Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Qu'il voye donc ce qui affortit chaque genre de caufes & chaque partie du difcours. Car il y a des bienféances de ftile à garder, & par rapport aux différentes parties qui compofent une harangue, & par rapport à tout le corps de la harangue en géneral.

NOTES

Sur le douzième Chapitre de l'Orateur."

[1] Cicéron définit la bienféance, l'art de placer à propos tout ce qu'on dit & tout ce qu'on fait. Scientia earum rerum quæ agentur aut dicentur, fuo loco collocandarum. Offic. lib. 1. n. 40. Voyez dans la troifiéme partic de ma Préface ce que j'ai dit fur la bienséance. p. 111. & fuiv.

[2] Le texte paroît défectueux en cet endroit, outre que le fil du difcours y eft interrompu. Mais pour ne rien omettre, j'en ai tranfporté ici la traduction que voici.

» Les Philofophes ont coutume de traiter » cette vaste matiere, non en parlant sur le » vrai bien qui eft fimple & invariable, mais » en parlant fur les devoirs de la vie civile. » Les Grammairiens traitent auffi ce fujer » dans leurs Commentaires fur les Poë>> tes; & les Rhéteurs en parlent, lorsqu'ils » prefcrivent les regles qu'il faut obferver fur » tous les genres de caufes, & fur toutes » leurs différentes parties.

1

Hor. Sat.Liv.

1. Sat, 1.

[3] Il y a en toutes chofes un certain temperamment à prendre & des bornes à garder, en-deçà & au-delà defquelles on ne trouve plus le point de perfection.

Eft modus in rebus, funt certi denique fines,
Quos ultra citraque nequit confiftere rectum.

Toutefois, felon Cicéron, le trop choque plus que le trop peu. Ainfi il faut prendre garde de ne point aller au-delà des bornes que demande la modération; il vaut mieux demeurer en-deçà. Il est plus aifé de s'approcher de la perfection, quand on eft dans le chemin qui y conduit, qu'il n'eft facile de revenir fur fes pas & de fe corriger, lorsqu'on a une fois paffé les juftes bornes.

[4] Le Peintre qui peignit Iphigenie fur le point d'être immolée, étoit Timanthe. Ce tableau fut loué par tous les connoiffeurs de l'Antiquité. Voyez Pline lib. 35. c. 10.

kλ ki kλ kX÷KA KAKAK

CHAPITRE XIII.

Caractere de chaque genre d'Elocution en particulier, & premierement de celui qui convient au ftile fimple.

75.

[ocr errors]

L s'agit à préfent de rechercher le caractere & la forme de chaque genre d'Elocution. Grande & difficile entreprise, comme nous. l'avons déja dit! Mais nous devions

en prévoir les difficultés & les fuites, avant que de nous y embarquer. Nous voilà maintenant en mer, il faut faire voile & arriver où nous pourrons. Commençons par exprimer l'idée de cet Orateur qui, felon quelques-uns, merite feuf le nom d'Orateur attique.

76. Son ftile eft fimple & fans éle vation, conforme aux loix de l'usage, peu différent en apparence de la di tion commune & populaire, quoi que dans le fond il en foit plus éloi→ gné qu'on ne pense. [1], Tous, jufqu'aux moins Eloquens, croient pou voir l'imiter. En effet rien ne paroît fi aifé à attraper que ce ftile fin & délicat, quand on en juge fur une premiere vûe: Mais rien n'eft pour tanc plus difficile à qui veut en faire l'épreuve. Or quoique ce genre d'écrire ne doive pas prendre beaucoup de nourriture, ni avoir une extrême force, il faut néanmoins qu'il ait un certáin fuc & une forte d'embonpoint qui en faffe connoître la parfaite conftitution.

77. Tirons-le d'abord de la fervitude des nombres. Il y a comme vous fçavez, des nombres qui con

viennent au difcours oratoire & def quels nous traiterons bien-tôt. Mais l'Orateur dont nous parlons n'est point affujetti à leurs loix, fa marche est libre & fans contrainte. Cependant il ne fe permet ni licence,ni écart. Ajoutons qu'il ne craint point la rencontre & le choc des voyelles, & qu'il ne cherche point à joindre artistement les mots pour former une construction périodique; mais cet air négligé, & cette efpece d'hiatus ont je ne fçai quoi de gracieux, en ce qu'ils nous montrent un homme plus occupé des chofes que des paroles.

78. Le voilà donc libre pour ce qui concerne la ftructure de la période & l'enchaînement des mots. Voyons ce qu'il doit obferver par rapport au refte. Car quoique ces phrafes courtes & déliées demandent des foins, il ne faut pourtant pas que l'art s'y faffe remarquer. [2] Il est une forte de négligence qui plaît. De même qu'il y a des femmes à qui il fied bien de n'être point parées; telle est l'élocution fimple : Agréable & touchante fans chercher à le paroître, elle dédaigne, comme les beautés dont je viens de parler, la frifure, les

perles, les diamans, le blanc, le rouge & tout ce qui s'appelle fard & ornement étranger. La propreté feule jointe aux graces naturelles lui fuffit.

79. Le difcours de cet Orateur fera pur, clair, conforme au génie de notre langue & aux regles de la bienséance; Théophraste veut qu'il ait auffi la qualité d'être doux & coulant.. Ajoutons que pour le rendre encore plus agréable & plus vif, il faut qu'il foit tiflu de pensées fines, délicates. & tirées de fources peu connues.

Enfin un tel Orateur n'ufera que très-fobrement des tréfors de l'Eloquence qui nous appartiennent en propre. Par tréfors de l'Eloquence j'entens ces ornemens dont les uns confiftent dans les penfées, & les autres dans les mots. Or nous adimettons deux fortes d'ornemens qui naiffent du choix des mots. Car les mots peuvent être confiderés en eux-mêmes & comme détachés du corps de la période, ou comme joints enfemble..

Les mots confiderés en eux-mêmes: font un bel effet, lorfque employés dans le propre & felon les loix de l'ufage, ils ont un fon agréable à l'oreille qu'ils expriment clairement les cho

Kw

« AnteriorContinuar »