s'eft contenté de nous apprendre qu'ils étoient auffi morts fubitement, & d'une maniere fort trifte. Cependant, quoique Dom Alvare n'eût plus d'Ennemis en Efpagne, & que la Justice divine, fi bien marquée contre fes Dénonciateurs, parut plus que fuffifante pour faire connoître fon innocence, celui qui a écrit fes mémoires nous apprend qu'il ne fut déchargé de tout ce qu'on lui imputoit, qu'au bout de huit ans; qu'on ne jugea pas à propos de le renvoïer au Paraguay, de peur que sa préfence n'occafionnât de nouveaux troubles; & qu'il demeura tout ce tems-là, fans être récompensé de fes services, ni dédommagé de fes pertes, & des frais qu'il avoit faits pour le fervice de l'Empereur. Herrera semble attribuer ce délai à l'absence de ce Prince, qui fut long-tems éloigné de fes Roïaumes d'Efpagne; & nous n'apprenons que par le P. del Techo, qu'il lui fut affigné une penfion de deux mille écus d'or, & qu'il mourut fort âgé à Seville, où il occupoit une place dans l'Audience roïale (1). Je trouve cependant dans un Mémoire, qu'il fut d'abord placé dans le Confeil roïal des Indes. Mais, fi fon Souverain ne lui laiffa rien à défirer pour la récompense de fes fervices, il ne le dédommagea point de tout ce qu'il avoit fouffert, & ne lui tint point compte de la maniere héroïque avec laquelle il avoit foutenu tant de traitemens indignes: c'eft qu'il eft des vertus dont Dieu feul peut être le Rémunérateur. (1) In Senatu Hifpalenfi integrâ famâ consenuit. Hift. Paraq, L. 1. C. 14. 1545. 1545. Ceux, qui penfent & fe conduifent en tout par les grands principes de la Religion, favent bien que lui-feul peut être leur récompenfe. Il femble d'ailleurs qu'on peut concilier cet Hiftorien avec Pierre Fernandez, en difant que la lenteur des Procédures, caufée en bonne partie par l'éloignement du Paraguay, d'où il falloit faire venir des informations juridiques, & en partie par la longue abfence de l'Empereur, empêcha qu'on ne rendît plutôt une pleine juftice à cet Homme célebre, qui de fon côté, du caractere dont il étoit, content d'avoir pour lui le témoignage de fa confcience, ne fe donna pas beaucoup de mouvemens pour folliciter les Juges, & les engager à terminer une affaire, qui ne pouvoit que tourner à fon honneur. Mais ce qui lui en fit plus que tout autre chofe, c'eft qu'il ne lui échappa jamais un feul mot contre fes Ennemis, ni rien qui put charger Dom Dominique Martinez de Irala, après même qu'il eut appris la conduite que tint ce Commandant à fon égard dès qu'il eut été embarqué, & dont nous parlerons en fon tems. Herrera nous apprend feulement que l'Agent, qu'il avoit envoïé pour ménager fes intérêts auprès des Miniftres, ne put jamais obtenir la permiffion de retourner au Paraguay. Il ne nous reste ici, pour achever l'Hiftoire du Gouvernement de D. Alvare Nuñes de Vera Cabeça de Vaca, que de faire connoître quel fut le fuccès du Voiage, que le Capitaine Fernand de Ribera avoit entrepris par fon ordre, & dont ine fut inftruit lui-même qu'après fon arrivée en Espagne. Fernand de 1544-45. J'ai dit que cet Officier étoit parti du Découvertes Port des Rois, le vingtieme de Décembre du Capitaine 1543, avec cinquante-deux Hommes, & Ribera. qu'il s'embarqua fur l'Iguatu. Cette Riviere eft formée par la jonction de deux autres , dont l'une fe nomme Yacareati, & l'autre Yayva. Il faut un peu deviner pour placer exactement le confluent de ces deux Rivieres mais deux chofes font certaines; la premiere, que Ribera y arriva en fix jours; la feconde, qu'il eft à l'Occident du Paraguay & du Port des Rois. Il y laissa fon Brigantin avec douze Hommes pour le garder, & fe mit en marche avec les quarante qui lui reftoient & un Guide que les Xarayez lui donnerent & qui entendoit fort bien la Langue qui a cours dans une bonne Partie du Pais qu'il lui falloit traverser. Avec ce fecours, il lui fut aifé d'interroger les Indiens des différentes Nations qu'il rencontra fur fon paffage ; & Dom Alvare lui avoit donné un Ecrivain du Roi, nommé Jean Valderas, qui avoit foin d'écrire exactement tout ce qu'il pouvoit découvrir; mais à qui il ne communiquoit rien de ce qu'il apprenoit dans les conversations qu'il avoit en particulier avec les Indiens par le moïen de fon Interprête, se réservant à en inftruire fon Général, qu'il favoit être dans la réfolution de vérifier tout par lui-même. L'état où il le trouva à fon retour au Port des Rois, ne lui aïant pas permis d'entrer en matiere avec lui, il le fuivit à l'Affomption, où nous avons vu 1544-45. qu'il ne lui fut pas même poffible de lui Ribera, arrivé au Confluent des deux Tandis qu'il étoit chez les Urtuezez qui avoient pour Voifins les Aburtinez, (1) Voiez les Pieces. & plufieurs Indiens des environs le vinrent 1544-45 |