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Un lézard de cette espèce, de moyenne — grandeur, que j'apportai d'Agter Bruntjes- 1776. hoogte, avec ses deux petits, avoit le corps Avril long de deux pieds, et la queue de trois. Je l'attrapai par le cou, ensorte qu'il ne pût me mordre, et voyant qu'il falloit employer toute ma force pour le retenir, je pris une grosse aiguille dont je lui fis plusieurs piqûres au cœur et dans toutes les parties du crâne qui sont en contact avec le cerveau. Toutes ces piqûres remplirent mal mon objet, qui étoit de le tuer de la mort la plus prompte et la moins douloureuse, sans le déchirer ni le mutiler; le lézard paroissoit avoir encore assez de vie pour s'enfuir. Mon hôte alors lui serra plusieurs fois le corps avec violence, et lui ayant lié tous les pieds ensemble, il le pendit par le cou à un nœud coulant qu'il serra de toute sa force. Après 48 heures, l'animal avoit trouvé moyen de se dégager du lacet. Nous le retrouvâmes près de la ferme; mais enfin il paroissoit presqu'entièrement épuisé. Nous lui atta

carinatâ, zonis 16 seu 18, albis, totidemque nigris, alternantibus, annulatâ apice nigra. Corpore subsquamoso supernè ex nigro viridique fusco, subtùs albido, fasciis 16-18, nigris anomalis notato. Harum octo irciter juguli, 9 autem pectoris abdominisque regiones occupant ».

châmes de nouveau les pieds, de manière 1776. qu'il ne pût de ses ongles aigus et longs Avril (il en avoit cinq à chaque pied), endom

mager les serpens et autres animaux que je conservois dans l'eau-de-vie. Je le mis ainsi garrotté dans le baril, et le tins longtems au-dessous de la surface. Il auroit dû " ce me semble, être à l'instant étouffé par la vapeur enivrante de l'eau-de-vie; un quart d'heure après il vivoit et s'agitoit encore.

Il me parut, d'après mes remarques, que ce lézard est amphibie, qu'il aime l'eau autant que la terre; et qu'il devient encore plus grand que n'étoit celui dont je viens de parler. Il est aussi extrêmement vivace, et ces deux qualités, de ne pouvoir être que très-difficilement tué ou noyé, semblent annoncer qu'il a un important office à remplir dans le grand systême de la nature. Les gens du pays croient, peut-être avec raison, qu'on pourroit aisément apprivoiser cet animal, qui naturellement n'est ni mal-faisant ni venimeux ( 1 ).

(1) Je viens de recevoir tout récemment du Cap le fœtus d'un quadrupède fort singulier, conservé dans l'esprit de vin. J'en vais donner une description abrégée, qui pourra servir de fondement à des recherches plus exactes sur cet animal.

Le gris foncé paroît être sa couleur naturelle. Il a
Nous

Nous arrivâmes le soir à Nana-rivier. Il résidoit en cet endroit une veuve, dont le 1776. mari, il y avoit quelques années, avoit été Avril. décapité par ses propres esclaves. Son fils âgé de treize ou quatorze ans, fut témoin de cette terrible catastrophe; une fuite prompte, et le stratagême qu'on va lire, le sauvèrent du même sort. Comme les bâtimens de la ferme ne consistoient qu'en deux maisons situées en plaine découverte et nue, à l'exception de quelques buissons qui bordoient une petite rivière à quelques pas des maisons, il n'y avoit pour l'enfant qu'un moyen, aussi pénible que singulier, de leur échapper; s'étoit celui qu'il prit en s'en

sept pouces et demi de long, du bout du museau à l'anus. Le corps, la queue et les pieds ressemblent à ceux d'un petit chien; mais la tête est totalement différente.

Le nez' est rond et petit, long de huit lignes, et s'avance en droite ligne, ensorte qu'il forme un angle droit avec le front, qui est vertical et arrondi presque comme celui d'un homme. Il est en cela fort différent des viverra oụ belettes au nez pointu. La bouche est tellement saillante, que la lèvre supérieure forme un angle aigu avec le nez, et cependant la lèvre et la mâchoire inférieures sont encore plus avancées. La langue est large et arrondie à l'extrémité.

Le capitaine Adolphe Burtz, qui a enrichi le cabinet de l'Académie royale des Sciences de plusieurs curiosités des Indes orientales, m'a fait présent de Tome III,

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fonçant dans l'eau jusqu'au menton, ayant 1776. soin de se cacher le visage derrière quelAvril. ques branches des arbrisseaux. Comme il

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avoit promptement disparu, les esclaves crurent que pour se soustraire au coup inévitable de leur hache, il avoit mieux aimé se précipiter de lui-même dans la rivière; cependant, pour s'assurer s'il étoit noyé ou non, ils sondèrent le ruisseau avec des branches d'arbres. Par un heureux hasard, la place où l'enfant étoit assis, fut la seule qu'ils oublièrent de sonder, peut-être à cause que l'eau étoit en cet endroit moins profonde, et le courant plus fort. Quoiqu'il en soit, l'enfant ne quitta sa cachette qu'à la nuit noire; alors il se réfugia dans une ferme voisine. Les misérables avoient aussi résolu de tuer la mère, qui ce jour-là même devoit revenir du Cap. Mais elle fut retardée sur la route par quelques heureux accidens, et son fils put lui donner avis de ce qui venoit d'arriver, avant qu'elle rentrât dans sa maison.

eet animal qu'il avoit acheté d'un paysan du Cap. Cet homme disoit l'avoir trouvé aux environs de Saldanhabay, er en avoir donné le nom au capitaine Burtz; mais celui-ci perdit le papier sur lequel Pavoit écrit. Ainsi cet animal est vraisemblablement une production régulière et ordinaire de la nature, er non pas un monstre.

C'eût été affliger gratuitement nos hôtes, et reconnoître mal leurs honnêtetés, que 1776. de les questionner sur les particularités de Avril. cette aventure, dans la seule vue de satisfaire ma curiosité. Je me contentai de la consigner dans mes notes telle que M. Immelman, et plusieurs autres personnes me l'ont racontée. Je ne pus conséquemment savoir si le fermier décapité avoit, par quelques excès de sévérité, excité ses esclaves à cette vengeance, ou s'ils avoient simplement agi d'après la persuasion que les crimes et les voies de brigandage par lesquelles ils avoient été faits esclaves, étoient pour le moins aussi légitimes, lorsqu'il s'agissoit de recouvrer leur liberté, et de s'affranchir de leurs tyrans. J'ajouterai à ce que j'ai déja dit sur ce sujet dans les volumes précédens, quelques réflexions que cette aventure fit naître dans mon esprit.

Quelle que soit la raison qui porta ces misérables au meurtre de leur maître, je suis bien convaincu qu'elle a son origine dans l'essence même et la nature du trafic des esclaves, aussi dangereux que honteux par tous les pays du monde; trafic qui rend toujours bizarres dans leur conduite, et par fois horriblement cruels, et les maîtres, et les esclaves, et les Chrétiens dans leurs

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