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Nous fommes tous les jours avertis par nos maladies, par nos infirmitez par le nombre de nos années, par la perte que nous faifons de nos parens & de nos amis, que notre mort eft proche; qu'elle fe hâte de venir, & qu'elle peut nous furprendre à toute heure: mais le peché ôte aux hommes l'ufage de la veritable raifon. Quand il s'agit de leur falut, ils font aveugles aux plus grandes fumieres, & leur aveuglement leur donne une plus grande affurance au milieu des précipi

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Il y a d'autres perfonnes qui ne penfent à leur mort qu'en Philofophes,ils la regardent comme une neceffité generale qu'ils ne peuvent éviter, & ils penfent y être affez préparez quand ils ont fait réfolution de la fouffrir fans inquietude mais ils fe mettent peu en peine de ce que deviendra leur ame; ils s'abandonnent aux defirs de leur cœur auffi hardiment que s'il n'y avoit point de justice qui puniffe les crimes des

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hommes, & comme fi tout ce qui eft en eux, devoit finir avec leur corps.

1 V.

&

Il eft vrai que ceux qui ont quelque foy ont auffi plus de lumiere & de raifon, ils ne peuvent penfer à eux-mêmes fans s'appercevoir qu'ils font revêtus d'un formé de terre, corps qui doit y retourner bien-tôt. Ils ont une jufte crainte de tomber entre les mains de Dieu avant que d'avoir fatisfait à fa juftice; & ils defirent d'être du nombre de ceux à qui JefusChrift dira au dernier jour : Venez les benis de mon Pere, & poffedez le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde.

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Ils fe fentent remuer autant de fois que la mort fe préfente à eux : ils craignent leurs pechez & font résolution de les expier par la penitence: ils fouhaitent de mourir comme les faints, & ils foûtiennent les miferes de la vie préfente par l'efperance des biens futurs: carétant chrétiens, ils ne peuvent

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ignorer qu'il faut mourir avec Jefus Chrift, pour reffufciter avec lui.

V I.

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Si nous fommes en cet état, nous avons fujet de louer Dieu des mifericordes qu'il commence à nous faire, en ne nous laiffant pas dans l'aveuglement où font tant de nations infideles, & où vivent la plupart des chrétiens en qui la foy eft prefque toute éteinte; mais d'ailleurs nous avons fujet de gémir, lorfque nous nous appercevons que le fouvenir de la mort fait encore peu d'impreffion fur nous, & que nous Tommes fort éloignez d'y penfer d'une maniere qui nous éloigne du peché, & qui nous applique à la pratique de la

vertu.

VII.

On ne fçauroit douter de la verité de cette parole du fage: Souvenez-vous de votre derniere fin, & vous ne pecherez jamais; mais ce feroit fe tromper de croire, que tout fouvenir de la mort peut produire cet effet. Il eft de ce lieu de l'Ecriture, comme de celui où il eft dit : Cherchez, & vous trou

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verez ; demandez, & il vous fera donné: frappez à la porte, & on vous ou vrira. Dieu ne manque jamais à fes promeffes, & il exauice ceux qui le prient; mais les prieres qui ne confiftent qu'en paroles, que la charité n'anime point, qui ne font pas foûtenues par la perfeverance, qui font lâches, froides & languiffantes, ne s'élevent point jufqu'au trône de Dieu; leur odeur ne monte point jufqu'au ciel, & elles fe changent même fouvent en pechez.

VIIL

Il en eft ainfi du fouvenir de la mort, quand il eft tel que Dieu le defire, il n'y a rien de fi efficace pour nous préferver du peché: comme il n'y a rien de capable de nous détacher de tous les defirs du monde, que d'être penetré d'une vive penfée, que dans un moment il n'y aura plus de monde pour nous. Lorfque nous confiderons que la mort và changer toute la face de la terre; qu'elle enfevelit les méchans en enfer, & qu'elle fait fucceder aux peines très-legeres des juftes, le poids éternel d'une gloire infinie: cette

vûe fuffit pour nous faire fouffrir avec une patience invincible les plus grandes afflictions de la vie préfente? nous aurions affez de courage pour faire penitence, & nous nous hâterions de nous crucifier avec Jesus-Christ,fi nous nous fentions mourir à toute heure; & fi avec les yeux de la foi nous découvrions la bonté & la douceur des fruits qu'un vrai penitent recueille à l'heure de fa mort.

IX.

Mais que faifons-nous? A peine avons-nous jetté les yeux fur la mort, que nous les en détournons comme d'un objet trop trifte, pour les attacher aux vaines images du ficcle dont nous nous fervons pour fatisfaire notre curiofité, & nous nous laiffons aller par tout où la legereté de notre cœur les conduit.

X.

ne.

La penfée de la mort qui s'évanouit prefque avant que d'être formée, peut faire une forte impreffion furnotre cœur, ni rien changer dans nos actions. Afin qu'elle nous fafse porter

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