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AN. 1457.

XXXII. Eneas Sylvius répond aux

lemands.

guerre fainte. 2. Que le concordat étoit violé dans les élections des évêques & des abbez, & dans les réferves des bénéfices. Le pape chargea Æneas Sylvius de répondre à l'empereur fur ces plaintes, ce qu'il fit. Sa lettre eft du trente-uniéme Août.

Sur le premier article il dit, que le fouverain pontife n'a rien exigé ni demandé en fon nom, que les plaintes des Al- annates font dues d'un droit fort ancien, qu'il étoit vrai que le pape pape n'avoit pas refufé l'argent qui lui avoit été donné pour les frais de la guerre contre les Turcs, mais qu'il ne l'avoit point mis dans fes coffres, qu'il ne l'avoit pas emploïé à ses plaifirs, que l'ufage qu'il en avoit fait, étoit pour la défense de la foi contre ceux qui la vouloient ruiner : ce qui demandoit des dépenfes exceffives, foit pour fournir à Scanderberg les fecours néceffaires, foit pour l'entretien des nonces & des légats en differens païs, foit pour aider les Grecs & ceux d'Afie à fe défendre contre les invasions de Mahomet; enfin il reprefente que cette dépense n'a point été inutile; que le faint pere peut fe glorifier en Jefus-Chrift d'avoir beaucoup affoibli la puiffance du Turc, malgré la lâcheté de prefque tous les princes Chrétiens, & rendu fes efforts inutiles dans la Hongrie, lorsque la religion Chrétienne étoit menacée d'une ruine entiere; que fans les vaiffeaux qu'il avoit envoïez à Rhodes, à Cypre, à Mitylene & dans d'autres ifles, les Chrétiens n'auroient pû resister aux infideles; & ce qui eft à remarquer, que fon légat par fa bonne conduite, & par la force de fes armes, les avoit non-feulement défenduës, mais encore avoit converti un grand nombre d'habitans qui faifoient auparavant

epift. 371.

22. cap. 14. in

pofeffion du Mahometifme; que l'Albanie eût été AN. 1457. perdue fans l'argent qu'on avoit envoïé à Scanderberg. Voilà, dit Enée, l'ufage que le pape a fait de En. Sylvius. ces grandes fommes qui font le fujet des plaintes des s. Antonin. tit. Allemands. Convenoit-il, de laiffer le Turc fouler aux pieds le nom Chrétien; & le faint pere n'y pou- Bofius, tom. 2. vant fuffire feul, tous les autres n'étoient-ils pas lib. 7. obligez d'y contribuer & de fournir à la défense de de la caufe commune ?

fine.

Quant au fecond chef de plaintes, que le pape violoit le concordat dans les élections des évêques, Enée répond aux Allemands; que le fouverain pontife n'étoit pas obligé par ce concordat de confirmer toutes fortes d'élections, mais celles-là feules qui avoient été faites canoniquement; qu'il n'en avoit refusé aucune qui fût canonique; & que s'il y avoit eu quelques évêques de recufez, c'étoit, ou parce qu'ils n'avoient pas été élûs dans les formes, ou parce qu'ils n'étoient pas des fujets qui convinffent aux églifes aufquelles on les avoit nommez. Que pout ce qui regarde les réferves & les provifions des autres bénefices, le pape ne fçait pas qu'il s'y foit rien paffé contre le concordat; que quoique fon autorité fût très-libre, toutefois à caufe de fon amour pour la paix, de l'amitié qu'il porte à l'empereur & à la nation Allemande, il ne fouffriroit jamais qu'on violât aucun article du concordat; que quand même il il y auroit quelque chofe à reprendre en la maniere dont s'étoit conduit le faint fiege, il ne convenoit ni aux évêques, ni à toute autre perfonne de vouloir ufer d'autorité préferablement au chef de l'églife, ou de mépriser ses ordres à la destruction de

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XXXIII. Ecrits d'Encas

Sylvius pour la

défenfe des

Liége.

la hierarchie ecclefiaftique, à la confufion du corps myftique de Jesus-Christ, & à la perte des ames; qu'il falloit plûtôt avoir recours au faint fiége, lui expofer fes griefs, le prier d'appliquer le remede au mal, s'il y en avoit, & que l'églife Romaine n'auroit pas manqué de déferer aux defirs de ses enfans pour ce qui regarde leur falut.

