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Dans le canton de Sneeuw-berg, le Landrost avoit donné à un fermier le titre de 1776. veld corporal (caporal des campagnes ). Janv. Son office étoit de commander dans ces petites guerres, et d'ordonner alternativement à tous habitans de la contrée, divisés en différentes compagnies, de marcher pour la défense du pays contre ses habitans originaires. Le gouvernement n'est à la vérité complice des cruautés exercées par ses sujets, qu'en négligeant d'en prendre connoissance; mais c'est aussi de sa part un excès de négligence, d'avoir laissé une nation entière à la merci de chaque paysan individuellement, et même de quiconque juge à propos d'envahir les terres des sauvages. L'on devoit naturellement attendre qu'excités par l'intérêt, animés par un esprit de vindication, et n'étant réprimés par aucun frein, les habitans usurpateurs auroient bientôt oublié la prudence et l'humanité. Je n'accuse pourtant pas tous les Colons de participer à ces cruautés, et à tant d'autres qui se commettent trop fréquemment sur ce coin du globe. Tandis que quelques-uns s'enrichissent, à force d'inhumanité, il en est qui gémissent, qui tremblent que tous ces crimes n'attirent à la fin la vengeance

1776.

les anime à le poursuivre, et chasse le misérable sauvage avec plus de fureur et Janv. d'acharnement que si s'étoit un loup ou quelqu'autre bête féroce. Si les habitans ap prennent que les Boshis sont en plaine, ils vont à cheval les attaquer. Quoique les sauvages soient en très-grand nombre, quelques paysans suffisent pour les mettre en déroute; Car ceux-ci ont soin de se tenir toujours à la distance de cent ou cent cinquante pas, Ils ont dans leurs gros mousquets une forte charge; ils descendent de cheval, posent leur arme sur son appui comme il est d'usage, pour pouvoir ajuster avec plus de certitude; et l'on m'a assuré que d'une seule balle ils perçoient quelquefois six, sept et huit hommes; ce qui est d'autant plus probable, que les Boshis, lorsqu'ils se voient attaqués, se réunissent en un peloton, et se tiennent extrêmement serrés. Ils peuvent, il est vrai, lancer une flêche à deux cent pas; mais comme elle décrit necessairement dans l'air une ligne courbe, ils ne sont jamais sûrs de leur coup; d'ailleurs, si par hasard elle tomboit sur un des fermiers, elle auroit perdu sa force à cette distance; à peine pourroit-elle percer leurs chapeaux ou les gros habits de fil ou de laine dont ils sont couverts.

Dans le canton de Sneeuw-berg, le Lan drost avoit donné à un fermier le titre de 1776. veld corporal (caporal des campagnes ). Jav., Son office étoit de commander dans ces petites guerres, et d'ordonner alternativement à tous habitans de la contrée, divisés en différentes compagnies, de marcher pour la défense du pays contre ses habitans originaires. Le gouvernement n'est à la vérité complice des cruautés exercées par ses sujets, qu'en négligeant d'en prendre connoissance; mais c'est aussi de sa part un excès de négligence, d'avoir laissé une nation entière à la merci de chaque paysan individuellement, et même de quiconque juge à propos d'envahir les terres des sauvages. L'on devoit naturellement attendre qu'excités par l'intérêt, animés par un esprit de vindication, et n'étant réprimés par aucun frein, les habitans usurpateurs auroient bientôt oublié la prudence et l'humanité. Je n'accuse pourtant pas tous les Colons de participer à ces cruautés, et à tant d'autres qui se commettent trop fréquemment sur ce coin du globe. Tandis que quelques-uns s'enrichissent, à force d'inhumanité, il en est qui gémissent, qui tremblent que tous ces crimes n'attirent à la fin la vengeance

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céleste sur la tête de leurs enfans, et la 1776, malédiction sur leurs possessions.

Janv. On n'a fait jusqu'à présent aucune tenta

tive pour civiliser les Boshis nés dans les bois, pour les rendre meilleurs et même plus utiles aux Colons; mais si l'on peut former quelque conjecture, d'après le caractère de ceux qui se sont loués au service des Chrétiens, ou de ceux qui, après avoir été faits esclaves, ne se sont point évadés, ce projet ne me semble nullement impossible. Il est vrai que l'opinion désavantageuse qu'on a conçue et qu'on entretient de cette race d'hommes, la conduite qu'on a tenue jusqu'à présent envers eux, doivent nécessairement mettre des obstacles au succès d'une entreprise de cette nature. Si ce qu'on m'a assuré est vrai, les Hottentots primitifs, qui résidoient originairement à Agter-bruntjes-hoogte, vivoient paisiblement avec les premiers Chrétiens qui vinrent s'y établir. Ils leur rendoient de bons offices. Un de leurs agneaux s'étoit-il égaré; les Hottentots alloient, souvent sans en être priés, le chercher, et le leur rapportoient. Mais à la fin ils se sont aussi retirés, et ont pris le parti d'aller vivre cachés et errans, comme les Boshis, dans des cavernes et dans des recoins du pays. Cependant, com

me ils sont en petit nombre, ils ne sont ni aussi hardis ni aussi entreprenans que les 1776. vrais Boshis.La couleur de leur peau tire Janv. plus sur le jaune aussi sont-ils regardés comme une nation différente des autres; et on les appelle Chinois ou Hottentots-Chinois. La principale résidence de ces fugitifs est sur le bord des deux Vish-rivier ; j'en ai vu plusieurs qui étoient tous de bons et fidelles esclaves. Tandis que nous rôdions, comme eux, par monts et par vaux, dans le canton qu'ils habitent, nous vîmes en différentes places les traces de leurs feux, et plusieurs autres marques évidentes qu'ils n'étoient pas fort loin de nous. Il ne leur eût pas été difficile, ce me semble, de nous harceler et de nous faire beaucoup de mal. Je ne sais si ce fut la stupidité ou la douceur naturelle de leur caractère, ou la crainte, qui les retint, mais certainement ils ne cherchèrent nullement à nous nuire. Si la douceur fait le fond du caractère de ces hommes, et qu'ils ne soient pas plus mal-faisans envers les autres qu'ils ne l'ont été envers nous, leur conduite est insensée, et sous ce rapport, on peut dire avec justice, qu'ils commettent contre eux-mêmes un crime inexcusable en souffrant sans résistance que les Colons les

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