les vingt-cinq Galeres de France qui étoient à Marseille dans la mer 1545. Océane en paffant le détroit de Gibraltar ce que perfonne avant lui n'avoit entrepris, excepté le Capitaine Pregent, qui fous le regne précédent en 1512. avoit fait le même chemin avec quatre Galeres. Huit ou dix Caraques Génoifes devoient auffi joindre cette flote, mais elles arriverent trop tard, & il en périt plufieurs à l'embouchure de la Seine, faute d'avoir pris des Pilotes de Dieu, Roy de France, &c. fçavoir faifons; que pour finguliere parfaite & entiere confiance que nous avons de la perfonne de notre Amé & feal Antoine Efcalin, dit le Poulin notre Confeiller & Chambellan ordinaire & de fes fens prudence, vertu, vaillance, bonne conduite, expérience au fait de la Marine de la Guerre &des armes, loyauté & grande diligence icelui pour ces caufes & autres à ce nous mouvans avons fait commis, ordonné & eftably, faifons, commettons, ordonnons & eftabliffons par ces préJentes Chef & Capitaine Général de notredite armée du Levant. Donné à Batteville, ce vingttroifiéme jour d'Avril, l'an de Grace mil cinq cent quarante-quatre,& de notre Regne le trentiéme. François, par le Roi, le fieur d'Annebault Maréchal & Amiral de France, préfent Bayart. Ruffi fait cette charge plus ancienne de cinquante ans, & nomme Prégent de Bidoux pour premier Général des Galeres. qui fuffent affez inftruits de ce 1545 mouillage. Le nombre des gros vaiffeaux ronds c'eft ainfi qu'on appelloit alors les vaiffeaux de guerre, montoit à cent cinquante; outre une foixantaine de moindre grandeur. L'armement de terre ne devoit pas être moins confidérable que celui de mer. Le deffein du Roi étoit, pendant que fa flote iroit chercher les Anglois, de venir camper devant Boulogne, & de faire conftruire un fort, où quatre à cinq mille hommes puffent être en fûreté. Ce fort devoit être bâti vis-à-vis la tour d'Or dre, & tout proche de l'embouchure du port, de forte que le canon auroit pû battre tous les vaiffeaux que l'on auroit entrepris d'y faire entrer; & comme on avoit fait efpérer à Sa Majefté, que cet ouvrage feroit achevé vers le milieu du mois d'Août, & que fa flote feroit alors de retour de fon expédition, elle fe propofoit de marcher en perfonne avec toutes fes forces pour aller affiéger Guifnes, qu'elle fe flatoit de pou voir emporter aifément. Par la prife de cette place, Calais & la terre d'Oye fe feroient trouvées bridées; & on auroit coupé les vivres à Bou- 1545. logne; mais les chofes ne tournerent pas ainfi qu'on fe le promet toit. Cependant le Rhingrave, les Colonels Recroc & Ludovic, qui commandoient chacun deux mille Lanf quenets, eurent ordre d'aller faire en Allemagne de nouvelles levées pour augmenter leurs Regimens de la moitié; & pour completer les Bandes Françoifes, on leva dix à douze mille hommes en Gafcogne & en Languedoc, & le commandement de l'armée de terre fut donné au Maréchal de Biez. Le Roi après avoir expédié ces différens ordres, partit de Remorentin & fe rendit au Havre de Grace où devoit fe faire l'embarquement. Etant arrivé à Toucque petit Village fitué fur la riviere de ce nom, on vint lui dire qu'il paroiffoit une flotte affez près des côtes: on crut d'abord que c'étoient des navires Anglois qui vouloient tenter une defcente, mais l'on fut bientôt tiré d'inquiétude; l'on fçut par un Brigantin que ce que l'on voyoit en mer étoient les Galeres qu'amenoit le Baron de Lagarde. (a) Peu de jours après trente-cinq vaiffeaux (a) Avant que d'aller prendre le Commandement des Galeres, il fit avec le Baron d'Oppede, premier Préfident du Parlemenit d'Aix, une étrange exécution. Comme du Bellai n'en parle pas, je vais rapporter ce qu'en dit Monfieur de Thou, abregé par le P. Daniel. 2 20 cc Cabrieres étoit une petite ville du Comtat,& Merindol un gros Bourg de Provence »voifin du Comtat. Les habitans étoient infectés des erreurs des Vaudois, dont les reftes ont habité jufqu'à notre tems les montagnes & les vallées des Alpes de ce côté-là. Comme les Luthériens d'Allemagne renouvelloient plufieurs héréfies de la » Se&e des Vaudois, ceux-ci entretenoient une grande correfpondance avec eux; & » & animés par les Miniftres que Luther leur » envoya, ils commirent beaucoup d'infolences contre les Catholiques & commencerent à faire publiquement l'exercice de leur religion, à Cabrieres & à Merindol & dans quelques lieux voifins dès l'an 1540. » Le fameux Jurifconfulte Chaffannée, alors premier Préfident deProvence, voyant » parmi ces Hérétiques des difpofitions à un prochain foulevement, procéda contre eux, » & leurs Chefs;après trois citations ayant re» fufé de comparoître,il prononça au mois de »Novembre de cette même année un terrible » Arrêt, par lequel les peres de famille de Merindol étoient condamnés au feu, tous 20 3 Anglois fe préfenterent devant le les biens des habitans confifqués, toutes » les maifons du Bourg devoient être rafées, » & tous les arbres de leurs jardins, de leurs » vergers & des forêts voifines deracinés. Cependant, l'exécution de l'arrêt fut fufpendue, fur les remontrances de Guillaume Langei qui le jugea trop fevere; » & fur quelques foumiffions que firent les » habitans de Merindol; & le Légat d'Avi» gnon qui devoit marcher avec des troupes Contre Cabrieres, dans le même tems que Docelles de Provence iroient châtier Méri» rindol, fut auffi obligé de furfeoir la pu"Dnition. Cinq ans après, le Baron d'Oppede fucceffeur de Chaffannée, & Commandant en » Provence, fit fçavoir à la Cour les nouveaux défordres que faifoient les Vaudois, » & l'affura qu'il fçavoit de bonne part que ces rebelles avoient eu deffein de fur» prendre Marseille. » Le Roi, à qui l'exemple des troubles d'Allemagne faifoit extremement appréhender une guerre de Réligion dans fon Royaume, jugea qu'il falloit remédier au plutôt à ces commencemens de fédition, & par le confeil du Cardinal de Tournon, » on envoya ordre au premier Préfident d'exécuter l'arrêt de l'an 1540. Ce Magiftrat tint cet ordre fort fecret, jufqu'à ce qu'il eut pris toutes fes mesures. pour ne pas manquer fon coup. Les levées. que l'on faifoit alors en Provence pour la ( |