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en mal, et quand une fois vous nous aurez guéris, ah! nous vous en conjurons, gardez-nous comme la prunelle de l'œil, faites que nous soyons encore plus attentifs à pratiquer le bien, que l'esprit impur à nous entraîner vers le mal. Non, il ne rentrera jamais dans ce cœur qu'il a habité, mais il sera, û mon Sauveur, votre habitation dans le temps et l'éternité bienheureuse; je vous la souhaite. Ainsi soit-il.

ÉVANGILE

Du IV. Dimanche de Carême.

En ce temps-là, Jésus s'en aila au-delà de la mer de Galilée qui est le lac de Tiberiade ; et comme une grande foule de peuple le suivait, parce qu'ils voyaient les miracles qu'il faisait sur les malades, il monta sur une montagne où il s'assit avec ses disciples. Or le jour de Pâques, qui est la grande fête des Juifs, était proche. Jésus levant donc les yeux, et voyant qu'une grande foule de peuple venait à lui, dit à Philippe : D'où pourrons-nous acheter assez de pain pour donner à manger à tout ce monde ?. Mais il disait ceci pour le tenter, car il savait bien ce qu'il devait faire. Philippe lui répondit : quand on aurait pour deux cents deniers de pain, cela ne suffirail pas pour en douner à chacun tant soit peu. Un de ses disciples qui était André, frère de Simon-Pierre, lui dit : il y a ici un petit garçon qui a cinq pains d'orge et deux poissons; mais qu'est-ce que cela pour tant de gens? Jésus leur dit : Faites-les asseoir, il y avait beaucoup d'herbe dans ce lieulà, et environ cinq mille hommes s'y assirent, puis Jésus prit les pains, et ayant rendu grâces, il les distribua à ceux qui etaient assis : et on leur donna de même des deux poissons autant qu'ils en voulurent. Après qu'ils furent rassasiés, il dit à ses disciples: Amassez les morceaux qui sont restés, afin que rien ne se perde. El les ayant ramassés, ils emplirent douze paniers des morceaux des cinq

pains d'orge qui étaient restés après que tous en curent mangé. Ces personnes ayant donc vu le miracle qu'avait fait Jésus, disaient : C'est là vraiment le prophète qui doit venir dans le monde. Mais Jésus sachant qu'ils devaient venir le prendre et l'enlever pour le faire roi, s'enfuit, et se retira encore seul sur la montagne.

Homélie sur l'aumône.

L'Eglise, en proposant aujourd'hui la multiplication des pains aux réflexions de ses enfants, semble avoir eu en vue de les instruire sur l'un de ces deux objets, sur la sainte communion ou sur l'aumône. En effet, quelles sont les dispositions qu'on doit apporter à la réception du sacrement de nos autels? nous devons nous en approcher avec un saint désir de nous unir à Jésus-Christ, avec un cœur aussi rempli de son amour, que vide de celui des créatures, avec une humilité qui ne diminue rien de la confiance en ses bontés. Quels sont encore les fruits que nous en devons tirer ? notre reconnaissance doit en devenir plus vive, notre foi plus ferme, notre attachement à Jésus-Christ plus inviolable; or toutes ces dispositions et ces avantages nous sont marqués dans notre Evangile. Nous y voyons les peuples chercher le Sauveur jusqu'à l'oubli d'eux-mêmes, la nourriture de leurs âmes jusqu'à l'oubli de la nourriture corporelle : ils s'asseyent sur le foin, et marquent par là, disent les Pères, que les biens de ce monde ne sont qu'un peu de foin qui passe au premier rayon de soleil, et qu'ils n'en font pas plus de cas : ils rendent grâces avec Jésus, ils le croient ce Prophète que Moïse leur avait promis, ils ne veulent plus avoir d'autre roi que lui. Je pourrais donc vous entretenir de la communion pascale, à laquelle vous avez dû vous préparer dès le commencement du carême; mais il faudrait, dans un entretien semblable. vous parler de la nécessité d'être en état de grâce: en vous parlant de cette nécessité, il faudrait encore vous indiquer les moyens de purifier sa conscience. Ne sera-t-il donc pas plus expédient de commencer par jeter les fondements de Fédifice spirituel que vous avez résolu de bâtir? et quels

sont-ils donc ces moyens ? toutes les pratiques usitées dans ces jours de salut, l'austérité du jeûne, l'amour de la retraite, les lectures de piété, l'aumône. Il est donc juste qu'après vous avoir parlé des autres pratiques de pénitence dans les discours précédents, je vous entretienne aujourd'hui de l'aumône. Quelle vertu admirable n'a-t-elle pas pour nous réconcilier avec le Seigneur ? le Sage nous dit que, comme l'eau éteint le feu lorsqu'il est le plus ardent, de même l'aumône expie le péché : ignem ardentem extinguit aqua,et eleemosyna resistit peccatis. Dieu la considère, s'en souvient dans la suite, et promet que celui qui la fait, trouvera un appui au temps de sa chute; Deus meminit ejus in posterum, et in tempore casus sui invenit firmamentum (1). Tobie, parmi les avertissements salutaires qu'il donnait à son fils, lui recommandait surtout la pratique de l'aumône, comme propre à délivrer de tout péché, de la mort éternelle où conduit le péché, et des ténèbres horribles qui environnent ceux qui sont condamnés à une seconde mort; quoniam eleemosyna ab omni peccato et à morte liberat, et non patietur animam ire in tenebras (2). C'est ce que j'espère vous montrer dans l'explication de notre Evangile je m'attacherai à vous faire voir que l'esprit de charité est comme l'esprit et le caractère du christianisme, qu'il est celui de notre chef, celui de ses ministres, celui de Dicu qui fait luire son soleil sur les bons et sur les méchants: que ne pas se conduire par cet esprit, c'est n'être plus chrétien, c'eșt cesser d'être homme, et renoncer aux avantages les plus sólides. Je sens que j'omettrai bien des réflexions essentielles sur la quantité de l'aumône, sur ses qualités, sur les prétextes dont on use pour se dispenser de ce devoir; mais je vous prie de remarquer que nous aurons à traiter le même Evanglle le sixième dimanche d'après la Pentecôte, et qu'alors j'aurai occasion de vous parler de ces points essentiels à la matière présente. Voici donc le plan que je me trace pour aujourd'hui. Jamais le nombre des pauvres fut-il plus grand? jamais les riches furent-ils moins sensibles à la mi

