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bons Sermons qui ont été imprimés depuis quelque tems. Je, crois qu'il faut principalement s'attacher à ceux du Pere Bourdaloue. On ne peut choifir un meilleur modéle ; c'est le grand Maître pour l'Eloquence de la Chaire, c'est le Prince des Prédicateurs. Si l'on veut réuffir dans le miniftere Evangélique, il faut commencer comme Iui par un Exorde sensé, & intéresfant, puis convaincre l'efprit par des raifons fortes & lumineuses enfin toucher le cœur par des mouvemens animés & pathétiques. Ce grand homme donnoit à tous les difcours une beauté majestueufe & immortelle. Auffi les vérités qu'il a préchées, quoique maintenant dénuées des graces & du feu de la déclamation, confervent encore dans fes Ecrits toute leur nobleffe, & toutes leurs forces.

Il n'a pas moins excellé dans le Panégyrique des Saints, que dans les fermons qui regardent la morale, & les myfteres de la Religion. En rendant aux Saints le tribut des louanges qui leur eft dû, il n'oublie pas ce qu'il doit à l'édification du prochain, il recueille de leur hiftoire ce qu'il y a de plus éclatant, & de plus conforme à

la vérité; enfuite il en fait une heureufe application aux mœurs du fiécle. Nous avons auffi le recueil des Sermons de M. Fléchier Evêque de Nifmes, de M. Maffillon Evêque de Clermont, des Peres Cheminais, & de la Rue, Jéfuites, des Peres Hubert, de la Roche, & de la Boiffiére Prêtres de l'Oratoire. Tous ces illuftres Prédicateurs méritent à jufte titre l'eftime publique, mais avec des talens & des caracteres différens; les uns fe font diftingués par la facilité de l'invention, par le choix des preuves, & par une exacte explication des vérités Evangéliques; les autres ont enlevé les fuffrages par la grandeur des fentimens, par la nobleffe des pensées, & par le tour vif & animé dont ils fçavoient les exprimer.

M. Maffillon n'a point encore donné au Public fes Sermons; l'édition que nous en avons n'est que le fruit du foin des copiftes qui ont recueilli ce qu'ils ont pû, Néanmoins tout imparfait qu'eft ce recueil, on y reconnoît le génie de cet excellent Órateur: on y remarque les principaux traits de cette Eloquence qui fçait amener les vérités, & les placer dans tout leug

jour; qui tantôt s'infinue dans le cœur par les charmes d'une diction fine & délicate, & tantôt fait trembler le vice, & foudroye l'impiété par la force du raisonnement, & par la véhémence des mouvemens qu'elle met en

œuvre.

Outre les difcours qui concernent la Morale, les myftéres de la Religion, & les Panégyriques des Saints Ia Chaire admet encore les Oraifons funebres; efpece d'Eloquence d'un caractére fingulier, & que l'on regarde d'ordinaire comme l'écueil des Prédicateurs. Cependant M. Boffuet, M, Fléchier, M. de Mafcaron, le Pere Bourdaloue, & le Pere de la Rue s'y font fignalés. On ne peut mieux louer les heros Chrétiens qu'ils les ont loués, ni tirer de leurs vies de plus folides inftructions pour l'édification des Fidéles,

Tout ce qui eft forti de la plume de M. Fléchier porte le caractere d'une imagination vive & brillante, d'un difcernement fin & délicat, d'une élégance, & d'une politeffe accomplie.

On

y admire la pureté du langage, le tour ingénieux des pensées, la richeffe des expreffions, & les graces du ftile. Mais il tire fa principale gloire de fes Oraifons

Oraifons funébres. Là brillent d'un éclat immortel les Vertus politiques, Morales, & Chrétiennes des le Telliers, des Lamoignons, & des Montaufiers ; là les Reines, les Princelles, les Heroines Chrétiennes, reçoivent une Couronne de louange qui ne périra jamais; là Turenne paroît auffi grand, qu'il l'étoit à la tête des armées, & dans le fein de la vic toire,

Il n'y a pas tant d'élégance, ni une fi grande pureté de langage dans M. Boffuet, que dans M. Fléchier; mais on y trouve une éloquence plus forte, plus mâle, plus nerveufe. Le ftile de M. Fléchier eft plus coulant, plus arrondi, plus uniforme. Celui de M. de Meaux eft à la vérité moins égal moins foutenu, mais il eft plus rempli de ces grands fentimens, de ces traits hardis, de ces figures vives & frapantes qui caractérisent le difcours des Orateurs du premier ordre. M. Fléchier eft merveilleux dans le choix & l'arrangement des mots, mais on y entrevoit beaucoup d'attention pour la parure, & trop de penchant pour l'antithefe qui eft fa figure favorite. M. de Meaux plus occupé C

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des chofes que des mots, ne cherche point à répandre les fleurs dans fon difcours, ni à charmer l'oreille par le fon harmonieux des périodes; fon unique objet eft de rendre le vrai fenfible à fes auditeurs, Dans cette vûe. il le préfente par tous les côtés qui peuvent le faire connoître, & le faire aimer, Né pour le fublime, il en a exprimé toute la majefté, & toute la force en plufieurs endroits de fes Oraifons, & fur-tout dans celles de Marie de France, Reine d'Angleterre, & d'Henriette-Anne d'Angleterre, Duchelle d'Orleans,

M, de Mafcaron Evêque d'Agen, quoique moins orné que M. Fléchier, & moins pathétique que M, Boffuet,ne laiffe pas de tenir un grand rang parmi nos Orateurs, Nous avons de lui cinq Oraifons funébres, dont la plus parfaite eft fans contredit celle qu'il a faite pour M, de Turenne. On peut dire qu'il s'eft furpaffé lui-même dans ce difcours, Un feul morceau que je vais mettre ici fera juger du refte.

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» Ne penfez pas, Meffieurs, que notre Heros perdit à la tête des ar mées, & au milieu des victoires ces fentimens de Religion, Certes, s'il

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