Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[blocks in formation]

Th. Niem. Ze (chism. l. a, c. 31.

virent conformément aux intentions des cardinaux de Pife. Les Florentins en firent autant à la follicitation de la république de Vénife, parce que Pife étoit alors aux premiers.

Les affaires du fchifme étoient dans cette fituation, lorfque Jean duc de Bourgogne alla au fecours de Jean de Baviére fils d'Albert, petit-fils de l'empereur Louis de Bavière, & frere de Guillaume comte de Hainaut, qui vouloit se maintenir dans l'évêché de Liége, où le fchifme caufa des fcènes fort tragiques & des plus fanglantes. Ce fut à l'occafion de deux évêques confirmés dans cet évêché par des papes différens fçavoir, Jean de Bavière dont nous venons de parler, & qui avoit été confirmé par Urbain VI auquel les Liégeois obéiffoient alors; & Théodoric fils de Henri de Pervis, l'un des plus puiffans feigneurs de ce pays-là, qui s'étoit révolté contre Jean de Bavière à la follicitation des Liégeois, à condition qu'ils éliroient fon fils pour évêque de Liége.

Jean de Baviére, qui, par un abus affez commun en ce tems-là, n'étoit entré dans l'état eccléfiaftique que pour jouir des biens de l'églife, ne fe faifoit point prêtre, quoiqu'il eût plus de vingt-cinq ans, quelques inftances qu'on lui en fît. Son refus l'avoit engagé plus d'une fois à fe retirer à Maftricht, pour éviter le foulevement du peuple contre lui. Ce qui irritoit les Liégeois, étoit que leur évêque, qui s'étoit remis fous l'obédience d'Innocent VII, avoit obtenu de ce pape la continuation de fa dispense pour pofféder cet évêché fans fe faire prêtre. Du murmure & des plaintes on en vint à une révolte ouverte, dans laquelle les Liégeois commirent tant d'infolences, qu'ils obligérent enfin l'évêque à tranfporter fa cour à Mastricht: ce qui acheva de foulever le refte de la ville. Pervis fe mit à la tête des féditieux, & Théodoric fon fils fut mis en la place de Jean de Bavière dans l'évêché de Liége, quoiqu'il n'eût que vingt ans, & que fa famille eût été comblée de biens par celui qu'il fupplantoit.

; on

Comme il n'y avoit aucune apparence que le pape Grégoire XII confirmât cette élection fchifmatique, & confentît à l'expul fion de Jean de Bavière qui étoit dans fon obédience la demanda à Benoît XIII, qui fut ravi de faifir cette occa fion pour établir fon autorité à Liége, en y envoyant un légat pour confirmer Théodoric dans fa nouvelle dignité. Par

là le fchifme général en produifit un particulier à Liége, & l'on y vit deux évêques, dont chacun avoit fon pape; ce qui dura plus de deux ans, pendant lefquels Jean de Baviére alla demander du fecours à la plupart des princes qui étoient fes proches parens ou fes alliés. Mais cet évêque s'étant retiré à Maftricht, les rebelles l'y vinrent affiéger avec une armée d'environ cinquante mille hommes. Les affiégés fe défendirent durant quatre mois avec toute la vigueur imaginable; & ils étoient réduits aux derniéres extrémités par la faim, lorfque Jean duc de Bourgogne, beaufrere de Jean de Bavière, les vint délivrer avec une armée de trente-cinq mille hommes, parmi lesquels il y avoit huit mille gentilshommes avec leurs écuyers, & le refte étoit compofé de fantaffins armés à la légère, la plupart archers & arbalêtriers.

Avec ces troupes il marcha vers Maftric dans le mois de Septembre, & alla camper à deux ou trois lieues en deçà de Tongres. Avant que d'en venir aux mains, il y envoya propofer une conférence à Pervis, afin qu'on pût trouver quel que voie d'accommodement. Pervis confentit à une trève de huit jours, mais s'imaginant qu'il pourroit furprendre le duc, qui fe tiendroit moins fur fes gardes durant ce tems-là, il leva brufquement le fiége le vingt-uniéme de Septembre & marcha droit à Tongres: d'où après avoir armé dix mille bourgeois de cette ville, il les obligea de le fuivre, & fortit le dimanche vingt-troifiéme avant le jour pour aller furprendre le duc de Bourgogne; mais ce duc, averti de fa démarche, réfolut lui-même de prévenir l'ennemi. Il fortit de fon camp le dimanche avec toute fon armée; & ayant apperçu les Liégeois qui firent alte, fort furpris de trouver en campagne ceux qu'il croyoit furprendre dans leur camp, il fe mit en bataille, & fe faifit d'une éminence, d'où il vint fondre tout d'un coup par derriére fur fon ennemi.

