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difpofer de nous comme il leur plaît, & qu'ils en ont reçû l'ordre de le vende nos défobeiffances, & de nos égaremens & de nos outrages, felon l'expreffion toute divine d'un Roi penitent. Tel est le feu qui doit nous éprouver, & nous rendre des vafes d'élite, au lieu que nous ne fommes par nous-mêmes que des vafes d'iniquité. C'eft pourquoi loin de nous irriter contre ceux qui nous humilient & nous rabaiffent, il faut au contraire que nous leur en fçachions gré, & que nous rendions graces à Dieu, de ce qu'il veut bien nous imputer à merite, ce qui n'eft que la jufte punition de nos defordres.

X X II.

Après nous être ainfi inftruits de ce qui nous regarde nous-mêmes; fi nous continuons de confulter la verité pour apprendre d'elle, quelle penfée nous devons avoir de notre prochain, & comment nous nous devons conduire à fon égard; la premiere instruction que nous en recevrons, c'eft qu'un vrai chrétien n'est ennemi de perfonne, & que fon cœur doit être tellement rempli de la charité, dont il eft re

Tome II.

G

devable à tous les hommes, qu'il n'y reste ni froideur, ni averfion, ni mépris, ni defir de vengeance,

autre mouvement humain.

XXIII.

ni aucun

La fouveraine verité nous oblige de regarder Jefus-Chrift dans tous nos freres, & de confiderer que quand nous les aimons & les affiftons, quand nous foulageons leurs foibleffes,quand nous fupportons leurs défauts, quand nous couvrons leurs fautes, de notre charité, c'eft à lui-même que nous rendons ces bons offices. Ayons donc foin de rendre amour pour amour à ceux qui nous aiment, & de témoigner de la compaffion & de la tendreffe à ceux qui en nous exerçant fe bleffent beaucoup eux-mêmes. Ne manquons jamais de répandre de l'huile & du vin dans leurs plaies, afin de les guerir; & prions pour eux, à l'exemple de notre maître, quand ils nous crucifient par leurs mauvais traitemens. Nous fommes pecheurs auffibien qu'eux; & s'ils ne favent pas ce qu'ils font, quand ils nous traitent de la forte, nous fommes encore plus

aveugles quand nous faifons fouffrir Jefus - Chrift par nos pechez qui le bleffent plus cruellement,que les Juifs ne le blefferent autrefois.

XXIV.

Pendant que nous écouterons la voix de notre amour propre, tout ce que nous apprendrons de l'état de nos freres,& tout ce que nous verrons dans leurs mœurs, produira prefque toûjours en nous des jugemens témeraires, de la colere, de l'indignation & du mépris.Notre malignité nous fournira des moyens de rabaiffer leur vertu, & de relever leurs défauts: les moindres imperfections exterieures nous fuffiront pour juger qu'ils n'ont rien dans l'interieur qui les rende recommandables; & leurs meilleures qualitez nous paroîtront vicieufes, fi'elles ne s'accordent pas avec nos inclina

tions.

XXV.

Afin de remedier à des maux fi ordinaires & fi dangereux, ne nous arrêtons jamais à aucune vue qui ne naiffe de la charité, avant de juger des

actions de nos freres, & d'en dire notre fentiment; confultons la charité que nous leur devons, puifque la lumiere ne viendra jamais à nous que par ce canal, & qu'elle feule empêchera que nous ne nous trompions.

X X V I.

Quelque évident que foient leurs pechez, fi nous les aimons veritablement, nous ne condamnerons point leurs perfonnes, mais nous les laifferons au jugement de Dieu. Nous ne concevrons pas facilement des foupçons à leur defavantage, & nous en croirons à peine nos propres yeux; nous enfevelirons dans le filence tout ce qui donneroit lieu de les blâmer à moins que la charité ne nous contraigne malgré nous de découvrir leurs maladies à ceux qui les peuvent guerir, ou à qui elles pourroient être contagieufes.

XXVII.

la

Il n'y a rien de fi genereux que charité chrétienne, & elle est toujours invincible; fes victoires neanmoins,

font fort fingulieres & fort extraordinaires, puifqu'elle ne furmonte pas

fes ennemis en leur rendant le mal pour le mal; mais en leur faifant du bien, & en n'oppofant que des bienfaits & des faveurs à leurs mauvais traitemens & à leurs injures. Un chrétien qui eft plein de charité, veille continuellement fur les befoins de fes propres ennemis pour les fecourir ; s'ils ont faim, il leur donne à manger; & s'ils ont foif, il leur donne à boire : tout ce qu'il a est à eux me à lui-même ; il fe dépouille en leur faveur de ce qui lui eft le plus cher, & fon cœur prend toute forte de formes pour les gagner entierement.

XXVIII.

,

com

Mais écoutons les paroles de faint Bernard, qui exprimant les difpofitions de fon cœur, nous enfeigne quelles doivent être les nôtres ; & voyons avec quelle bonté il parle à quelques perfonnes dont il avoit grand fujet de fe plaindre.

Encore, dit-il , que vous ne le,; vouliez pas, mes chers freres, je de- «< meurerai uni à vous tous; & quel- »

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