ici-bas est une vraie société d'Egyptiens: en Egypte, le mérite de Joseph y est inconnu, il est relégué dans de sombres cachots; ici des maîtres durs souffrent à peine que des domestiques remplissent les devoirs de la religion; en Egypte, les plus puissants oppriment le faible peuple d'Israël; ici le riche opprime les pauvres par sa puissance et son crédit ; les grands, on le dirait presque, sont d'accord pour se revètir des dépouilles de la veuve et de l'orphelin : Nonne divites per potentiam opprimunt vos, etc? (2) En Egypte, un prince cruel abuse de son autorité pour vexer les étrangers, et Dieu depuis a souvent permis que des rois et des pasteurs fussent le fléau du vrai Israël. En Egypte, Moïse essuie de continuelles contradictions du peuple qu'il veut délivrer, ici les Prètres qui travaillent le mieux au salut des âmes seraient les plus malheureux des hommes s'ils n'avaient d'espérance que pour cette vie. (3) Quelle confusion règne dans la société ! David en était presque scandalisé : ô que le Dieu d'Israël est bon pour les justes, disait-il, quàm bonus Israël Deus his qui recto sunt corde! (4) Cependant mes pieds m'ont presque manqué quand j'ai vu la paix des pécheurs; les biens, les richesses, les commodités de la vie, tout est pour eux, tandis que le juste vit dans la pauvreté, l'affliction, le mépris : Dieu connaît-il l'iniquité qu'il exalte ainsi ? Quomodo scit Deus? Le Très-Haut a-t-il connaissance de la justice qu'il humilie de la sorte? Si est scientia in excelso? Voilà la tentation d'un roi selon le cœur de Dieu, en voyant le mélange des bons et des méchants, l'empire que ceux-ci exercent sur les autres : et combien, depuis David, n'ont pas pris de là occasion de nier la providence!

Encore un moment, et le scandale sera levé, encore un moment, et les anges sépareront les méchants du milieu des

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(2, Jacob. 2.3 Corinth. 15. — (4) Ps. 71.

bons; ils se verront, ces méchants, forcés de réparer les injures commises envers les justes, de louer devant le ciel et la terre ceux qu'ils avaient méprisés et foulés à leurs pieds. Ecoutez, mes frères, le discours que le Saint-Esprit met dans la bouche des impies au jugement dernier, écoutez et profitez des leçons importantes qu'ils vont vous faire sur le bonheur des justes, sur le néant de ce monde, et tout ce qui vous charme dans ce monde.

Ils verront, dit l'Ecriture (1), en parlant des méchants, ils verront la gloire des justes, et en la voyant ils seront frappés d'une crainte horrible, turbabuntur timore horribili. Ils diront en gémissant et avec des sanglots entrecoupés de pleurs, voilà ceux que nous contristions autrefois par nos ris moqueurs, nos mépris et nos outrages: hi sunt quos habuimus aliquando in derisum. Nous les regardions comme des insensés, des hommes condamnés à vivre sans honneur, ah! nous étions nous-mêmes des insensés: nos insensati vitam illorum estimabamus insaniam et finem illorum sine honore. Suivant nous, une mémoire honteuse devait suivre leur mort, et voilà comment ils sont comptés parmi les enfants de Dieu: ecce quomodò computati sunt inter filios Dei. Ah! c'est donc nous qui avons été séduits, c'est nous qui nous sommes éloignés de la vérité et de la justice : ergo erravimus à vìá veritatis et justitiæ. Oui, nous nous sommes égarés, nous avons couru après les plaisirs, ce n'était qu'amertume, que difficulté ; lassati sumus in via iniquitatis, ambulavimus vias dificiles; nous avons aimé les préséances et les honneurs, ce n'était qu'une vaine fumée ; quid profuil superbia? nous chérissions les commodités de la vie et les biens qui les procurent ; et qu'était-ce sinon une ombre qui passait ? divitiarum jactantia quid contulit nobis? transierunt omnia illa tanquam umbra. Et de tout cela que résulte-t-il ? c'est que nous sommes trompés, et que la vraie sagesse aurait consisté à mépriser tout cela, ergo erravimus. O la terrible conséquence! l'aveu désespérant pour le pécheur ! mais aveu bien glorieux pour vous. âmes justes,

(1) Sip. 5.