(1) Ecol. 3. — (2, Tob. 4.

sère des pauvres, qu'aujourd'hui ? il faut donc les faire sortir de cet état d'insensibilité; et pour cela, leur faire bien comprendre les raisons qui les obligent à aider les pauvres, chacun selon son pouvoir, et selon toute l'étendue de son pouvoir. Jamais on ne connut moins l'utilité de l'aumône que de nos jours: on se plaint que les inondations, les grèles, la stérilité, mettent hors d'état de soulager son prochain, tandis peut-être que Dieu n'a envoyé ces fléaux que pour punir la dureté des riches envers les pauvres; on craint de s'appauvrir en faisant des aumônes copieuses, tandis qu'on s'appauvrit en dissipant son bien par de folles dépenses, ou en le resserrant sans en faire aucun usage; car quel est l'avare qui ne souffre tous les maux de la pauvreté ? il faut donc exposer à vos yeux les précieux avantages des œuvres de charité, c'est ce que je me propose de faire; les obligations et les avantages de l'aumône feront tout le sujet de votre attention.

PREMIER POINT.

L'aumône, suivant la définition qu'en donnent les théologiens après saint Thomas, c'est un acte par lequel on soulage la nécessité spirituelle ou corporelle du prochain; c'est un acte de miséricorde, c'est-à-dire qu'elle doit avoir pour principe, non la vanité, non le désir des louanges, non le caprice et la fantaisie, mais la vertu de miséricorde, mais une sincère compassion sur les maux de son prochain : c'est un acte de miséricorde par lequel on soulage; c'est-à-dire que la fin de l'aumône doit être le soulagement de celui à qui on la fait, en même temps que Dieu est la fin de celui qui la donne; c'est un acte de miséricorde par leque! on soulage la nécessité spirituelle ou corporelle; c'est-à-dire que l'une ou l'autre de ces nécessités peut être l'objet de nos aumônes; et par conséquent qu'instruire un ignorant, donner un conseil à celui qui en manque, reprendre un pécheur, consoler un aflligé, pardonner à un coupable, supporter les défauts de ses frères, prier pour eux, visiter un malade, pénétrer les sombres cachots des prisonniers, soutenir le poids de leurs

chaînes par ses largesses ou ses exhortations, recueillir un étranger, exercer l'hospitalité, nourrir ceux qui ont faim ; que toutes ces actions, dis-je, sont de vraies aumônes, qu'elles en ont tout le mérite devant Dieu, et que vous devez entendre des unes et des autres tout ce que la religion nous enseigne des obligations et des avantages de l'aumône; mais bornonsnous à connaître ce qui concerne les aumônes temporelles, surtout voyons sur quoi en est fondée l'obligation; et pour cela arrêtons-nous d'abord à l'exemple du Sauveur, passons ensuite au ministère qu'exercent les apôtres, remontons enfin jusqu'aux lois générales de la providence, nous y trouverons, je ne dis pas seulement des preuves qui nous convaincront, mais qui, je l'espère, nous toucheront, nous persuaderont efficacement de remplir un devoir, hélas! trop négligé de nos jours.

En ce temps-là: Jésus alla aude-là de la mer de Gali lée, qui est le lac de Tibériade, post hæc abiit Jesus trans mare Galilææ, quod est Tiberiadis.

Nous trouvons ailleurs la raison pour laquelle Jésus-Christ se retira au-delà de cette mer, et jusque dans le désert: il avait fait un grand nombre de miracles dans les villes et les bourgades de la Galilée; ces miracles, quoique fort tard, étaient parvenus à la connaissance d'Hérode; quelle fut la furcur de cet odieux tyran lorsqu'il les apprit! cet usurpateur du sceptre de Juda avait tout récemment fait mourir le saint précurseur qu'il tenait pour un grand Prophète : suivant le système impie de la métempsycose, qu'il adoptait, il crut que l'esprit de Jean-Baptiste animait le corps de Jésus-Christ dont on lui parlait, qu'ii ne tarderait pas de venir lui reprocher son inscestueuse alliance avec plus de force qu'auparavant: rongé par les remords de sa conscience, agité de diverses pensées qui lui ôtent son repos, affligé de l'image d'une victime innocente qui le suit partout, il désire, pour calmer ses inquiétudes, de voir et d'entretenir Jésus-Christ ; pourquoi ? peut-être pour l'immoier de nouveau à sa passion brutale. Le divin Sauveur qui connaît ses peines, et qui pénètre ses desseins, se retire donc; c'est afin d'ôter à Hérode l'occasion d'un nouveau péché, c'est pour nous apprendre à

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