Rien ne fut fi furieux que ce premier choc, & on le continua avec tant de valeur & de courage, que l'épouvante s'empara de Pervis, qui jufqu'alors avoit paru intrépide. La victoire, après avoir balancé environ une heure, fe déclara enfin pour le duc de Bourgogne. Les Liégeois pris, entamés & percés de tous côtés, ce ne fut plus un combat, mais une tuerie & un horrible carnage qui fe fit par-tout: Tome XIV.

I

[blocks in formation]

AN. 1409.

fort.

CXXXI.

jufqu'à ce que les vainqueurs laffés de tuer, & ne voyant plus ni danger ni résistance, se mirent à faire des prifonniers. Mais Dieu ne permit pas que ces malheureux reftes de rebelles échappaffent à fa vengeance: car le duc de Bourgogne craignant que ces prifonniers ne fe joigniffent à dix mille hommes fortis de Tongres un peu trop tard pour renforcer l'armée de Pervis, que toutes ces troupes ne vinffent fondre fur lui, & qu'il ne fallût recommencer un nouveau combat, fit tuer fes prifonniers; & les dix mille Tongrois prirent la fuite à la nouvelle de la défaite des Liégeois, après avoir perdu plus de deux mille hommes dans leur retraite. Il demeura trente- fix mille hommes des rebelles fur la place. Le général Pervis & fon fils Théodoric furent trouvés parmi les morts, percés de coups de lance, fe tenant par la main. Le victorieux ne perdit que cinq à fix cens hommes, parmi lefquels il n'y eut que foixante & dix chevaliers. Soixante des plus coupables de la rebellion furent punis de mort. Le pays fut privé de fes priviléges, jufqu'à ce que Jean de Baviére jugea à propos de les leur rendre. Après quoi l'on jetta 'dans la Meufe le légat du pape Benoît, & les officiers de l'évêque intrus, que le peuple chargeoit de malédictions. Telle fut la malheureuse iffue de ce fchifme de Liége, qui fut un effet de celui qui divifoit toute l'églife, & pour l'extinction duquel on travailloit en Allemagne.

Niem. de fchifm. 4.3. c. 38. & 39.

Les Allemands furent tellement allarmés de ce qui venoit Diette de Franc- de fe paffer à Liége, qu'ils réfolurent de ne plus différer de prendre toutes les voies néceffaires pour terminer le fchif me. Grégoire y avoit envoyé dès le mois de Décembre 1408 fon neveu Antoine Corario, en qualité de légat, pour détourner Robert roi des Romains d'envoyer au concile de Pife. Les cardinaux affemblés à Pife de leur côté y députérent le cardinal de Bari Landolfe Maramaur, qui arriva à Francfort au commencement de Janvier 1409, & il affifta à la diette qui fe tenoit dans cette ville. Cette diette fut fort nombreuse. Robert y étoit avec fon confeil, Henri duc de Brunfvick, Herman landgrave de Heffe, Frideric marquis de Mifnie, un autre Frideric burgrave de Nuremberg; les archevêques de Mayence & de Cologne; plufieurs évêques, abbés, comtes & autres grands feigneurs; les ambaffadeurs de France, d'Angleterre, de Pologne, de Bohême

& d'autres royaumes. Le deffein de cette diette étoit de délibérer fi l'on adhéreroit au concile de Pife.

Le cardinal de Bari, envoyé des cardinaux affemblés à Pife, fut reçu avec beaucoup d'honneur dans toute l'Allemagne; mais il n'en fut pas de même du cardinal Antoine, camérier, légat de Grégoire & fon neveu, qui n'arriva que fix jours après qu'on eut commencé la diette, parce qu'on difoit publiquement qu'il ne venoit que pour brouiller. Il n'y eut que Robert qui le fit conduire fûrement pendant fon voyage, & qui l'honora beaucoup. Ce légat arrivé à Francfort fit en pleine diette un fort long & féditieux difcours, dans lequel il prétendit justifier Grégoire, & parla indignement des cardinaux de Pife, & en particulier du cardinal de Bari. Les princes furent choqués de ce difcours; il n'y eut que Robert qui ne s'en offenfa point, & qui même fe retira deux jours après avec lui à Heidelberg: mais fa retraite n'empêcha pas la diette de conclure en faveur du concile de Pife, efpérant que par ce moyen on verroit bientôt la fin du fchifme. Un docteur en droit nommé Robert de Franzola, avocat confiftorial du facré palais à Mayence, fit pour les cardinaux une apologie qu'il publia lui-même à Francfort en présence de Robert & de toute la diette.

