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foit loin de ces funeftes climats.

Que dires-vous, repliqua Don Fadrique avec surprise? Qui peut vous révolter contre vôtre Patrie, & vous faire, haïr ce que tous les hommes aiment naturellement ? Après ce qui m'est arrivé, repartit le Toledan, mon Païs m'est odieux, & je n'afpire qu'à le.quieter pour jamais. Ah! Seigneur Cavalier, s'écria Mendoce attendri de compaffion, que j'ai d'impatience de fçavoir vos malheurs Si je ne puis foulager vos peines, je fuis du moins difpofé à les partager. Vâtre phifionomie m'a d'abord prévenu pour vous; vos manieres me charment, & je fens que je m'interefle déja vivement à vôtre fort.

C'eft la plus grande confolation que je puiffe recevoir, Seigneur Don Fadrique, répondit le Tole dan; & pour reconnoître en quelque forte les bontez que vous me

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témoignez, je vous dirai auffi qu'en vous voiant tantôt avec Alvaro Ponce, j'ai penché de vôtre côté. Un mouvement d'inclination que je n'ai jamais fenti à la premiere vûë de perfonne, me fit craindre que Doña Theodora ne vous préférât vôtre Rival, & j'eus de la joie, lorfqu'elle fe fût dé. terminée en vôtre faveur. Vous avez depuis fi bien fortifié cette premiere impreffion, qu'au lieu de vouloir vous cacher mes ennuis, je cherche à m'épancher & trouve une douceur secrete à vous. découvrir mon ame. Aprenez donc mes malheurs.

Tolede m'a vu naître, & Don Juan de Zarate eft mon nom. J'ai perdu prefque dès mon enfance ceux qui m'ont donné le jour ; de maniere que je commençai de bonne heure à jouir de quatre mil le ducats de rente qu'ils m'ont laiffez. Comme je pouvois difpofer

ema main, & que je me croio affez riche pour ne devoir conful ter que mon cœur dans le choix que je ferois d'une femme, j'époufai une fille d'une beauté parfai te fans m'arrêter au peu de bien qu'elle avoit, nià l'égalité de nos conditions. J'étois charmé de mon bonheur, & pour mieux goû ter le plaifir de poffeder une per fonne que j'aimois, je la menai, peu de jours après mon mariage à une terre que j'ai à quelques lieues de Tolede.

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Nous y vivions tous deux dans une union charmante, lorfque le Duc de Naxera, dont le Château eft dans le voisinage de ma terre, vint un jour qu'il chaffoit fe rafraîchir chez moi. Il vit ma femme & en devint amoureux. Je le crus du moins, & ce quiacheva de me le perfuader, c'eft qu'il rechercha bientôt mon amitié avec em preffement: ce qu'il avoit jufques

pre

la fort négligé. Il me mit de fes parties de chaffe, me fit force fens & encore plus d'offres de fervices.

Jefus d'abord allarmé de sa pas fion. Je pensai retourner à Tolede avec mon époufe, & le Ciel fans doute m'infpiroit cette penfée. Effectivement fi j'euffe ôté au Duc toutes les occafions de voir ma femme, j'aurois évité les malheurs qui me font arrivez; mais la confiance que j'avois en elle me raffura. Il me parut qu'il n'étoit pas poffible qu'une perfonne que Javois épousée fans dot & tirée d'un état obfcur, fut affez ingrate pour oublier mes bontez. Helas! je la connoiffois mal. L'ambition & la vanité qui font deux chofes fi naturelles aux femmes, étoient les plus grands défauts de la mien

ne.

Dès que le Duc eût trouvé moien de lui aprendre fes fenti

mens, elle fçût bon gré d'avoir fait une conquête fi importante. L'attachement d'un homme que l'on traitoit d'Excellence,châtoüil-la fon orgueil & remplit fon efprit de faftueuses chimeres. Elle s'en eftima davantage & m'en aima moins. Ce que j'avois fait pour elle, au lieu d'exciter fa reconnoif fance, ne fit plus que m'attirer fes mépris. Elle me regarda comme un mari indigne de fa beauté; & il lui fembla que fi ce Grand Seigneur qui étoit épris de fes charmes l'eut vûë avant fon mariage, il n'auroit pas manqué de l'épou fer. Ennivrée de ces folles idées & féduite par quelques prefens qui les flâtoient, elle fe rendit aux fecrets empressemens du Duc.

Ils s'écrivoient affez fouvent, & je n'avois pas le moindre foupçon de leur intelligence; mais enfin je fus affezmalheureux pour fortir de mon aveuglement:un jour je re

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