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qui nous concilie la bienveillance des auditeurs, qui les rende attentifs, & qui les difpofe à nous écouter favorablement. 2°. Expofer le fait d'une maniere fi claire, fi courte & fi plaufible; que l'on comprenne bien l'état de la question. 3. Etablir folidement nos moyens & renverfer ceux de l'adverfaire, le tout par des raifonnemens concluans & placés avec ordre, de maniere l'on fente la liaison des conféquences avec les principes. 4°. Terminer le difcours par une peroraifon qui puiffe allumer ou éteindre les paffions, felon le befoin.

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que

Il feroit difficile de marquer ici toutes les diverfes manieres dont ces parties du difcours peuvent être traitées: car elles varient à l'infini,

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CHAPITRE XVIII.

Continuation du même sujet, avec des Remarques fur le difcernement des bienséances, & fur l'art de peindre les mœurs & d'exciter les paffions.

123.

Co

OM ME je m'attache moins à donner des préceptes d'Eloquence, qu'à marquer mon fentiment fur l'idée que j'ai du parfait Orateur, il est bon qu'on fçache que je n'accorde cette qualité qu'à celui qui a affez de goût pour difcerner en toutes chofes les vrayes bienféances.

C'est pourquoi je fais confifter le bon fens de l'Orateur à fçavoir proportionner fon difcours aux tems, & aux perfonnes car un même genre d'élocution n'eft pas propre à toute forte de caufes, ni à toute forte d'Orateurs, ni devant toute forte de Juges, ni contre toute forte d'adverfaires, ni pour toute forte de cliens. Celui-là fera donc veritablement Eloquent qui fçaura conformer fon ftile à tous les égards que demande la bienséance; en forte qu'il ne traite

point d'une maniere féche les matieres riches & abondantes, ni d'un ftile bas les fujets élevés, ni avec une élocution pompeufe & magnifique les petites choses. En un mot il faut la forme du difcours réponde parfaitement à la nature & à la qualité des fujets qu'il traitera.

que

124. Que la modeftie & la retenue accompagnent fes [1] exordes, qu'ils n'ayent rien d'enflé, ni de faftueux: Il fuffit qu'ils foient fournis de penfées vives, frapantes & propres à lui, concilier les efprits, ou à les tourner contre l'adverfaire; quant à fes narrations, il faut qu'elles foient vraifemblables, qu'elles expliquent nettement le fait, mais plutot en ftile approchant de la converfation, qu'en ftile hiftorique..

Pour ce qui regarde la diction de la confirmation & de la réfutation, elle doit être proportionnée au fujet qu'on traitera, c'eft-à-dire que fi la caufe eft. peu confidérable le

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ftile doit être fimple & fans éleva-tion. Et fi c'est une caufe fufcepti ble des figures & des mouvemens de la haute Eloquence, alors l'Orateur doit déployer toutes les forces pour

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fe rendre maître abfolu des efprits, & leur infpirer les fentimens qu'il jugera convenir à la nature du fujet & aux circonftances du tems.

125. Il y a deux chofes principales. qui rendent l'Eloquence digne d'admiration & l'élevent au comble de la gloire; l'une eft appellée és par les Grecs, c'eft-à-dire queftion génerale, & l'autre véno, c'est-à-dire amplifi cation: Il eft certain que, quoiqu'il n'y ait aucune partie dans le difcours oratoire qui ne doive fe foutenir, aucune qui ne doive être fournie d'expreffions ou élegantes ou énergiques; il faut pourtant convenir que rien n'eft plus propre à rendre l'Oraison vive, agiffante & lumineufe, que ces deux efpeces d'ornemens.

126. A la verité l'amplification a droit d'entrer également dans toutes les parties du difcours, mais elle ne paroît jamais mieux, que lorfqu'on l'employe dans les lieux communs: ainfi appellés, parcequ'ils paroiffent être les mêmes & avoir le même caracte re dans la plupart des caufes, quoiqu'on doive s'appliquer à les rendre propres à chaque fujet qu'on traite. Il arrive auffi très-fouvent que la these

embrafle tout le corps du difcours. Car ce qui tombe en conteftation & qui eft le point décifif fur lequel les. Juges doivent prononcer, peut fe réduire à une queftion génerale: alors l'Orateur doit fe borner à parler en géneral fans defcendre dans aucun détail de circonftances, à moins que la difpute ne roule fur la recherche & l'examen d'un fait particulier: auquel cas il faut recourir aux conje&tures.

y

127. Notre Orateur lorsqu'il traitera la question en géneral n'empruntera pas la méthode Péripateticienne, quoiqu'élegante & formée par les préceptes d'Ariftote; mais il fe fervira d'un ftile plus fort & plus nerveux, il mêlera des traits vifs & perçans contre l'adverfaire, & adoucira le plus qu'il pourra les chofes en faveur de fon client [2]. Il eft certain qu'il n'y a rien dont le difcours ne vienne à bout par le moyen de l'amplification, foit qu'on l'employe à groffir les objets ou à les diminuer. C'eft pourquoi il ne faut pas manquer de s'en fervir quand Poccafion s'en préfentera: on pourra l'inferer dans l'argumentation: mais on doit fe fouvenir, que fa place la il faut M vj

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