L'on trouve plufieurs lettres du même pape & d'Æneas Sylvius à differentes perfonnes fur le même droits du faint fujet ; & particulierement de ce dernier à Martin Meyer jurifconfulte & chancelier de l'archevêque de Maience. Ces lettres rapportant en termes exprès les conditions du concordat, font voir qu'on accufoit fans raison le pape de l'avoir violé: ce qu'Enée expofe encore plus amplement dans un traité qu'il adressa l'année suivante au même Meyer, touchant les mœurs de la nation Allemande, & l'autorité du faint fiége, de fes bienfaits envers les princes tant ecclefiaftiques que feculiers, & de fa puiffance. Il câche d'y réfuter les objections que les Allemands tiroient des conciles de Conftance & de Bafle. Il y parle d'une pragmatique-fanction établie par quelques princes prélats d'Allemagne contre l'intention de l'empereur, à ce qu'il dit, afin d'abaisser l'autorité du faint fiége. Il reproche à la nation d'avoir resolu fait aux Alle de ne point porter d'argent à Rome, d'en exclure les appellations, d'avoir décidé qu'il falloit renvoier les élections des prélats aux métropolitains, de réserver les collations des bénéfices aux ordinaires, & de défendre l'éxaction des annates. Il s'applique à montrer que c'est une ingratitude énorme de la fille envers la mere, ce qui cause beaucoup de dommage

XXXIV.

Reproches qu'il

mands.

non

AN. 1457.

Fxt. tom. ja

non-feulement au faint fiége, mais à toute la réligion chrétienne, & ce qui ôte la plenitude de puiffance au fouverain pontife qu'on veut rendre pauvre & fans nulle autorité. Les Allemands ne manquerent pas de repliquer. On trouve une réponse d'un certain Jacques de Wimphile pour la défenfe de la na- rerum German. tion. Jean évêque de Wirtzbourg fut un des plus oppofez au pape, il contraignit même les nonces à epift. 387 fe fauver & à prendre la fuite, comme le fouverain pontife s'en plaignit en écrivant à Thierry archevêque de Maïence qui s'interreffoit beaucoup pour cet évêque.

edit. Freh.

En. Sylvius,

Quelque zele qu'eût Æneas Sylvius à faire l'apologie du faint pere, on ne peut nier cependant qu'il ne fe gliffât de grands abus dans l'emploi de l'argent destiné à la guerre contre les Turcs. Le roi de Caf tille en réserva la moitié dont il fe fervit dans la guerre contre ceux de Grenade, qu'il contraignit dans cette annéee à lui payer un Tribut à des conditions honteuses.Chriftiern roi deDannemark en fit autant, & leurra le nonce Marin, fous prétexte d'emploier les levées contre les fchifmatiques qui étoient aux confins de ses roïaumes. S. Antonin reproche auffi à S. Antonin. tit. la France d'avoir fait la même chose dans le befoin 22. cap. 18.§.1. où se trouvoit Charles VII. de continuer la guerre contre les Anglois : ce qui n'est pas vraisemblable, puifque ni Meyer qui n'étoit point du tout favorable à la nation Françoise, ni Æneas Sylvius lui-même qui ne lui vouloit pas beaucoup de bien à cause des affaires de Naples, n'ont rien dit de cette accufation. Tout ce qu'on trouve dans ce dernier auteur le cardinal d'Avignon équipa vingt -quaTome XXIII.

eft, que

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Comment. Pii

11. lib. 4 in

autre galeres de l'argent levé fur la France; mais que Jean fils de René roi de Sicile emploïa ces galeres contre Ferdinand roi de Naples. Un autre auteur ajoûte que ce cardinal voulant exiger en France les apud Meyer. lib. décimes pour la guerre fainte, fuivant l'ancienne valeur des bénefices, & non felon la taxe du tems, le roi ne le lui voulut jamais permettre.

princip.
Aut. anonym.

$16.

Le

pape tra

lier l'empereur

epist. 282.

2320

XXXV. Cependant on continuoit toûjours les levées de vaille à réconci- ces décimes; & parce qu'il étoit de la derniere im& le roi de Hon-portance, pour défendre la Hongrie contre les Turcs, gric. d'appaifer les anciennes querelles qui sembloient se renouveller entre l'empereur Frederic & Ladiflas roi Eneas Sylvius, de Hongrie & de Bohême; le pape se flattant qu'on pourroit aisément vaincre les Turcs, fi ces deux princes étoient unis & joignoient leurs armées, en Ld. ep. 229.& écrivit exprès au cardinal de faint Ange fon légat en Allemagne, afin de s'unir avec Louis de Bavierre, & de l'engager à être le médiateur de cette réconciliation ; & le chargea en même tems de donner de la part de fa fainteté la bénediction au mariage que le même Ladislas devoit contracter à Prague avec Magdelaine fille de France, & pour lequel ce roi avoit déja envoïé une célébre ambaffade en France, afin d'y aller prendre la princeffe fon épouse. Le roi Charles VII. reçut les ambaffadeurs de Ladislas à Tours, & leur fit des honneurs extraordinaires. Le jeune prince de fon côté, âgé feulement de dix-huit ans, & l'un des plus accomplis, qu'il y eut alors en Europe, partit, de Vienne & arriva à Prague pour y faire les préparatifs de fes nôces, qui toutefois ne furent pas accomplies.

XXXVI.

Le roi de Hon

Il étoit fur le point de faire fon entrée dans cette

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