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L.

defir de rentrer dans la communion de l'église, il extermina les Thaborites par cet artifice. Leur divi- AN. 1458. fion avec les Orphelins avoit ceffé par la defaite de 11 extermine leur armée mais la réunion de ces deux fectes n'a- les Thaborites. voit point empêché que les Huffites ne se séparassent les uns des autres une feconde fois. Ceux qui n'avoient pas voulu fe retrancher à la communion fous les deux efpeces, fe trouvant les plus forts, s'étoient faifis par adreffe de la ville de Thabor, où ils profeffoient en toute liberté les quarante-cinq articles de leur créance, lorfque Pogebrac defefperant de les réduire, s'en défit par ce moyen.

Il gagna Roquefane, qui feignant d'être encore de leur parti, leur perfuada de fe foumettre fans appel à ce qui feroit réfolu dans l'affemblée genérale des Huffites, & d'y envoyer leurs députez. Ils y furent condamnez, & fur le refus qu'ils firent de fe foumettre, Pogebrac marcha contre eux avec toutes fes forces. Il les affiegea dans Thabor,où ils se défendirent avec beaucoup de valeur & d'opiniâtreté. Mais après un an de résistance, ils furent emportez d'affaut, & tuez avec tant d'exactitude, qu'il n'en refta pas un feul. Pogebrac ne voulut pas même conferver la ville de Thabor qu'ils avoient fi régulierement fortifiée, de peur qu'il ne reftât quelques marques de rebellion dans un royaume où il prétendoit jouir déformais d'un profond repos; il fit mettre le feu, & ordonna qu'on démolit les remparts jufqu'aux fon

demens.

Alphonfe roi de Portugal s'embarqua cette année avec fon frere, dom Fernand de Villo fon oncle, dom Henrique grand-maître de l'ordre de Chrift, Eiij

LI.
Il détruit la

la ville de Tha

bor & y met le

feu.

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& l'élite de la nobleffe de fon roïaume: il fit voile en AN. 1458. Afrique, & alla moüiller devant Alacer-Seguer ou Alcaçar à fix lieux de Ceuta. Il mit pied à terre nonobftant la vigoureuse résistance des Maures qui bordoient le rivage. Il attaqua auffi-tôt la place, & l'emporta dès le premier affaut. Le mercredi dix-huitiéme Octobre, fête de faint Luc, il y fit fon entrée & y aiant laiffé pour gouverneur Edouard de Menezès fils naturel de D. Pedre de Menezès comte de Valence, il alla à Ceuta. A peine fut-il parti que le roi de Fez investit Alacer-Seguer avec trente mille chevaux & une très-nombreuse infanterie; il fit battre en même tems la place avec plus de cinquante piéces d'artillerie, dont il y en avoit qui portoient jufqu'à quatre cent livres de bale. Les affiégez se défendirent avec une valeur extraordinaire, les vivres leur aïant manqué, ils tuerent leurs chevaux pour leur fervir de nourriture à la réserve de trente, avec lefquels trente Portugais commandez par D. Henrique de Menezès fils du gouverneur, firent une fortie, nettoïerent la tranchée, encloüerent le canon,& firent des actions dignes d'une éternelle mémoire. Martin de Tavora fauva la vie à Gonfalo Vas-Continho fon plus grand ennemi, fans vouloir toutefois fe réconcilier avec lui. Les Maures après avoir continué le fiége tout le refte de l'année, voïant que les Portugais ne marquoient aucune envie de capituler, prirent le parti de se retirer après avoir perdu plus de cent mille hommes, & abandonnerent aux affiégez une partie de leurs canons & de leur bagage.

Mariana hift. Hifp. lib. 22.

LII.

L'autre Alphonfe roi d'Arragon & de Naples fut ragon afliege encore plus malheureux devant Genes, que n'avoit

Alphonse d'Ar

AN. 1458.

Genes, & meurt

à Naples.

Naucler. vol.

Colinutio.

été le roi de Fez devant Alacer-Seguer. Il affiégea cette fuperbe ville par mer & par terre. Bernard de Villa-Major fon amiral s'étoit avancé jufqu'à PortoFino avec vingt navires & dix galeaffes. Il lui donna ordre de venir bloquer le port de Genes, pendant que Palerme Napolitain s'approchoit avec l'armée de terre. Il ferma fi bien les avenues de tous côtez, qu'il 3. gener. 49. réduifit la ville à la derniere extremité, & l'auroit infailliblement obligé de fe rendre, fi une fiévre ma- Blondus. ligne n'eût réduit Alphonse au tombeau le vingt- Summont. feptiéme de Juin 1458. lorfqu'il étoit encore à Na- Surita. ples. Ce prince fut vaillant, affez dévot, libéral & protecteur des gens de lettres. Il étoit sçavant, & entendoit affez bien la théologie. Il fit du bien à Barthelemi de Faccio qui a écrit l'histoire de fon tems, à George de Trebizonde, à Laurens Valle, & à Antoine Panorme Boulonnois, tous illuftres par leur profonde érudition. Il étoit âgé de foixante-fix ans lorsqu'il mourut; & dom Juan fon frere lui fucceda aux roiaumes d'Arragon & de Sicile, parce qu'Alphonfe n'avoit point d'enfans. Ce dom Juan étoit déja roi de Navarre.

