Imágenes de páginas
PDF
EPUB

C. M A-France ? La chofe n'eft pas vraisemblable.

ROT.

[ocr errors]

De Geneve il alla donc à Turin; où il fixa fa demeure, & où il vêcut fous la protection de ceux qui gouvernoient le Piémont, que la France poffedoit, depuis que François I. en avoit dépouillé Charles III. Duc de Savoye, fur-nommé le Bon: mais leurs libéralitez ne furent pas grandes envers lui, puifqu'il y mourut pauvre, comme il avoit souvent été jufques-là.

49. ans,

Il mourut en 1544. âgé de Theodore de Beze, qui veut qu'il eur alors 60. ans, n'a pas pris garde aux dattes qu'il nous fournit lui-même dans fes Ouvrages, & par lefquelles il paroît incontestablement qu'il naquit vers l'an 1495.

Lyon Jamet fon ami, fit mettre cette Epitaphe fur fon tombeau dans l'Eglife de S. Jean de Turin, où elle n'est plus à present.

Jcy devant au giron de fa Mere
Gift des François le Virgile & l'Ho.

mere ,

Cy eft couché & repose à l'envers

Le nompareil des mieux difans en vers.
Cy gift celui que peu de terre cœuvre,
Qui toute France enrichit de fon œuvre.
Cy dort un mort, qui toûjours vif fera,
Tant que la France en François parlera.
Brief gift, repofe & dort en ce lieu-cy
Clement Marot de Cabars en Quercy.

Marot a été le Prince des Poëtes dé

[ocr errors]

fon temps; fon genie étoit fi heureux, que fans le fecours des BellesLettres, & fans la connoiffance des Langues Gréque & Latine, il a entrepris avec fuccès de purifier la Langue Françoife, de la débrouiller, de la rendre traitable & intelligible, & de lui donner de l'ordre & de la methode. La fineffe & l'enjouement de fon efprit paroît dans la plupart de fes Ouvrages. Il a une grace inimitable à tout ce qu'il dit, & fes pensées les plus communes font embellies par le tour qu'il leur donne. Son langage, qui a vieilli, n'empêche pas que fes Poëfies ne foient toujours à la mode; & nos meilleurs Poëtes s'en fervent encore, lorfqu'ils veulent s'exprimer d'une maniere aifée &

naïve.

C. MA

ROT.

C. MAROT.

Il est vrai que la modestie & la retenuë ne font pas toûjours bien obfervées dans fes Ouvrages, & que l'on peut même dire que les talens de fon efprit, fon fel, le tour agréable, vif, aifé, ingénieux de fa Mufe, ne fe font jamais mieux fentir que lorfqu'il traite des fujets libres; mais C'étoit un défaut affez commun aux Poëtes de fon temps, que la groffiereté de leur fiécle leur pardonnoit fans peine, & dans lequel ils font tombez encore beaucoup plus que lui, puifque malgré les ordures dont fes vers font remplis, il fe faifoit un mérite de fa retenuë, lorfqu'il difoit dans fon Epître 43.

Si Dieu ne l'avoit défendu,
Et je fuffe en mon advertin
Je donrois quinze à Laretin,
Et figagnerois la partie.

Il eft vrai auffi que toutes fes pieces ne font pas d'une égale beauté ; il y en a de fades, de plates, d'obfcures, & où régne un veritable galimatias. Mais qui eft le Poëte qui réüffif Le toûjours également ? Il faut s'arrê

ter à ce qu'il y a de bon, & laiffer le C. MA

mauvais.

Au refte Marot étoit aimé des plus grands Princes & des Princeffes les plus diftinguées de l'Europe, comme de François I. de Charles-Quint, de Renée de France, Ducheffe de Ferrare, de Marguerite, Reine de Navarre, &c. Voici des vers de cette Reine qui marquent bien l'eftime qu'elle faifoit de Marot. Elle y répond pour Helene de Tournon à une Epigramme de Marot, où il fe plaignoit de fes créanciers.

Si ceux à qui devez, comme vous dites
Vous connoiffoient comme je vous connois;
Quitte feriez des debtes que vous fiftes
Le temps paffe, tant grandes que petites,
En leur payant un dizain toutefois,
Tel que le vôtre, qui vaut mieux mille
fois

Que l'argent dû par vous en confcience.
Car eftimer on peut l'argent au poids :
Mais on ne peut (& j'en donne ma voix)
Affez prifer votre belle fcience.

Le prétendu Chevalier Gordon de
Percel qui nous a donné la derniere

ROT.

C. M A-édition des Oeuvres de Marot, veut

ROT.

qu'il ait eu pour Maîtreffes Diane de Poitiers, & enfuite Marguerite, Du-cheffe d'Alençon; & que la plupart de fes pieces amoureufes leur foient adreffées quoique fous d'autres noms; mais c'eft une imagination frivole & fans fondement, & que les raifons qu'en apporte cet Auteur ne prou

vent en aucune maniere.

Catalogue de fes Ouvrages.

1. Le Romant de la Rofe, revû & corrige, outre les éditions précedentes. Paris. Galliot du Pré 1527. in-fol. en caracteres Gothiques. It. Paris chez le même 1529. in-8°. en lettres rondes. J'ai déja dit que Marot étant en prifon à Chartres s'y occupa à revoir le Roman de la Rofe, dont il changea en plufieurs endroits le langage, pour le rendre plus intelligible; comme d'autres l'avoient déja fait en differens temps avant lui; & ce fut fuivant fes corrections, qu'il parut dans les deux éditions, que je viens de rapporter.

2. Il revit enfuite, par ordre de François I. les Oeuvres de Villon, Poëte célebre, dont il changea un peu le langage, pour le rendre plus

« AnteriorContinuar »