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la

gle dans la prononciation de certains mots, ainfi nous faifons breve la premiere lettre [4] d'inclytus, d'inhumanus, & nous faifons longue la premiere d'infanus, d'infelix; en forte que in dans la compofition eft long, quand il est suivi d'un s, ou d'une ƒ, par tout ailleurs il est bref pour prononciation. La même chose arrive à l'égard de compofuit, concrepuit, cōnfecit & confuevit, fi vous confultez les regles de la quantité elles vous condamneront, fi vous confultez l'oreille elle vous approuvera. Demandez-vous pourquoi c'est parceque cette prononciation la flattent agréablement; & que le plaifir de l'oreille doit toujours l'emporter fur la regle. Car la principale regle eft de plaire.

162. Moi-même fçachant que les anciens ne fe fervoient de la lettre h que devant les voyelles & jamais devant les confonnes, je prononçois autrefois pulcros, cetegos, triumpos, Kartaginem fans h, jufqu'à ce qu'enfin rappellé à la vraye prononciation par les reproches continuels de l'oreille, je reconnus ma faute, quoiqu'un peu tard, & alors me refervant à moi feul la theorie, je me conformai à l'ufage

pour la pratique. Néanmoins nous prononçons orcivios, Matones, otones, Capiones, fepulcra, coronas, lacrymas; parceque l'oreille n'en eft point choquée. Ennius difoit toujours Purrus & jamais Pyrrhus, fruges & non Phriges, comme on le peut voir dans fes livres. Les anciens Romains ne vouloient point se fervir d'aucunes lettres grecques. Pour nous, nous en avons reçu deux dans notre ortographe, & dans notre prononciation. Car nous difons Phrygum & Phrygi- && ph. qui bus. Nos Anciens trouvoient qu'il & à 4. répondent à étoit abfurde de donner une terminaison latine aux genitifs & aux datifs écrits avec des lettres grecques, tandis que le nominatif avoit une terminaison toute grecque. Nos oreilles n'ont point voulu fe rendre à cette raison, & c'eft pour nous conformer à leur delicateffe, que nous difons & que nous écrivons Phryges & Pyrrum.

163. C'étoit autrefois une élégance: d'ôter la derniere lettre dans les mots: terminés en us, à moins qu'il ne fuivît une voyelle. Par exemple on n'étoit point choqué de voir dans un vers, qui eft omnibu princeps pour on

nibus princeps. Vita illa dignu locoque· pour dignus.

Ce qui feroit regardé aujourd'hui comme une rufticité. Mais fi l'ufage dépourvû du fçavoir a trouvé le secret de mettre tant de douceur dans la prononciation, que ne devons-nous point attendre de l'art même foutenu par la fcience?

164. J'ai plus abregé ces chofes que je n'aurois fait, fi je n'avois eu que ce feul point à difcuter. Car la nature & l'ufage des mots nous ouvrent un vafte champ: toutefois j'en ai parlé avec plus d'étendue, que les bornes que je m'étois prefcrites, ne fembloient le demander. Mais puifque d'un côté le choix des penfées & des termes appartient au difcernement, que de l'autre celui des fons & du nombre appartient aux déci fions de l'oreille, & que de ces quatre chofes les deux premieres reffortiffent au tribunal de l'intelligence & les deux autres au tribunal du fentiment, il s'enfuit que pour juger de la jufteffe des penfées & de la propriété des mots, il faut confulter la raifon, & que pour bien juger des fons & des nombres, il faut s'en rap

porter à l'oreille qui en a découvert Part: ainfi ou nous devons renoncer à la gloire de plaire à ceux dont nous recherchons l'approbation, ou nous devons trouver le moien de concifier les décifions du fentiment avec les décifions de la raifon.

NOTES

Sur le vingt-deuxième Chapitre de l'Orateur. [1] Cicéron avoit traduit dans fa jeuneffe en vers latins le Poëme grec d'Aratus.

[2] Il y a dans le texte fcripferunt effe verius fentio. Sed confuetudini rebus indulgenti libenter obfequor. Verum & veritas outre leur fignification ordinaire, ont encore une fignification peu commune & qui mérite ici d'être remarquée, d'autant plus que Cicéron s'en fert en plufieurs endroits de ce Traité, en y attachant l'idée de regle. En quoi ces deux mots font oppofés à l'idée que l'on a des mots ufus & confuetudo, ufage & coutume.

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[3] Le texte porte, impetratum eft à confuetudine, ut peccare fuavitatis causâ liceret. Nous avons imité l'exemple des Larins dans notre Langue nous aimons mieux faire un folecifime pour adoucir notre prononciation, que de choquer l'oreille par un mauvais fon. Ainfi nous difons mon épée, mon ame, & non ma épée, ma ame, comme la regle de la construction grammaticale le demandoit.

[4] Il y a dans le texte, inclytus dicimus brevi. prima littera infanus producta, inhumanus brevi, infelix longa... In eft quelquefois bref en compofition comme inclytus, & il est long quand il eft fuivi d'une s, ou d'une f, comme infanus, infelix.

La même chofe arrive à l'égard de la prépofition cum, cette prépofition eft longue dans les mots compofés, quand elle fe trouve devant s & f, comme confuevit, confecit. Elle eft breve, quand elle eft devant toute autre lettre, compofuit; concrepuit, conjunxit, &c. Cette obfervation regarde non la quantité, mais la maniere dont les Romains. prononçoient in & cum dans les mots compofés. C'eft pourquoi Cicéron ajoute Confule veritatem reprehendet: refer ad aures probabunt.

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Premierement du fon des mots qui fla

tent l'oreille

par

leur douceur, ou qui

la choquent par leur rudeffe. Seconde ment des figures qui portent avec elles. le nombre & la cadence..

165.

D

Eux chofes charment l'oreille: le fon & le nombre. Nous traiterons bien-tôt du nombre, il s'agit maintenant du fon. Il faut fur-tout choifir des mots qui ayent un.

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