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Quoique les Chimistes François, de même que les Chimistes du Nord, n'euffent aucun doute fur les expériences de Brandt, M. Tillet follicita, & fe fit écrire, le 25 février 1780, une lettre par M. Necker, par laquelle ce Ministre engagea, entr'autres, l'Académie à déterminer fi l'acide nitreux avoit de l'action fur l'or. Dans le deffein de fatisfaire promptement l'Administration, je fis, devant & avec M. Tillet, les expériences les plus pofitives & les plus propres à démontrer la diffolution de l'or par l'eauforte la plus pure; M. le Baron de Maistre fut témoin de ces expériences. Ce fut alors que M. Tillet imagina de dire que l'or n'étoit que fufpendu, & non diffous dans l'acide nitreux. Je ne m'arrête point aux mots; le fait eft que le poids du cornet d'or diminue d'autant plus, qu'on a employé une plus grande quantité d'eau-forte pour l'effai, & que plus cet acide eft concentré, plus il a

d'action fur l'or.

La méthode de M. Tillet, & celle de la plupart des Effayeurs, exige de l'acide nitreux très - concentré pour la reprise du cornet. Cette eau-forte se

vendoit cent fous la livre, il étoit queftion de la payer fix francs, lorfque M. Racle, habile Effayeur, vint me demander s'il ne feroit pas poffible d'en préparer d'auffi bonne, mais à meilleur marché. Ce fut alors que je donnai à l'Administration le procédé par lequel on obtient l'acide nitreux que la Cour des Monnoies a jugé à propos de faire employer généralement pour les effais (a); il ne fe vend que trois livres, quoiqu'il foit égal, par fa concentration & fes effets, à celui qu'on vendoit cent fous.

On ne peut plus nier aujourd'hui la diffolution de l'or par l'acide nitreux concentré (b); mais on dit que ce qu'il enlève au cornet eft fi peu de chofe que cela n'eft d'aucune importance : cependant un trente-deuxième de grain étant enlevé à un cornet de douze grains, c'eft une fouftraction réelle de douze grains d'or par chaque marc de ce métal; mais comme la fouftraction eft de deux

(a) La Manufacture d'acides minéraux, établie à Javelle, près Paris, a été chargée par le Gouvernement de préparer cette eau-forte.

(b) Fait qui n'avoit point échappé à l'exactitude de M. Racle, Effayeur particulier de la Monnoie.

trente-deuxièmes de grains quand on emploie autant d'acide nitreux que M. Tillet, il réfulte que c'eft de vingtquatre grains d'or par marc qu'on fait tort au propriétaire du lingot. C'est ainsi que ce métal fe trouve alors réduit de quatre liv. huit fous par marc au-deffous de fa valeur réelle (a); & il fe trouvera à un plus haut prix par-tout où l'on aura employé une eau-forte moins concentrée pour faire la reprise du cornet, parce qu'alors il y aura moins de ce métal de diffous, & qu'il paroîtra par conféquent à un titre plus haut.

Mes recherches m'ont conduit à une découverte intéreffante, dont j'ai encore fait part à l'Administration; elle confifte à éviter les pertes qu'entraîne ordinairement l'affinage de l'or: outre que ce moyen peut faire une épargne de plus de 20000 liv. par an pour l'Affinage de Paris, il rendra auffi moins mal-fain le voifinage de cet atelier, puisqu'on n'y réduiroit plus en vapeurs, toutes les années, des milliers d'acide nitreux concentré.

(4) On fait que la méthode de M. Tillet eft prefque généralement fuivie en France.

Quoiqu'on ait beaucoup écrit fur les effais, il n'y a cependant encore rien de précis fur cet objet, ni fur la coupellation; c'est ce qui m'a déterminé à fuivre ce travail : il fera connoître que de toutes les substances métalliques, il n'y a que le cuivre, l'or & l'argent qui puiffent s'introduire dans la coupelle par le moyen du plomb ou du bismuth, que toutes les autres fubstances métalliques font rejetées fur fes bords fous forme de fcories diverfement colorées.

Comme, en fait d'effai, il eft important d'effacer jufqu'à la trace de l'erreur, je fais connoître que l'or de départ retient toujours de l'argent (a), & j'indique plufieurs moyens pour obtenir de l'or très-pur.

Je termine cet Ouvrage en prouvant que le plomb ne contient point d'or, comme voudroient l'infinuer quelques Savans modernes.

(a) Ce fait n'auroit point été nié en 1763 par des Savans que l'Administration avoit chargés de faire des expériences propres à rendre les effais uniformes, s'ils en euffent appelé à la vérification du titre de l'or par le moyen de l'eau régale.

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