ANECDOTES DE LA COUR D.E PHILIPPE-AUGUSTE. 'ANNEE que j'avois obtenue de mon pere, continua la Princeffe de Chipre, étoit déja, bien avancée lorfque Bafile fut obligé de quitter Limiffo. Les nouvelles d'une révolte dans la partie feptentrionale de l'Ifle, le forcerent à marcher de ce côtélà. Quoique Bafile fe flatât que fa préfence rameneroit affez promptement les efprits, pour que cette expédition ne le retînt Tome V. A pas pas long-tems éloigné de la Cour, il vit avec chagrin la néceffité de s'en éloigner. Son inquiétude le détermina d'abord afe faire accompagner par Théopile, qui de fon côté le fouhaitoit paffionnément. Théopile avoit même demandé avec inffance cette grace au Roi & à fon pere. L'ardeur qu'il montra de fé fignaler dans les combats, & la crainte qu'il n'augmentât encore par fes exploits, l'eftime que les Cipriots avoient conçue pour lui, firent changer de réfolution à Bafile. Il partit, & laiffa Théopile, afHigé de refter tranquille à Limiffo, quand l'occafion fe préfentoit d'acquérir de la gloire. Les Cipriots faifirent ce tems d'abfence de Bafile, pour faire ane démarche d'éclat. His députerent au Roi au nom du peuple, les plus notables de la Ville ils lui représenterent, qu'il exerçoit avec trop de rigueur fon pouvoir fur moi; que c'é toit le pouffer trop loin, que de vouloir me contraindre à époufer un Prince d'un âge peu proportionné au mien tandis que le jeune Théopile étoit fi digne de l'honneur de devenir mon époux; ils ajouterent que, pour notre bonheur & pour le leur ils demandoient que nous fuffions unis. Je fuis forcée d'en convenir; le caractère de mon peré eft févère; s'il eût été auffi aimé que craint, il feroit encore fur le Trône Les Cipriots trouvoient fa domination dure; mais ils s'en prenoient à Bafile, qu'ils fçavoient Etre le maître abfolu de l'efprit du Roi. Mon pere, étonné, peut-être même un peu troublé, de la hardieffe de cette députation, dénué du fecours de l'intrépide Bafile, qui, dans les occafions délicates, le foutenoit de fa ferieté & de fon audace; d'ailleurs, émû de la tendreffe que fes fujets montroient pour fon fang, leur promit de nous unir, ThéoA 2 pile |