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plus prudens & plus éclairez : la vûe des maux où ils fe précipitent, nous porte à chercher les moyens d'éviter leur malheur : l'orgueil qui les. éloigne de Dieu nous fait eftimer l'humilité, qui feule nous en approche ; & leurs déreglemens nous apprennent à nous tenir attachez à la fouveraine & unique regle de notre conduite, & à invoquer l'Efprit faint, qui peut feul mettre dans un ordre parfait tous les mouvemens de notre ame.

XXV I.

Mais comme il eft necessaire de joindre nos foins au fecours de fa grace, le feul moyen que nous ayons de nous en procurer les effets, & de ne nous jamais ingerer par nous-mêmes dans aucune affaire, ni grande, ni petite, & de rejetter tout ce qui peut interrompre notre filence & notre retraite, à moins que nous n'y foyons contraint par des neceffitez inévitables, & qui foient dans l'ordre de Dieu. Il faut auffi alors veiller beaucoup fur nousmêmes, & prendre tout le loifir neceffaire pour demander à Dieu, que puifqu'il nous engage dans les occupa

tions externes, il veuille bien fe rendre notre lumiere, notre confeil & notre force, en forte que nous n'y mettions point de notre propre efprit; & que nous nous y conduifions avec la fasy geffe, la patience, la douceur & la charité de Jefus-Chrift. Après avoir ainsi commencé en implorant fon fecours il refte de finir par une exacte revûe de toutes les fautes que l'on y aura faites, & de fe hâter de les réparer.

XXVII.

Evitons encore toutes les contestations qui ne font de nulle importance, puifqu'il vaut beaucoup mieux paffer pour malhabile, que d'être orgueilleux & attaché à fon fens : évitons même les converfations fur la pieté avec des gens qui ne font pas difpofez à écouter Jefus Chrift; car tout ce qu'on leur peut dire avant que l'heure de Dieu foit venue, ne fert qu'à les aveugler & à les endurcir davantage, en les rendant plus rebelles à la verité.

XXVIII.

Si quelque perfonne de baffe condi-,

,

tion nous venoit dire quelque chofe nous n'aurions garde de nous occuper de fes difcours, pendant qu'un grand Seigneur nous entretiendroit de quelque affaire importante. Or les creatures ne nous parlent jamais, que Dieu ne nous faffe auffi entendre la voix fi nous y fommes attentifs. Nous ne devons donc écouter que celui qui a les paroles de la vie éternelle, & nous affurer que fi nous y fommes fideles, il Joan. d. nous donnera dequoi répondre d'une 68. maniere chrétienne, humble, modeste & fage à ceux avec qui nous converfons.

XXIX.

Il y a des perfonnes qui ne font jamais folitaires, quoiqu'elles foient fouvent feules,une foule de defirs, de deffeins, d'inquiétudes les fuit partout; ils fe laiffent abatre par de vaines craintes, & par des trifteffes toutes feculieres & profanes, qui deffechent leur cœur leurs diverfes paffions y font tant de bruit, qu'elles les rendent fourds à la voix de Dieu, & les réduifent dans un état où ils ne peuvent ni lui parler, ni l'entendre.

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XXX.

La folitude exterieure nous fert de peu, fi elle n'eft accompagnée de l'interieure. Pour être donc vraiment folitaire, il faut impofer filence à notre imagination, à notre cupidité, à tous nos fens, afin que Dieu nous parle, & que nous lui parlions nous-mêmes; tout ce qui eft en nous doit être tourné vers lui, en forte , en forte que nous n'aimions que fon extrême bonté, & ne craignions que de lui déplaire : toute notre trifteffe doit être de ne le pas poffeder encore parfaitement ; & toute notre efperance d'attendre uniquement fes biens éternels avec un entier mépris de tous les autres: enfin on eft exterieurement folitaire quand nous ne converfons plus avec les gens du monde; mais on eft folitaire interieurement, c'eft-à-dire en efprit & en verité, quand on eft feparé des maximes, des coûtumes, des defordres du monde, & que l'on marche dans une voie qui y eft oppofée ; donnons-nous à Jefus Chrift, & il fe donnera tout à nous: Da te illi; & habebis illum.

XXX I.

Or ils ne fauroient offrir à Dieu le facrifice qui repond à leur royale prêtrife, s'ils ne veillent continuellement fur toutes les penfées déreglées de leur efprit, & fur tous les évenemens corrompus de leur cœur, afin de les étouffer dans leur naiffance, felon cette parole du prophete: malheureufe fille de Babylone, qui brifera tes petits contre la pierre? Le fond de déreglement que nous avons eft une veritable babylone; & tant que nous vivons fur la terre, elle ne ceffera point de vivre en nous. Confiderons bien ce qui fe paffe dans notre ame, & nous trouverons que babylone conferve au milieu d'elle de dangereufes racines, d'où naiffent de méchans fruits, qui croiffent& qui multiplient infiniment, fi nous n'avons foin de les retrancher lorfqu'ils ne font encore qu'en fleur.

XXXII.

Notre cœur a bien de la peine à fe tenir en repos, & notre efprit à veiller fur fes penfees. Nous fommes de

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