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d'air moins épais S. A. & la couleur B envoïera fon efpece ou fon image à l'œil A. par deux degrez d'air épais, & par deux autres d'un air plus fubtil, & la couleur C. la portera par trois degrez d'air épais,& par trois de plus fubtil, & la couleur D. par quatre degrez de l'air épais, & par quatre d'un air plus fubtil. Ainfi il eft affez prouvé par cet exemple, que la proportion de l'affoibliffement, & de la dégradation des couleurs, eft telle que celle de leur distance de l'œil qui les voit; mais cela n'arrive qu'aux couleurs qui font à nôtre hauteur; parce qu'à celles dont les hauteurs font iné. gales, la même regle ne s'y garde pas, étant fituées dans des portions d'air, dont la diverfe épaiffeur les altere &

les affoiblit diversement.

CHAPITRE CVIII.

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Comment il fe pourra faire qu'une conleur ne reçoive aucune alteration, étant placée en divers lieux où l'air fera different.

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UNE couleur ne changera point quoyque tranfportée en divers lieux. où l'air a differentes qualitez, quand

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la diftance & la qualité de l'air feront reciproquement proportionnées; c'eftà-dire, quand autant que l'une s'affoiblit par l'éloignement de l'oeil,elle eft fortifiée par la pureté & la fubtilité de l'air:en voici la preuve. Si on fuppofe que le premier air,ou le plus bas, ait quatre degrez de denfité ou d'épaiffeur, & que la couleur foit éloignée d'un degré de l'œil, & que le fecond air, qui eft plus haut, ait trois degrez de denfité feulement, en aïant perdu un degré, redonnez à la couleur un degré fur la distance; & quand l'air qui eft plus haut aura perdu deux degrez de fa denfité, & que la couleur aura gagné deux degrez fur la distance, alors votre premiere couleur fera telle que la troisième ; & pour le dire en un mot, fi la couleur eft portée fi haut, que l'air y foit épuré de trois degrez de fa denfité ou de fa groffiereté, & que la couleur foit portée à trois degrez de diftance; alors vous pouvez vous affeurer que la couleur qui eft élevée, aura reçu un pareil affoibliffement de teinte que celle d'enbas,qui eft plus près; parce que fi l'air d'enhaut a perdu deux quarts de la denfité de l'air qni eft au bas, la couleu

en s'élevant, a acquis trois quarts fur la diftance de l'éloignement entier, par lequel elle fe trouve reculée de F'œil, & c'eft ce que j'avois deffein de

prouver.

CHAPITRE CIX.

Si des couleurs differentes peuvent per dre également leurs teintes quand elles font dans l'obscurité, ou dans l'ombre.

Il n'eft pas impoffible que les couleurs, telles qu'elles foient, perdent également leurs teintes differentes, quand elles font dans l'ombre, & qu'elles aïent toutes une couleur obfcure d'ombre: c'eft ce qui arrive dans les tenebres d'une nuit fort obfcure durant laquelle on ne peut diftinguer ni la figure ni la couleur de quelque corps que ce foit ; & parce que les tenebres ne font rien qu'une fimple pri vation de la lumiere incidente & refléchie, par le moïen de laquelle on diftingue la figure & la couleur des corps il faut neceffairement que la caufe de la lumiere étant ôtée, l'effet auffi vienne à ceffer, qui eft le difcernement de la couleur & de la figure des corps.

CHAPITRE CX.

Pourquoy on ne peut diftinguer la couleur & la figure des corps qui font dans un lieu qui paroît n'être point. éclairé, quoyqu'il le foit.

Il y a plufieurs endroits éclairez, qui paroiffent cependant remplis de. tenebres, & où les chofes qui s'y ren→ contrent, demeurent privées entierement & de couleur & de forme: la caufe de cet effet fe doit rapporter à la lumiere de l'air venant d'un grand jour, laquelle fait comme un obftacle entre l'œil & fon objet; ce qui fe remarque fenfiblement aux fenêtres qui font loin de l'œil, au dedans defquelles on ne peut rien difcerner qu'une. grande obfcurité égale & uniforme; mais fi vous entrez dans ces lieux > vous les verrez fort éclairez, & vous pourrez diftinguer jufques aux moindres chofes qu'ils contiennent. Ces deux impreffions fi differentes fe font par la difpofition naturelle de l'œil, dont la foibleffe ne pouvant fupporter

le

trop grand éclat de la lumiere de l'air, la prunelle fe refferre, devient fort petite, & par là perd beaucoup...

de fa force; mais au contraire dans les lieux fombres la même prunelle s'élargit, & acquiert de la force à proportion de fon étendue:ce qui fait qu'elle reçoit beaucoup de lumiere, & qu'on peut voir des objets qu'on ne pouvoit diftinguer auparavant, lorf qu'elle étoit rellerrée.

CHAPITRE CXI.

Qu'aucune chose ne montre fa veritable couleur, fi elle n'est éclairée d'une autre couleur femblable.

On ne fçauroit jamais voir la propre & vraïe couleur d'aucune chofe, fi la lumiere qui l'éclaire n'eft entiere ment de fa couleur même : cela fe remarque fenfiblement dans les couleurs des étoffes, dont les plis éclairez jettant des reflets, ou donnant quelque lumiere aux autres plis oppofez, les font paroître de leur veritable couleur: les feuilles d'or ont le même effet, lorfqu'elles fe refléchiffent reciproquement leur jour l'une à l'autre; mais fi leur clarté venoit d'une autre couleur, l'effet en feroit bien different.

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