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de cette ancienne Frefque, qui dans la vérité est encore affez diftincte. Elle représente un Pêcheur nud & marchant fur le bord de la mer : la difpofition de la Figure eft juste, svelte & agréable; elle a le mouvement qui lui convient; le terrein du premier plan eft traité avec facilité, les flots de la mer font bien rendus, & l'horifon me paroît vrai. Au refte, l'action de la Figure, fert à prouver que les Anciens traitoient dans leurs Originaux, la Peinture, différemment de la Sculpture; c'est-à-dire, qu'ils avoient les mêmes procédés que nous : vérité dont bien des gens ne veulent pas convenir; ils jugent felon leurs préjugés, ou s'appuyent fur des copies; ils affirment d'après les uns & les autres, que la Peinture étoit anciennement fort inférieure à la Sculpture, & que fans profiter de fes avantages, elle fe renfermoit dans des bornes auffi étroites que cette même Sculpture, ce qui la rendoit fèche & froide cette décision eft démentie par l'examen & la réflexion. Je ne prétends point en inférer que la prévention pour l'Antiquité, fût exempte d'un inconvénient égal; car on ne peut douter qu'on ne retrouve des Peintures fèches, foibles de travail, copiées, ou fans aucun mérite du côté de l'Art; mais une Nation connue pour brave, n'eft point déshonorée par la poltronnerie de quelques-uns de fes membres. Ce morceau a été trouvé depuis très-peu de tems à Rome, d'où il m'a été envoyé.

La Figure a quatre pouces cinq lignes de proportion : la plus grande hauteur de l'enduit, cinq pouces quatre lignes : la plus grande largeur de ce même enduit, fix pouces fix lignes.

No. II.

Cette Planche n'ayant aucun trait à l'érudition. J'acheverai de la remplir par deux morceaux d'yvoire,

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dont la matière fera même le plus grand mérite.

Cet Ane ou ce Mulet chargé, eft de relief, fur une portion arrondie, qui paroît être le fragment d'une Alûte la partie fupérieure, comme l'inférieure, étant difpofées, mais en fens contraire, pour s'emboîter dans d'autres pièces. J'ai profité de cette occafion, pour citer le morceau le plus orné des portions de flûte que j'ai pû rassembler; les autres dont la circonférence eft complette, font percées d'un ou de deux trous; leur longueur eft médiocre, & à peu-près pareille à celle de ce fragment: aucune ne paroît avoir éprouvé d'altération; & leur diamètre eft convenable à l'idée qu'il eft possible d'avoir d'une flûte. La manière dont on réuniffoit ces morceaux, redouble le défir que j'ai d'en pofféder une entière, non-feulement pour avoir le plaifir de décrire une flûte des Anciens, mais pour concevoir le méchanifme d'un inftrument fi commun, & qui par conféquent devoit être très-fimple.

Hauteur un pouce cinq lignes: largeur un pouce trois lignes.

No. III.

Cet autre Fragment d'yvoire eft de ronde-boffe: les parties qui ne fubfiftent plus, font ponctuées fur la Planche. Le travail de ce Loup qui mange un Liévre, n'est pas du meilleur tems; mais on ne peut nier que l'action ne foit rendue, & que l'expreffion ne foit complette dans le petit morceau, qui ne peut avoir été destiné que pour faire partie d'un ornement.

Hauteur treize lignes : largeur deux pouces fix lignes.

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PLANCHE

LXXI.

LES pluyes du commencement de cette année 1760, ont renverfé quelques-unes des ruines du Mont Palatin: l'on m'a envoyé de Rome les trois morceaux de Peinture gravés fur cette Planche, & qu'on a trouvés dans les débris.

L'explication de leur fujet n'exige pas beaucoup de recherches; mais l'examen de leur travail m'a démontré une pratique de la Peinture des Anciens, & m'a fait voir clairement qu'ils travailloient quelquefois à la détrempe, fur une couche de Minium, ou du moins de couleur rouge recouverte avec la cire, placée généralement fur la furface qui devoit être peinte.

