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des personnes qui m'étaient chères auparavant je n'aimerai plus que vous, je ne conserverai d'attachement que pour le ciel. O qu'il est bon que nous y soyons! c'est la pensée dont je me soutiendrai contre toutes les tentations de la vie, elles tendent à m'éloigner du ciel, et je leur dirai qu'il est bon que j'y sois, qu'il n'est point de sacrifice qui doive coûter pour acquérir ce bonheur souverain ; que la grâce de Jésus-Christ nous y conduise tous. Ainsi soil-il.

ÉVANGILE

Du III. Dimanche de Carême.

En ce temps-là, Jésus chassa un démon qui était muet; et le démon étant sorti, le muet parla, et tout le peuple fut ravi en admiration. Mais quelques-uns d'entr'eux dirent: Il ne chasse les démons que par Beelzebub, prince des démons. Et d'autres le voulant tenter, lui demandaient qu'il leur fit voir un prodige dans l'air. Mais Jésus connaissant leurs pensées, leur dit : tout royaume divisé contre lui-même sera détruit, et toute maison divisée contre elle-même tombera en ruine : Si Satan est divisé contre lui-même, comment son règne subsistera-t-il? cependant vous dites que c'est par Beelzebub que je chasse les démons. Que si je chasse les démons par Béelzébub, par qui vos enfants les chassent-ils? c'est pourquoi ils seront euxmêmes vos juges. Mais si c'est par le doigt de Dieu que je chasse les démons, vous devez donc croire que le royaume de Dieu est venu jusqu'à vous. Lorsque le fort armé garde sa maison, tout ce qu'il possède est en paix; mais, s'il en survient un autre plus fort que lui qui le surmonte, il emporte toutes ses armes dans lesquelles il meitait sa confiance, et distribue ses dépouilles. Celui qui n'est point avec moi est contre moi; et celui qui n'amasse point avec moi, dissipe au lieu d'amasser, Lorsque l'esprit imTHIEBAUT. Homél, ev. H.

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pur est sorti d'un homme, il s'en va par des lieux arides cherchant du repos; et comme il n'en trouve point, il dit: Je retournerai en ma maison d'où je suis sorti; et y venant, il la trouve nettoyée et parée. Alors il s'en va prendre avec lui sept autres esprits plus méchants que lui, et entrant dans cette maison en font leur demeure; et le dernier état de cet homme devient pire que le premier. Lorsqu'il disait ces choses, une femme élevant sa voix du milieu du peuple, lui dit : Heureuses les entrailles qui vous ont porté, et les mamelles qui vous ont nourri. Jesus lui dit: Mais plutôt heureux sont ceux qui entendent la parole de Dieu, et qui la pratiquent.

Homélie sur les effets du péché.

Un ancien Père de l'Eglise (1) ne peut assez admirer la généreuse action de cette femme qui élève sa voix du milieu du peuple : quelle dévotion, quelle foi, s'écrie-t-il! elle ne se contente pas d'admirer avec le peuple ce que fait et ce que dit Jésus-Christ, elle ne craint point l'animosité des pharisiens qui se déclarent contre la doctrine et la conduite de ce divin Sauveur; elle confesse l'incarnation du Verbe d'une manière si claire et si précise, qu'elle confond et l'imposture des grands de son temps, et la perfidie des hérétiques à venir. Les premiers d'entre les Juifs niaient, et après eux les Ariens devaient nier que le fils de Dieu fût consubstantiel à son père; elle les confond en criant que Marie est heureuse, parce qu'elle a mis au monde le Roi qui gouverne le ciel et la terre dans tous les siècles; beata parens quæ nixa es puerpera regem, qui cœlum terramque tenet per secula. Les hérétiques des siècles à venir devaient encore nier la maternité de Marie: elle les confond en disant qu'heureuses sont les entrailles qui l'ont porté, et les mamelles qui l'ont nourri; car pourquoi ces entrailles seraient-elles heureuses, si la chair du Verbe était regardée comme étrangère à l'égard de celle de Marie? Marie est donc heureuse d'avoir porté un

(1) Bed. lib. 4. c. 49, in Luc. 11.

tel fils dans son chaste sein, mais bien plus heureuse de l'avoir conçu dans son cœur par la plénitude de la grâce, par l'ardeur de sa foi, et par un amour qui ne devait jamais s'affaiblir; ideò quidem beata quia Verbi incarnandi ministra facta est temporalis, sed indè multò beatior quia ejusdem semper amandi custos manebat æterna. C'est ce que le Sauveur a voulu dire, quand il a répondu à cette femme mais plutôt heureux sont ceux qui entendent lu parole de Dieu et qui la pratiquent; quin imò beati qui audiunt verbum Dei et custodiunt illud. Ces paroles, dit saint Chysostôme, ne signifient pas que Marie ne soit point et ne doive point être honorée comme la mère de JésusChrist, mais seulement que c'est moins sa maternité qui l'a rendue heureuse, que son attention et sa fidélité à la parole divine. C'est donc aussi, mes chers frères, notre exactitude à écouter le saint Evangile, c'est notre soin à le pratiquer qui peut nous rendre heureux, non point au jugement des hommes, mais au jugement de Dieu même; beati qui audiunt verbum Dei et custodiunt illud. Ecoutons-le donc, et profitons des solides instructions que Jésus nous fait aujourd'hui sur les tristes effets du péché.

