AN. 1572. que répondre, fe retira dans fa cellule, où il af fembla tous fes amis: il leur expofa en peu de mots ce qu'on venoit de lui dire, & ajouta qu'il avoit d'abord jetté les yeux fur le cardinal de Plaifance, qui étoit agréable à Borromée, mais que fes amis n'avoient pas approuvé ce choix, parce que ce cardinal étoit de la derniere promotion, & qu'on lui avoit fait entendre qu'il convenoit mieux de choifir quelqu'un promû par Pie IV. & il nomma Buoncompagno. CIX. On pense à élire le car Il alla trouver enfuite quelques-uns des cardinaux de Pie IV. qu'il avoit déja engagez à bridinal Huguer pour Buoncompagno & leur dit qu'il gues Buon-avoit difpofé tous fes amis à fe déclarer en fa facompagno. veur. Farnefe de fon côté qui avoit compris par CX. Il est élû ment, & prend le nom de Gregoire XIII. unanime la conference qu'il avoit eue avec Granvelle, que Buoncompagno auroit beaucoup de part au pontificat, le dit au cardinal d'Urbin, & le chargea d'avertir les amis de Buoncompagno, que pourvû qu'ils gagnaffent le cardinal Alexandrin, il feroit fûrement élû. Le cardinal de Verceil étant enfuite allé dans la chambre de Buoncompagno, le prit par la main, & le pria de le fuivre dans la chapelle, pour y recevoir l'adoration de tous les cardinaux. Buoncompagno lui aïant demandé s'il étoit affu-ré d'avoir affez de voix pour le faire élire, & Verceil lui aiant répondu qu'il ne lui feroit pas De Thou ut faire cette démarche s'il n'en étoit affuré, il prit Sup. Spond hoc avec lui quelques papiers qui lui étoient de conanno n. 7. féquence, & le fuivit. Dès qu'il parut dans la Ciacon. ut la chapelle tous l'élurent unanimement. Toute Sup. tom. 4. la cour Romaine fut extrêmement fatisfaite de P. 2. & 4. ce choix: Buoncompagno avoit été déja destiné à la papauté par Pie IV. lorfqu'il fut fait cardinal, & peut-être auroit-on férieufement pensé à lui dans le conclave où Pie V. fut élu, s'il n'eût pas été emploïé alors à la légation d'Espagne. Son élection fe fit le treize May dans l'espace de de cinq à fix heures, & il prit le nom de Gre- AN. 1572. CXI. Auffi-tôt après fon élection il envoïa Nicolas Diverfes Ormanette en Espagne, pour engager Philippe ambaffades I du pape II. à maintenir la ligue; Antoine-Marie Salviati pour mainvint en France, pour tâcher de perfuader au roi tenir la li très-chrétien d'y entrer, & d'autres nonces par-gue. tirent encore dans le même deffein, pour fe Ciacon. in rendre auprès de l'empereur, & de quelques fou- virà pontif. verains du Nord. Le cardinal Commendon futtom. 4. pag. confirmé dans fa légation de Pologne, afin d'y Spond. in continuer la commiffion dont Pie V. l'avoit annal. að chargé. 4. LI-hunc an. n.3. I. Navarre & France. LIVRE CENT SOIXANTE-TREIZIE'ME. AN. 1572. PENDANT Mouvemens qui accompagnent la cour de Rome étoit agitée Arrivée de toujours l'élection des nouveaux papes celle de la reine de France méditoit une action tragique, à laquelle Le roi de fon fils à on ne peut encore penser fans horreur la cour de qui feignoit de vouloir affermir de plus en plus la paix avec les Calviniftes, avoit invité la reine De Thon in de Navarre à fe rendre auprès de fa perfonne, hift. lib. 51. pour mettre la derniere main au mariage qu'on P. 788. avoit propofé entre la princeffe Marguerite fa mémoires de foeur & le prince de Navarre. La reine de NaEtoile, tom. Varre fe rendit aux inftances du roi, qui pour 1. in-8.p. mieux diffimuler, vint au-devant d'elle jufqu'à Dans les 20. II. Mort de la reine de Navarre. Blois, & lui fit de grandes careffes. Le prince de Navarre fuivit de près la reine fa mere, il arriva à Blois accompagné du prince de Condé, du comte de la Rochefoucault & de quantité de nobleffe, & l'affaire de fon mariage aiant été mife fur le tapis, l'on convint de tous les articles qui furent arrêtés dès le onze d'Avril. Elle Cette affaire confommée, la reine de Navar re après un court féjour à Blois, fe rendit à Pa ris le quatorze May, afin d'y faire les préparaDe Tron in tifs néceffaires pour le mariage de fon fils. hift. lb 51.voulut y loger chez Guillard évêque de CharP. 791.. trs, qu'elle connoiffoit pour Calvinifte; mais Mezera elle y mourut le dix de Juin fuivant âgée de abregé chr. Par fon teftament elle onto. 5. in-12. quarante-quatre ans. P. 237. donna qu'on l'inhumât fans aucune pompe fune Dupleix. bre dans le même lieu où Henri fon pere avoit hift. de Fr. été enterré, & elle enjoignit au prince fon fils *. 