Fazel.

LIV. Ferdinand fils

naturel d'Al

phonfe eft rai

Alphonfe avant fa mort avoit difpofé du roiaume de Naples en faveur de Ferdinand fon fils natu- de Naples. rel, auquel il recommanda trois chofes en mourant. La premiere, de chaffer les Arragonois & les Catalans, comme fort hais dans le païs, s'il vouloit regner en paix. La feconde, d'ôter les taxes & les impôts. La troifiéme, de conferver la paix avec l'églife, les communautez & les feigneurs d'Italie. Le pape Callixte qui avoit toûjours eu beaucoup d'averfion, quoiqu'en fecret, contre Alphonfe, n’osant le té

S. Antonin tit. 22. cap. 16.

§. I.

Comment, Pii

II. lib. 2.

Surita. lib. 16.

moigner ouvertement, parce qu'il craignoit fa puifAN.1458. fance, fit éclater auffi-tôt après fa mort fa haine contre Ferdinand. A peine fon pere eut-il les yeux fermez, qu'il confera tous les évêchez que le défunt lui avoit empêché de donner, & déclara le roïaume cap. 38. feq. de Naples vacant. En confequence il refufa l'investiture à Ferdinand, prétendant qu'Alphonfe étant décedé fans enfans légitimes, le roïaume de Naples comme fief du faint fiége, étoit dévolu à l'églife. Il défendit donc à Ferdinand de prendre la qualité de roi de Naples, fous peine d'excommunication, & avertit les princes & les villes fous les mêmes peines de ne lui point obéir. Il tâcha fecretement de faire révolter fes sujets contre lui, publiant par fes lettres qu'il étoit fils fuppofé d'Alphonfe, & non pas fon veritable enfant. Quelques hiftoriens ont avancé que le deffein du pape étoit de faire Borgia fils de fa fœur, roi de Naples, après l'avoir déja créé duc de Spolete, quoiqu'il fût adonné à beaucoup de vices. Cette conduite du faint pere ne fervit qu'à irriter Ferdinand, qui fe difpofa à lever une armée pour venir à Rome, dans le deffein d'appeller du fouverain pontife au concile. Il publia par-tout qu'il refpectoit la dignité de Callixte & non pas fa perfonne; qu'il tenoit de Dieu fon roïaume de Naples par le bienfait de fon pere, par la conceffion des papes Eugene & Nicolas, & par le confentement des feigneurs, des villes & des peuples; que les raifons de Callixte, pour s'emparer de fes états, étoient frivoles; qu'il ne craignoit ni fes menaces, ni fes armes, ni ses cenfures. Cependant avant que d'en venir à ces extrémitez, il effaïa par fes lettres & par

fes

fes ambaffadeurs d'adoucir l'efprit aigri de Callixte, fans en pouvoir venir à bout.

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AN. 1458.

LV. Conteftations entre plufieurs princes pour le

roiaume de Na

Ferdinand eut encore d'autres ennemis qui travaillerent à faire tomber le roiaume de Naples en d'autres mains. Quelques-uns agiffoient pour Charles prince de Viane, héritier du roiaume de Navarre, ples. comme fils légitime du frere d'Alphonse, qui faute de puiffance plûtôt que de bonne volonté, fe retira de Naples pour ne donner aucun foupçon, & pour attendre quel feroit l'évenement de tous ces troubles.. D'autre prétendoient que ce roiaume appartenoit à dom Juan roi d'Arragon, & frere d'Alphonse, qui s'en mit fort peu en peine, étant affez bien partagé, & fe contentant des états d'Efpagne qui lui étoient plus affurez. Jean d'Anjou fils de René competiteur d'Alphonfe, faifoit auffi valoir fes droits. Charles VII. roi de France l'avoit envoié à Genes, après que les Genois s'étoient mis fous la protection de la France, pour s'oppofer aux vexations d'Alphonfe. Ce prince fe comporta d'abord avec affez de valeur & de prudence s'étant rendu maître d'une bonne partie du roïaume de Naples; mais la fin fut malheureuse, parce qu'il fut entierement chaffé de toute l'Italie fix ans après fon arrivée.

La mort de Callixte délivra Ferdinand de beaucoup d'inquiétudes, & il refta paisible poffeffeur de la couronne. Ce pape mourut à Rome le fixiéme du mois d'Août de cette année, âgé de quatre-vingt ans, après avoir occupé le faint fiége trois ans & quatre mois moins trois jours. Sa maladie avoit duré quarante jours. Jean-Antoine Campanus Italien & évêque de Texamo dans l'Abruzze fit fon oraifon fuTome XXIII.

F

LVI.

Mort du pape Callixte III.

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