Il venait de parler de la prière et de son efficacité, il avait dit que Dieu était toujours prêt à accorder les grâces que nous lui demandons par rapport au salut, et il prouve ce qu'il avait avancé en faisant le miracle dont parle l'Evangile ; on lui présente un homme muet et possédé du démon, on le prie de le guérir, et à l'instant même il commande au démon de sortir de son corps, et il lui rend l'usage de la vue et de la langue; voilà une preuve de la puissance et de la bonté infinie de notre Sauveur, en voici une autre de la malice de ses ennemis. Au lieu d'admirer le miracle avec le peuple, ils l'attribuent au prince des démons, ils supposent malignement une secrète intelligence entre lui et ce prince des ténèbres, et l'obligent de leur en démontrer l'impossibilité. Il le fait donc, et termine son discours, en leur annonçant l'état funeste où la rechute va les plonger.

Ce discours et ce miracle qui l'a précédé, c'est ce qu'il nous faut étudier pour concevoir dans ce saint temps une

vive horreur du péché, pour apprendre à en sortir, si nous avions le malheur d'y être, et pour nous préserver de la rechute. Justes, pécheurs, pénitents, vous avez tous ici à profiter; les justes, pour ne pécher jamais ; les pécheurs, pour sortir de l'état horrible du péché; les pénitents, pour ne plus retomber dans le péché. Justes, écoutez donc, de peur de devenir pécheurs; pécheurs, écoutez, de peur de vous endurcir dans le péché ; et vous qui nous avez déjà donné des marques de votre pénitence, écoutez encore, de peur qu'il ne vous arrive quelque chose de pire, ne deterius tibi aliquid contingat. Comprenez, pécheurs impénitents, par ce que je vais dire aux justes, combien il vous importe de vous dégager des liens de vos péchés, et de vous disposer dès ce moment à une bonne confession; voilà l'idée qui pourra fixer votre attention: et qui formera le plan de cette Homélie. Craignez le péché, justes qui avez eu le bonheur de conserver l'innocence; parce qu'il entraîne avec lui les conséquences les plus funestes pour le temps; vous le verrez dans mon premier point: et vous, pénitents, qui avez eu le bonheur de recouvrer votre innocence, ah! craignez encore plus la rechute dans le péché, elle entraîne avec elle les conséquences les plus terribles pour l'éternité; vous le verrez dans le second point.

PREMIER POINT.

En ce temps-là, Jésus chassa un démon qui était muet, et lorsqu'il eut chassé le démon, le muet parla ; erat Jesus ejiciens dæmonium, et illud erat mutum, et cùm ejecisset dæmonium, locutus est mutus. Saint Matthieu qui rapporte le même miracle (1), ajoute ici une circonstance qu'omet saint Luc: il dit que cet homme était encore aveugle, et qu'au commandement de Jésus-Christ il commençà à voir; tunc oblatus est ei dæmonium habens cæcus et mutus; et curavit eum ita ut videret. Il était donc ce fils d'Abraham, affligé de trois grands maux, dont chacun séparément pouvait le rendre miserable; il était possédé du démon, damo(1) Cap. 22.

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nium habens; il était muet, et illud erat mutum ; il était aveugle, oblatus est cæcus. Dans un sens spirituel que pouvait nous figurer ces différents maux? ceux, vous répond l'Ange de l'école (1) après le vénérable Bède (2), ceux que le péché fait à l'âme du pécheur dès cette vie même en la rendant esclave du démon, muette et aveugle; voilà les tristes effets, les conséquences funestes du péché, essayons de nous en former une idée ; et remettons à une autre occasion de parler de la nature du péché et de ses autres essets. Premièrement, le péché rend l'homme esclave du démon; c'est une vérité que l'Esprit saint nous a clairement enseignée dans plusieurs endroits de l'Ecriture sainte. Dans l'Epître aux Romains, l'Apôtre saint Paul combattant cette erreur dangereuse qu'on a vue renaître dans les derniers siècles : que nous pouvons pêcher, parce que nous ne sommes plus sous la loi, mais sous la grâce; eh! quoi donc, disait-il, ne savezvous pas le principe avoué dans le commerce de la vie civile? ne convenez-vous pas que vous devenez esclave de celui à qui vous obéissez ? Cette maxime sera-t-elle moins vraie dans la religion? n'êtes-vous pas les esclaves du péché pour y trouver la mort, ou de l'obéissance pour y trouver la justice selon que vous avez résolu de servir l'un ou l'autre ? nescitis quoniam cui exhibetis vos servos ad obediendum, servi estis ejus cui obeditis, sive peccati ad mortem, sive obeditionis ad justitiam ? Vous voyez par ces paroles que l'homme est nécessairement esclave, ou du péché, ou de la justice et de la grâce, et que s'il renonce à la douce servitude de la loi, ce n'est que pour rentrer dans la servitude du démon et du péché. Dans la seconde Epître à Timothée (3), il nous présente ceux qui résistent à la vérité, et tous les pécheurs par conséquent, ( puisqu'on ne l'est jamais que pour avoir fermé les yeux à la lumière), il nous ies représente comme des imprudents qui sont tombés dans les piéges du démon, et qui sont arrêtés à ses filets: comme des insignes rebelles qui ont été condamnés à devenir les esclaves de ce prince de ténèbres, et à faire ce qu'il lui plairait; ne re

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