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suivi la coutume, mais ils n'ont pas rempli le précepte; ils ont paru pénitents, mais ils n'avaient que l'apparence et non les sentiments de la pénitence; ils ont reçu une absolution, mais qui, au lieu d'abolir leurs crimes, y mettait le comble par le sacrilége qu'ils commettaient en le recevant sans les dispositions nécessaires, et par celui auquel elle les préparait en leur donnant la fausse et pernicieuse assurance de recevoir Jésus-Christ, de le crucifier de nouveau, de s'incorporer leur jugement et leur éternelle condamnation ; car voilà, hommes de mauvaise foi faux pénitents! vous qui avez cherché à surprendre vos confesseurs, et qui, à la faveur de vos artifices, cherchez à calmer vos consciences ! voilà les crimes horribles dont vous vous êtes rendus coupables ; quelle paix pourraient se promettre des déïcides ? Numquid pax potest esse Zambri qui interfecit Dominum suum? O la paix funeste que celle qu'on goûterait dans un tel état ! elle conduirait et elle ne conduit que trop tous les jours à l'impénitence finale. Cherchez-en donc, mes frères, cherchez-en une plus salutaire dans une confession telle que la religion l'exige, puisque celle-là seule vous peut procurer la paix du cœur. Joignez à cette pratique religieuse une foi ferme et solide des vérités de la religion, et la divinité du Verbe en particulier, c'est le moyen de jouir de la paix de l'esprit : la suite de notre Évangile va vous le montrer.

Mais Thomas, l'un des douze Apôtres, appelé Didymė, soit qu'il ne fût pas encore revenu de la fuite qu'il avait prise au jardin des olives, soit qu'il fût sorti pour quelque assaire, n'était pas avec eux lorsque Jésus vint ; les autres disciples, tout occupés de la grâce qu'ils venaient de recevoir, et voulant faire part de leur joie à Thomas, lui dirent donc : nous avons vu le Seigneur ressuscité qui s'est exposé à l'épreuve de nos mains, et qui a mangé avec nous; Dominum vidimus. Et bien, leur dit-il, plus circonspect que vous, je ne croirai point, si ces trois conditions ne me rassurent: 1. si je ne vois de mes propres yeux dans ses mains la marque des clous qui les ont percées; 2. si je ne mets mon doigt dans le trou des clous, pour connaître si la largeur répond à la grosseur des clous à peu près semblable à

celle de mon doigt; 3. si je ne mėts dans la plaie de son côte la main tout entière, parce que la lance a dû y faire une ouverture assez large, et si elle ne se trouve pas, je ne croirai pas que c'était lui; non credam. Voilà l'incrédulité presque surnaturelle de Thomas, voici la complaisance plus qu'humaine de Jésus-Christ.

Huit jours après, les disciples étant encore dans le même lieu, et Thomas avec eux, Jésus vint à la manière des esprits, les portes étant fermées, et il se tint du milieu d'eux, et leur dit : la paix soit avec vous : pax vobis. Ensuite s'adressant à Thomas, et répétant les paroles qu'il avait dites à son absence, enfonce, lui dit-il, en lui montrant ses mains, enfonce ici ton doigt; infer digitum tuum huc et vide manus meas. Avance la main de même, et la plonge tout entière dans mon côté, et ne sois plus incrédule, mais fidèle; affer manum tuam, et mitte in latus meum, et noli essé incredulus, sed fidėlis. Enfin Thomas, vaincu et persuadé, répondit et lui dit : mon Seigneur et mon Dieu; Dominus meus et Deus meus. C'est à cette heureuse confession de la divinité du Verbe que je voulais vous conduire avec l'Evangéliste, en vous rapportant sés paroles, parce que c'est de cette confession et de cette foi que dépend toute la paix de votre esprit.

Je suppose en effet que quelqu'un soit assez malheureux de dire avec l'infidèle Thomas qu'il ne croira pas, non credam, à quoi doit se résoudre ce vain esprit pour jouir de la paix qu'il cherche ? à rejeter comme faux et supposé tout ce qui a été révélé aux Patriarches, et par eux à leurs enfants depuis la création du monde'; tout ce qui a été inspiré aux prophètes, et que la nation Juive a révéré malgré l'intérêt qu'elle avait de s'y opposer; tout ce que Jésus-Christ a enseigné, et que ses disciples ont reçu ; tout ce que les apôtres ont annoncé, et que le monde et les plus sages ont cru'; tous les miracles qui ont assuré leur doctrine, et toutes les merveilles qui ont servi à l'établissement du christianisme ; toutes les histoires, même celles qui souffrent l'épreuve de la critique la plus sévère; voilà le pas hardi qu'un incrédule doit faire vers le passé, avant de tranquilliser son esprit.