[ocr errors]

Cette réfolution de la diette n'empêcha pas Robert d'envoyer à Grégoire des ambaffadeurs, qui furent l'archevêque de Riga, les évêques de Vormes & de Verden, fous prétexte de négocier l'union; mais dans le fond pour traverser le concile de Pife, en quoi ils ne réuffirent pas. Grégoire envoya à Pise l'évêque de Verden pour retarder l'union, & voulut faire cardinal l'évêque de Vormes, qui le refufa. Les autres princes partifans du concile y alloient à grandes journées. Les ambaffadeurs d'Angleterre paffant par Paris furent harangués par le célèbre Jean Gerfon, chancelier de l'univerfité. A Gènes Pile Marin, archevêque de cette ville, harangua les ambaffadeurs de France fur le moyen d'éteindre le fchifme, & fe rangea à la voie de la ceffion, comme à celle qui étoit approuvée de toute la chrétienté, & que concurrens avoient eux-mêmes promife. Ce prélat étant à Pife compofa un ouvrage fous ce titre : Informations de l'archevêque de Gènes fur la réformation de l'églife; où il y a des chofes excellentes mais il me paroît qu'il n'est pas imprimé.

les

AN. 1409.

CXXXII. Grégoire y en voie un légat, & les cardinaux de Pife un dépuré. Raynald, an 1409. n. 60.

CXXXIII. L'empereur en

voie des ambaffadeurs à Grégoire.

AN. 1409.
CXXXIV.

Mort tragique de Guy de Roye, archevêque de Rheims.

Juvenal des Ur

fins hift. de Charles

VI. p. 200. Monf

trelet. p. 83.

CXXXV.

concile de Pife.

Collet, conc. tom.

XI. p. 2117.
Bzov. n. 5.

Alexand. hift. ecclef. f.cc. xv. dif

Entre les ambaffadeurs de France qui fe rendirent à Pife, étoit Guy de Roye, archevêque de Rheims, qui mourut d'une maniére affez tragique. Etant arrivé en une petite ville, ou plutôt un village appellé Votre, proche Gènes fon maréchal eut querelle avec le maréchal du lieu, & le tua. L'archevêque fit mettre le meurtrier entre les mains du juge pour lui faire fon procès, afin d'appaifer la populace qui demandoit justice de la mort de leur compatriote. Mais le prélat s'étant mis à la fenêtre pour parler au peuple & tâcher de l'appaifer, une flèche lâchée par un des habitans lui ôta fur le champ la parole & la vie. Non content de cette mort, le peuple tua encore fon maréchal, & le juge qui le gardoit: il étoit même réfolu de faire périr le cardinal de Bari & tous les autres ambaffadeurs, fi le maréchal de Boucicaut n'eût envoyé des troupes pour appaifer le tumulte. On enterra honorablement le corps de l'archevêque; & le maréchal de Boucicaut fit punir févérement les auteurs de la fédition. II y en eut plufieurs qui furent exécutés à mort, & leurs maifons rafées. Après cette expédition les ambassadeurs continuérent leur route, & arrivérent à Pife.

Le concile qu'on y avoit indiqué pour le vingt-cinquiéOuverture du me de Mars 1409, s'y ouvrit ce jour-là même, fans que Grégoire avec toutes fes intrigues eût pu l'empêcher, n'étant pas beaucoup à redouter: parce que les royaumes de Hongrie, de Pologne, les états de Ruffie, de Dalmatie, de Croatie, de Rafcie, de Servie, de Bulgarie, d'Esclavonie, qui tenoient pour ce pape, auffi-bien que le comte de Cilley étoient fur le point de l'abandonner entiérement. L'affemblée fut des plus belles & des plus nombreuses qu'on eût vu dans l'église depuis long-tems. Il s'y trouva vingt-deux cardinaux; les quatre patriarches d'Alexandrie, d'Antioche, de Jérusalem & de Grade; douze archevêques préfens, & quatorze par procureurs; quatre-vingts évêques, & les procureurs de cent autres; quatre-vingt-fept abbés, entre lefquels étoient ceux de Citeaux, de Clairvaux, de Grammont, de Camaldoli & de Vallombreuse, pour tous les monaftéres de leur ordre; les procureurs de deux cens autres abbés ; quarante & un prieurs. On y vit auffi les généraux des Jacobins, des Cordeliers, des Carmes & des Auguftins; le grand-maître de Rhodes, accompagné de feize commandeurs; avec le prieur général des chevaliers du faint Sépulcre, & le procureur général des cheva

fert. 11, P. 345.

« AnteriorContinuar »