3. p. 783. de vivre dans la confeffion de foi dans laquelle il avoit été elevé, de veiller à l'obfervance des conftitutions qu'elle avoit fait publier dans le Bearn & dans la baile Navarre, & d'avoir un foin particulier de Catherine fa fœur. Enfin elle inftitua pour pour fon héritier fon fils, qui deflors prit le ti- AN. 15724 tre de roi de Navarre; elle pria le roi, la reine fa mere, les ducs d'Anjou & d'Alençon, de prendre ce prince & fa foeur fous leur protection, & de leur permettre la profeffion libre de leur religion, & elle nomma pour executeurs de fon teftament le cardinal de Bourbon & l'amiral de Coligni. III. L'on penfe à executer Ce dernier étoit à la veille de fa perte, & il s'en défioit d'autant moins, qu'on ne lui témoi gnoit que des marques d'amitié & de tendreffe; le projet da les amis l'avertiffoient en vain, que ces dehors fi maffacre des flateurs ne paroiffoient pas finceres, tranquille au Calviniftes. milieu du péril qui le menaçoit, il ne foupçonnoit pas même qu'il en fût proche. Il étoit plus occupé à folliciter le roi de déclarer une guerre ouverte aux Efpagnols, qu'à prendre des précautions pour fa fûreté; & la foibleffe même des raifons que le roi oppofoft aux motifs preffans qu'il lui alleguoit pour faire cette guerre, ne diminuoit rien de fa fécurité. Cependant dès que la cérémonie du mariage du roi de Navarre avec Marguerite de France, qui fe fit dans l'églife de Motre-Dame de Paris le treize d'Aouft de cette année, eût été confommée, Charles IX. qui vouloit hâter la ruine des Calviniftes, fit venir le régiment des Gardes à Paris, fous le faux prétexte de contenir les Guifes qui ne remuoient point; dès que ce régiment fut entré, on ne penfa plus qu'aux moiens qu'il falloit prendre pour executer l'odieux projet que l'on méditoit depuis long-tems, d'exterminer entierement les Proteftans dans le roiaume. IV. L'on délibere fur ce fujet dans le Mais on fut fort partagé dans le confeil fecret qu'on tint fur ce fujet en préfence du roi, entre la reine mere, le duc d'Anjou & d'autres perfonnes de confiance. L'on opina d'abord confeil. qu'il falloit tuer Coligni; que c'étoit l'unique moïen de fe défaire de tous les Proteftans, par AN. 1572. ce que ceux-ci perfuadez que le coup feroit parti des Guifes, ne manqueroient pas auffi-tôt de prendre les armes, & qu'ils pourroient être aifément taillez en pieces, les Catholiques étant en plus grand nombre. Que fi la chofe ne réuffiffoit pas, au moins le blâme de cette action dont le roi retiroit beaucoup d'avantage, retomberoit fur ceux de la maifon de Guife, & qu'on les réduiroit aisément, quand ils n'auroient plus de compétiteurs. Et qu'à l'égard des princes Proteftans que fa majefté avoit en fon pouvoir, il n'y avoit aucun doute que le roi ne leur fit abandonner leurs erreurs, pour rentrer dans l'ancienne religion & dans l'obéiffance, lorsqu'il n'y auroit plus auprès d'eux de mauvais confeillers." V. L'amiral eft bleffé C'eft ainfi que l'on parloit devant le roi. Mais dans le confeil de la reine mere on alla plus avant. On dit que non-feulement il falloit tuer les Montmorencis avec l'amiral, mais qu'il falloit encore fe défaire des princes de Guife, à qui la reine ne devoit jamais fe fier. Si les Prote ftans, difoit on, veulent venger la mort de Coligni, comme ils feront les plus foibles, ils fe ront accablez par le peuple avec les Montmoren cis. Pendant ce tems-là le roi aïant assemblé au Louvre le grand nombre de gens de guerre qu'il aura avec lui, demeurera comme fpectateur; & lorfqu'un des deux partis fera vaincu, il fe jettera fur les vainqueurs affoiblis & las de tuer; & comme s'il avoient pris les armes fans fes ordres & par un efprit de rébellion, il les fera tout tailler en pieces. Le premier acte de la fanglante action qu'on méditoit, commença le vendredi fuivant vingtd'un coup deuxième d'Aouft. Coligni aïant trouvé ce d'arquebufe en fortant jour-là le roi qui fortoit d'une chapelle devant le du Louvre. Louvre, fuivit ce prince jufqu'au jeu de paume, & comme il fe retiroit dans fon logis ruë Jup. lib. 2. de Bétify, accompagné de douze ou quinze De Thou ut 816. gen |