Avant que d'entrer dans un plus grand détail, je dirai que ces Fragmens m'ont fait naître des doutes fur le Minium en général, & en particulier fur le dégré de force avec lequel les Romains l'employoient. La teinte de ces Fragmens eft fort au-deffous de ce que nous appellons Vermillon ou Cinnabre: elle tient un milieu entre cette belle couleur, & celle que l'on connoît fous le nom de Sang de bœuf. Je fçais en général que le véritable Cinnabre, felon Pline, eft le Sang Dragon, tiré de l'Ifle de Diofcoride; que le Minium eft, felon le même Auteur, le Cinnabre ordinaire, & qu'il eft tiré des mines de mercure : c'étoit celui que les Romains employoient. On portoit cependant à Rome un autre Minium. C'étoit une préparation de plomb calciné, que l'on vendoit pour le véritable. Quoi qu'il en foit, il paroît que l'on traitoit diverfement cette couleur; car elle est beaucoup moins foncée dans les enduits d'Herculanum, dont je possède quelques morceaux. Mais, pour revenir aux Fragmens dont il est question, ils m'ont convaincu que les portions de mu

Lib. VII. cap. 9.

railles qui devoient être enrichies de Peintures, ont été généralement couvertes & enduites dans toute leur fuperficie, d'une couleur rouge, à laquelle on peut d'autant plus donner le nom de Minium, qu'il étoit devenu général à Rome, pour défigner le rouge employé dans les enduits. Je me fuis de plus apperçu dans l'examen de ces Fragmens, que cette couleur a été employée felon le procédé que Vitruve nous a confervé. Il dit en parlant de l'altération à laquelle le Minium eft fujet, principalement quand il est exposé au soleil : Itaque cum & alii multi, tum etiam Faberius Scriba, cùm in Aventino voluisset habere domum eleganter expolitam, periftylii parietes omnes induxit Minio; qui poft dies triginta facti funt invenufto varioque colore, itaque primò locavit inducendos alios colores. Aut fi quis fubtilior fuerit, & voluerit expolitionem Miniaceam fuum colorem retinere, cùm paries expolitus & aridus fuerit, tunc ceram Punicam, igne liquefactam paulo oleo temperatam feta inducat, deinde poftea carbonibus in ferreo vafe compofitis, eam ceram apprimè cum pariete calefaciendo fudare cogat, fiatque ut peræquetur, pofteà cum candelis linteifque puris fubigat, uti figna marmorea nuda curantur; hæc autem Græcè dicitur xavois.

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« Ce que plufieurs perfonnes ont éprouvé, entr'autres Faberius le Greffier, qui voulant décorer avec élé» gance, la maison qu'il avoit fur le Mont Aventin, fit peindre les murs de fon périftyle avec du Minium; » mais au bout de trente jours, la couleur fut paffée » & fi altérée, qu'il fut obligé de faire enduire avec d'au» tres couleurs. Si on vouloit fe conduire plus fagement, » & conferver tout l'éclat du Minium, il faudroit, après » l'avoir couché bien également, & l'avoir laiffé fécher, » le couvrir de cire Punique fondue avec un peu d'huile, » étendre cette compofition avec une broffe, enfuite l'é» chauffer, ainsi que la muraille, avec un vafe de fer rempli de charbons allumés ; & quand la cire fera éga

» lement

» lement fondue fur toute la fuperficie, il faudra frotter » avec une bougie & des linges bien propres ; en un mot, » comme on donne la cire aux Statues de marbre qui » ne font point drapées ; opération que les Grecs appellent καῦσις.

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La résistance & la confervation parfaite de cette couleur, fur les trois morceaux tirés du Mont Palatin, prouvent qu'il faut, à l'égard de leur exécution, préférer Vitruve à Pline, qui propofe une pratique à peu- Liv. XXXIII. cap. près femblable: elle eft bonne en elle-même, la cire, 7. cet agent incorruptible, s'y trouvant employée; mais la folidité ne peut en être comparée à celle que donne la pénétration du feu; d'autant même que la cire n'eft point incorporée avec la couleur, dans le procédé que Pline rapporte en ces termes :

que

Pariete ficco cera inducatur, poftea candelis fubigatur, deinde linteis puris, ficut & marmora nitefcunt.

<< Enduifez la muraille de cire, quand elle fera fèche, » frottez-la avec des bougies, ( ou des cylindres de cire) » enfuite avec des linges biens nets, & la muraille de» viendra brillante comme le marbre poli.

La préférence que je donne au procédé de Vitruve, est établie non-seulement fur les raisons phyfiques dont j'ai parlé plus haut, mais fur l'examen de l'enduit de ces Fragmens je puis affurer qu'il n'a pas éprouvé la plus légère altération, & qu'il eft abfolument comme s'il fortoit de la main de l'Ouvrier; il a même foutenu toutes les épreuves que l'on pouvoit raisonnablement tenter, & l'on ne peut en dire autant des couleurs dont les Figures font peintes ; elles ont beaucoup fouffert de l'injure du tems; elles font même écaillées en quelques endroits; & ce qui prouve qu'elles ont été travaillées féparément, c'est-à-dire, après coup, c'eft qu'elles n'ont point fait corps avec la couleur du fond; auffi les endroits écaillés, laiffent diftinguer l'égalité du fond

Tome IV.

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