Celui qu'il doit faire vers l'avenir a des conséquences plus terribles encore; car enfin cet incrédule ou renoncera absolument à toute religion, et alors il vit sans savoir ni d'où il vient, ni ce qu'il est, ni ce qu'il deviendra, ou il s'en tient à une religion purement naturelle, car j'attaque ici le damnable système que nos beaux esprits se font de n'en recevoir point d'autres ; et dans cette supposition, ce déiste doit convenir avec lui-même de ces vérités incontestables, et se dire: il est vrai, je ne trouve aucun dogme, aucune maxime évidemment fausse dans la religion chrétienne, seulement ils sont au-dessus de ma portée; ses miracles et les autres motifs de crédibilité la rendent au moins probable, et me font douter si peut-être elle n'est pas vraie. Cependant si cela est, je m'expose à perdre un bonheur éternel, et à mériter un enfer, pourquoi cela? uniquement parce que je n'aurai voulu ni croire ni pratiquer les œuvres de la foi? parce que j'aurai secoué le joug du Seigneur pour me soumettre à celui de mes passions. Que risquerais-je au contraire en croyant, quand même, par impossible, ma foi serait fausse ? le sacrifice de quelques courts et insipides plaisirs, rien de plus. Ainsi, que je me trompe en embrassant son parti, je ne risque rien ou presque rien; mais que je me trompe en ne le prenant pas, je perds l'éternité bienheureuse, et je m'expose à une éternité malheureuse; c'est ce que se dira tout incrédule qui raisonnera de bonne foi. Or, en sachant qu'il a d'un' côté les hommes les plus sages de tous les siècles qui se soulèvent contre lui, et de l'autre une éternité heureuse à perdre, et une éternité malheureuse à souffrir, dites-le-moi, je vous prie, quelle peut être la paix de son esprit ; qu'au contraire l'incrédule soumette ses lumières à celles de la foi, le passé et l'avenir le tranquillisent également : le passé, par les témoignages certains qu'il trouve touchant le principal objet de sa foi, qui est la résurrection du Sauveur. Que sont-ils ces témoignages, au moins ceux dont parlé notre Evangile ? c'est la parole des apôtres, c'est surtout celle de saint Thomas ; car, comme l'a remarqué saint Grégoire, son incrédulité nous a été plus utile que la fidélité de tous les autres apôtres. Jusqu'où ne porte-t-il pas sa défiance et la précaution avant

de croire ? il se défie de ses frères, il se défie de Jésus-Christ, il se défie de ses yeux, il craint que ce qu'il verra ne soit un fantôme, quelle précaution auriez-vous employée pour vous assurer de la résurrection, qu'il n'ait employée pour vous ? ne serait-il pas tout-à-fait déraisonnable de ne pas s'en rapporter à son témoignage ?

Le second dont parle encore l'Evangile, ce sont les miracles. Outre ceux que vous avez entendus, Jésus-Christ, dit l'Evangile, en a fait beaucoup d'autres à la vue de ses disciples qui ne sont pas écrits dans ce livre; multa quidem et alia signa fecit Jesus in conspectu discipulorum suorum quæ non sunt scripta in libro hoc. Or ces miracles sont si grands, si nombreux, si sûrs, qu'ils ont pu convertir les plus éclairés; il y aurait donc une très-folle sagesse de ne pas s'y rendre, et il y a une sage folie de croire la doctrine qu'ils confirment; voilà les motifs qui tranquillisent notre esprit pour le passé.

La douce espérance dont il nous flatte encore pour l'avenir, ils sont écrits, afin que vous croyez que Jésus est le Christ fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom; hæc autem scripta sunt ut credatis quia Jesus est Christus filius Dei, et ut credentes vitam habeatis in nomine ejus : Heureux donc ceux qui croient sans avoir vu; beati qui non viderunt et crediderunt. Heureux ces fidèles, parce qu'ils auront la paix de l'esprit ; heureux ces fidèles qui pratiqueront ce qu'ils croient, parce qu'ils auront la paix du cœur ; heureux ceux qui estiment la paix du Seigneur autant qu'elle le mérite, parce que leur estime les engagera à croire et à fréquenter les sacrements avec les dispositions qu'ils requièrent: malheureux au contraire ceux qui ont négligé ces dispositions, ceux qui, dans ce saint temps, ont cherché à satisfaire au monde sans satisfaire à leur conscience malheureux et terriblement malheureux ceux qui ne se sont pas approchés des tribunaux de la pénitence; car le Seigneur me l'ordonne, et j'exécute ses ordres en signe de la malédiction dont il vous frappe : si vous n'êtes pénitents, je secouc pour vos têtes criminelles la poussière de mes souliers qui déposera contre vous au jugement. Grand Dieu !

:

fallait-il qu'un discours de paix se terminât par des menaces

si effrayantes?

ÉVANGILE

Du second Dimanche après Pâques.

En ce temps-là, Jésus dit à quelques-uns des Pharisiens : Je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. Mais le mercenaire, et celui qui n'est point pasteur, à qui les brebis n'appartiennent point, ne voit pas plus tôt venir le loup, qu'il abandonne les brebis et s'enfuit; et le loup les ravit et disperse le troupeau. Or le ` mercenaire s'enfuit, parce qu'il est mercenaire, et qu'il ne se met point en peine des brebis. Je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme mon père me connaît ; et que je connais mon Père, et je donne ma vie pour mes brebis. J'ai encore d'autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie; il faut aussi que je les amène ; elles écouleront ma voix, et il n'y aura qu'un troupeau et qu'un pastcur.

Homélie sur les devoirs réciproques du bon pasteur et des ouailles.

Qu'étions-nous, mes frères, avant que parût ce bon pasteur dont parle notre Evangile? des ouailles faibles que · personne ne fortifiait, des ouailles malades que personne ne -pensait à guérir, des ouailles blessées dont personne ne bandait les plaies, des ouailles tombées que personne ne relevait, des ouailles égarées que personne ne cherchait, des ouail·les sans pasteur, parce que ceux qui les conduisaient étaient tous des étrangers, des mercenaires et des voleurs. J'irai donc, avait dit le Seigneur, j'airai donc chercher mon troupeau, et je le reprendrai d'entre leurs mains; ego ipse super pastores_requiram gregem meum de manu eorum. Je

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