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ment peu à de miferables pecheurs. Que diroit-on d'un malheureux, qui étant en prifon pour d'horribles crimes, dont il auroit été convaincu, fe plaindroit qu'on n'a pas foin de lui, qu'on le méprife? Et que fommesnous, finon de miferables criminels ? Où fommes-nous, finon dans une malheureuse prifon, d'où nous ne devons fortir que par la mort ? Et quelles peines pouvons-nous fouffrir que nous n'ayons pas meritées.

II.

Après être nez dans le crime, & y avoir ajoûté tous ceux où notre propre corruption nous a portez,nous devons nous eftimer dignes des plus feveres châtimens nous devons nous hair nous-mêmes, & nous traiter avec autant de rigueur que les perfonnes vindicatives en exercent contre ceux qui les ont offenfez. C'est à quoi on eft d'autant plus obligé, que non feulement il eft jufte de venger Dieu de nos injures & de nos outrages; mais encore que nous ne faurions autrement éviter les rigueurs de la divine juftice, qui punit les pecheurs par de terribles châtimens, lorfqu'ils ne fe font pas punis eux-mêmes.

c. 9.

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III.

Cette vengeance eft appellée penitence dans l'Ecriture: & Jefus-Chrift déclare à tous les hommes, que s'ils Luc 13. ne la font, ils periront tous : Nifi pœniv.3.& 5. tentiam egeritis,omnes fimiliter peribitis. Seff. 14. C'est pourquoi le concile de Trente, après les faints peres de l'Eglife, nous avertit que toute la vie d'un chrétien doit être une continuelle penitence. En effet la penitence eft neceffaire à ceux qui ont commis des crimes pour les expier; elle eft neceffaire aux innocens & aux juftes pour se purifier des fautes ordinaires, & pour confer ver leur innocence; elle eft même neceffaire à tous les hommes pour leur donner part à la penitence de JefusChrift, qu'ils ne peuvent fuivre qu'en portant leur croix, ni monter au ciel qu'en le fuivant en cette maniere : r. Petr. Chriftus paffus eft pro nobis, vobis re2. 21. linquens exemplum, ut fequamini veftigia ejus.

IV.

Comme notre pareffe & notre lâ

cheté nous empêchent d'entrer de nous-mêmes dans cette voie, parce qu'elle nous femble trop rude & trop étroite; Dieu nous fait la grace de nous y engager par les peines qui nous arrivent: & loin de rejetter cet effet de fon infinie bonté, nous devons d'autant plus l'en remercier, & même le fupplier de l'employer ainfi à notre égard, que nous n'avons point d'autre moyen de falut.

V.

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Il exerce cette grande mifericorde envers nous quand il nous abandonne à la pauvreté & à toutes les incommoditez qui l'accompagnent; quand il nous envoye des pertes, des afflictions, des maladies & d'autres maux temporels. Il l'exerce encore par les hommes, lorfqu'ils nous perfecutent, ou qu'ils manquent de nous fecourir dans nos befoins: & alors tout ce que nous pouvons fouffrir étant beaucoup au-deffous de ce que nous meritons nous n'avons aucun fujet de nous en plaindre; car quand ceux qui nous maltraitent feroient très-injuftes, Dieu ne le permet qu'avec une parfaite justice, & nous ne devons

pas trouver

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mauvais qu'ils faffent à notre égard ee que nous devrions faire nous-mêmes, puifqu'ils font en cela les inftrumens de la mifericorde, & qu'il opere par-là notre falut.

VI.

Si nous regardons les maux de ce monde avec des yeux humains, ils nous paroîtront terribles; mais fi nous les confiderons par les yeux de la foy, nous en ferons des remedes capables de guerir toutes les maladies de notre ame. Si les laboureurs ne regrettent point la femence qu'ils jettent dans la terre, parce qu'ils efperent en récueillir une abondante moiffon; comment un chrétien refuferoit-il de fouffrir un moment pour Dieu, étant affuré d'en recevoir des récompenfes éternelles &

infinies?

VII.

Lorfqu'il arrive des afflictions & des fouffrances, on doit avoir toûjours dans l'efprit cette parole de S. Auguf tin, que nous trouvons notre avantage & notre falut dans notre délaiffement même : Unde derelinquimur, inde juvamur. Dieu nous aide, nous confole,

nous délivre & nous remplit de fes graces par la malignité de ceux qui nous perfecutent, auffi-bien que par l'infidelité de ceux qui nous abandonnent. Tout étant plein de malediction fur la terre, moins nous y avons de part, plus nous fommes heureux; & plus nous avons droit à l'heritage des enfans de Dieu, felon cette parole de notre divin maître: Bienheureux les Luc. 6; pauvres, parce que le royaume de Dieu 20. leur appartient.Il feroit même à defirer que les hommes miffent, pour ainfi di

re,

leurs corps & leurs ames en preffe avec tant de violence, qu'il ne restâr plus rien de terreftre en eux, & qu'ils devinffent tous fpirituels: quanto preffias, tanto melius, dit S. Auguftin.

VIII.

Comme ils font tous criminels & n'ont d'eux-mêmes que le peché & le menfonge, felon le concile d'Orange, ils ne doivent jamais s'élever au-deffus de perfonne, ni fe plaindre des mépris, des opprobres & des injures: car, d'où viennent ces plaintes, finon de ce qu'ils oublient qu'ils ne font rien, & de ce qu'ils s'eftiment quelque chofe? Ils Dd üij

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