âmes qui aimez à vivre dans le mépris et l'obscurité, soutenez-vous par cette heureuse espérance que ce mépris cessera et que vous serez tirées de cette obscurité pour être exaltées à la face du ciel et de la terre: levate capita vestra, quoniam, etc. Oui, fidèles épouses de Jésus-Christ, votre rédemption sera proche quand vous verrez ces signes, vous serez sur le point d'être délivrées de la sujćtion du démon, de la persécution des hommes, de la séduction de vos passions, de toutes les peines du péché, de l'ignorance qui vous aveugle, de la concupiscence qui vous fatigue, des maladies qui vous affaiblissent, de la mort à laquelle tout nous conduit: mon Dieu, quand viendra ce moment? ma captivité durera-t-elle long-temps ?

Jésus-Christ, mes frères, dans notre Evangile, répond à votre pieuse curiosité, et voici la comparaison dont il se sert. Vous reconnaissez, dit-il à ses Apôtres, vous reconnaissez que l'été est proche lorsque le figuier et les autres arbres commencent à pousser leur fruit; ainsi lorsque vous verrez arriver ces choses, sachez que le royaume de Dieu est proche : scitote quoniam propè est regnum Dei. Cette expression, que le royaume de Dieu est proche, nous marque deux choses: la première, que Dieu alors sera près de régner sur tous les hommes. Combien de peuples à qui son nom n'est pas connu! Combien de nations ou ignorent, ou blasphèment le nom adorable de Jésus-Christ! ce jour et ce moment où je vous parle semble donc être le jour, le moment des hommes, parce que c'est celui du péché et de l'ignorance; le dernier jour sera celui du Seigneur, parce qu'il fera connaître la plénitude de son être à ceux qui l'auront méconnu, parce que Jésus-Christ se fera comme un marche-pied de tous ses ennemis, et fera sentir le règne de sa justice à tous ceux qui auront refusé de vivre sous celui de ses miséricordes. Voilà la première vérité que nous présente cette expression de notre Evangile, le règne de Dicu estproche. La seconde, c'est que Jésus-Christ mettra ses saints en possession du royaume qu'il leur a mérité: venez, leur dira-t-il d'un ton de bonté, et jetant des yeux de complaisance sur ceux qui sont à sa droite, ah! venez, les bénis de

mon Père, posséder le Royaume qui vous est préparé depuis le commencement du monde, venite (1). Venez à moi, vous tous qui avez travaillé pour ma gloire, qui vous êtes épuisés de fatigue à mon service, et je vous enivrerai de torrents de délices, venite; vous avez été les bénis de mon Père, vous serez les miens ; il vous a aimés, je vous aimerai ; il vous a communiqué sa grâce, je vous rendrai participants de ma gloire ; il vous a soutenus dans vos combats, je veux couronner vos victoires; vos pensées, vos désirs, vos desseins, tout était béni en vous dans le temps, tout sera béni dans l'éternité ; votre esprit qui contemplera la souveraine vérité, votre cœur qui jouira du souverain bien, votre volonté qui s'y attachera comme à son centre, votre corps devenu spirituel et glorieux, tous les mouvements de votre âme et de votre corps qui tendront à ma plus grande gloire, venite, benedicti Patris mei; venez, vous qui n'aviez point de cité permanente sur la terre ; vous avez échangé ses biens avec ceux du ciel, vous voilà aujourd'hui les héritiers de Dieu, les cobéritiers de Jésus-Christ. Vous êtes mes frères et mes chers frères, je consens à partager avec vous le royaume de mon Père, venite, possidete; venez et concevez l'amour de ce Père pour vous, il vous à aimés d'une charité éternelle; vous n'étiez pas encore, et déjà il vous avait préparé un royaume, un royaume éternel, un royaume inamissible, un royaume où se trouve une paix parfaite et l'abondance de tous les biens, sans mélange de maux, possidete paratum vobis regnum à constitutione mundi : ainsi parlera JésusChrist à ses élus.

Les doux sentiments dont ils seront touchés alors ! Voir Jésus-Christ l'espérance de son âme, contempler son rédempteur, s'unir à ce bien-aimé, les chastes délices! Etre l'objet des complaisances du Père Eternel, et le savoir, la tendre satisfaction! Entrer dans la joie et la félicité de Dieu, posséder Dieu, et tout avec Dicu, sans craindre de le perdre, la joie ineffable! Posséder ce royaume céleste, et savoir que c'est pour un verre d'eau donné en son nóm', ô le doux sou

(1) Matth. 23.

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