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dans la Cour de la Reine, & qui eft tombée malade de chagrin, de voir deux Dames, qu'elle avoit brouillées, se réconcilier de bonne foi.

Vous allez entendre des cris perçans, continua le Démon. La Mort vient d'entrer dans ce bel Hôtel à main gauche. Il va s'y paffer la plus trifte fcène que l'on puiffe voir fur le théâtre du Monde. Arrêtez vos yeux fur ce déplorable spectacle. Effectivement, dit Don Cléofas, j'aperçois une Dame qui s'arrache les cheveux, & fe débat entre les bras de fes femmes. Pourquoi paroîtelle fi affligée? Regardez dans l'apartement qui eft vis-à-vis de celui-là, répondit le Diable, vous en découvrirez la caufe. Remarquez un homme étendu fur ce lit magnifique c'eft fon mari qui expire. Elle en eft inconfolable. Leur Hiftoire eft touchante, & mériteroit d'être écrite. Il me prend envie de vous la conter.

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Vous me ferez plaifir, répliqua Léandro; le pitoyable ne m'attendrit pas moins, que le ridicule me réjouit. Elle eft un peu longue, reprit Afmodée; mais elle est trop intéreffante pour vous ennuyer. D'ailleurs, je vous l'avouerai, tout Démon que je fuis, je

me

me laffe de fuivre la Mort, laiffons-la chercher de nouvelles victimes. Je le veux bien, dit Zambulo. Je fuis plus curieux d'entendre l'Hiftoire dont vous me faites fète, que de voir périr tous les humains l'un après l'autre. Alors le Boiteux en commença le recit dans ces termes, après avoir tranfporté l'Ecolier fur une des plus hautes maifons de la ruë d'Alcala.

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CHAPITRE II.

De la force de l'Amitié.

HISTOIRE.

UN jeune Cavalier de Toléde

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fuivi de fon Valet - de - chambre s'éloignoit à grandes journées du lieu de fa naiffance, pour éviter les fuites d'une tragique avanture. Il étoit à deux petites lieues de la Ville de Valence lorfqu'à l'entrée d'un bois, il rencontra une Dame qui defcendoit d'un caroffe avec précipitation; aucun voile ne couvroit fon vifage, qui étoit d'une éclatante beauté; & cette charmante per

fonne

fonne paroiffoit fi troublée, que le Cavalier jugeant qu'elle avoit befoin de fecours 2 ne manqua pas de lui offrir celui de fa valeur.

Généreux Inconnu, lui dit la Dame, je ne refuferai point l'offre que vous me faites. Il femble que le Ciel vous aît envoyé ici pour détourner le malheur

je crains. Deux Cavaliers fe font donné rendez-vous dans ce bois; je viens de les y voir entrer tout-à-l'heure. Ils vont fe battre. Suivez-moi, s'il vous plaît; venez m'aider à les féparer. En achevant ces mots, elle s'avança dans le bois; & le Tolédan, après avoir laiffé fon cheval à fon Valet, fe hâte de la joindre.

Á peine eurent-ils fait cent pas, qu'ils entendirent un bruit d'épée, & bien-tôt ils découvrirent entre les Arbres, deux hommes qui fe battoient avec fureur. Le Tolédan courut à eux pour les féparer, & en étant venu à bout par fes priéres & par fes efforts, il leur demanda le fujet de leur différend.

Brave Inconnu, lui dit un des deux Cavaliers, je m'apelle Don Fadrique de Mendoce, & mon ennemi se nomme Don Alvaro Ponce. Nous aimons Dona Théodora, cette Dame que vous ac

com

compagnez. Elle a toujours fait peu d'attention à nos foins; & quelques galanteries que nous ayons pu imaginer pour lui plaire, la cruelle ne nous en a pas mieux traitez. Pour moi, j'avois deffein de continuer à la fervir, malgré fon indifférence; mais mon Rival, au lieu de prendre le même parti, s'eft avifé de me faire un apel.

Il eft vrai, interrompit Don Alvar que j'ai jugé à propos d'en ufer ainfi. Je crois que fi je n'avois point de Rival, Dona Theodora pourroit m'écouter. Je veux donc tâcher d'ôter la vie à Don Fadrique, pour me défaire d'un homme qui s'opofe à mon bonheur.

Seigneur Cavalier, dit alors le Tolédan je n'aprouve point votre combat. Il offenfe Dona Théodora. On fçaura bien-tôt dans le Royaume de Valence, que vous vous ferez battus pour elle. L'honneur de votre Dame vous doit être plus cher que votre repos & que vos vies. D'ailleurs, quel fruit le Vainqueur peut-il attendre de fa victoire? Après avoir expofé la réputation de fa Maîtreffe, penfe t'il qu'elle le verra d'un œil plus favorable? Quel aveuglement! Croyez-moi, faites plûtôt fur

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vous, l'un & l'autre, un effort plus dignes des noms qui vous portez. Rendez-vous maîtres de vos tranfports furieux; & par un ferment inviolable engagez-vous tous deux à foufcrire à l'accommodement que j'ai à vous propofer. Votre querelle peut fe terminer fans qu'il en coûte de fang.

Eh! de quelle maniere, s'écria Don Alvar? Il faut que cette Dame fe déclare, repliqua le Tolédan, qu'elle fasfe choix de Don Fadrique, ou de vous, & que l'Amant facrifié, loin de s'armer contre fon Rival, lui faffe le champ libre. J'y confens, dit Don Alvar, & j'en jure par tout ce qu'il y a de plus facré. Que Dona Théodora fe détermine, qu'elle me préfére fi elle veut mon Rival; cette préférence me fera moins infuportable, que l'affreufe incertitude où je fuis. Et moi, dit à fon tour Don Fadrique j'en attefte le Ciel? fi ce divin objet que j'adore ne prononce point en ma faveur, je vais m'éloigner de fes charmes; & fi je ne puis les oublier, du moins je ne les verrai plus.

Alors le Tolédan fe tournant vers Dona Théodora: Madame, lui dit-il c'est à vous de parler. Vous pouvez, d'un

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