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cette Amphibie n'a point, ou prefque point, de langue, obligé par le bâton d'élargir fon gofier, il avalle quantité d'eau ; & plus il fait d'efforts pour fe délivrer du bâton, plus il fe l'enfonce dans le gofier, de forte qu'il eft bientôt étouffé. Dès qu'il eft mort, on le tire à terre par le moïen de la corde.

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Le Cayman a fous les pattes de devant des bourfes remplies d'une fubftance, dont l'odeur eft fi forte, qu'elle monte d'abord à la tête; mais quand elle a été féchée au Soleil, elle a toute la douceur du Mufc. On prétend que la Femelle fait plus de vingt œufs d'une feule ponte: mais comme elle les cache dans le fable, les Rivieres, en fe débordant, en entraînent beaucoup. & les Mâles en caffent auffi plufieurs avec leurs ongles. On dit que quand les dents de cet Animal font trop engraiffées par la chair des Poiffons qu'il a mangés, un petit Moineau vient les lui nettoier; mais que fouvent un autre, dès qu'il lui voit ouvrir la gueule pour cette opération, s'infinue dans fon eftomach pour lui ronger le foie. Si le fait eft vrai, la difficulté eft de favoir comment il en fort. Herrera prétend que les Caymans de Rio de la Plata nʼattaquent point les Hommes; j'ai cependant oui dire le contraire à des Voïageurs, qui en racontoient des hiftoires bien tragiques, & qui s'en donnoient pour témoins oculaires. Peut-être avoient-ils pris des Requins pour des Caymans. Ce qui eft certain, c'eft que les Requins, que l'on trouve dans ce grand Fleuve, font beau

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coup plus grands que ceux des autres Ri vieres; qu'ils attendent les Bœufs, qui y viennent boire, les faififfent par le mufle, & les étouffent.

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Caméléons, On voit en quelques endroits des CaméSinges, Ta-léons, de cinq à fix piés de long, qui portares Re-tent leurs Petits avec eux & ont toujours nards, &c. la gueule ouverte du côté d'où vient le vent. C'est un Animal fort doux, mais très ftupide. Les Singes de ce Païs font prefque de grandeur humaine, ont une grande barbe, & la queue fort longue. Ils jettent des cris effroïables, quand ils font atteints d'une fleche, la tirent de la plaie, & la rejettent contre celui qui les a bleffés. Les Renards font fort communs dans quelques Provinces: il y en a du côté de Buenos Ayrès, qui tiennent beaucoup du Lievre, dont le poil eft très beau & bien varié. Rien n'eft fi joli que cet Animal, & il eft fi familier, qu'il vient careffer les Paffans. Mais il faut être bien fur fes gardes avec lui; car lorfqu'on y penfe le moins, il lâche fon urine, dont l'odeur eft d'une infection, qui n'a rien d'égal, & qu'il n'eft pas poffible de faire paffer; de forte qu'on eft obligé de jetter au feu tout ce qui en a été mouillé. Il y a deux efpeces de Tatares: les uns, qui font de la taille d'un Cochon de fix mois, ont dans le ventre une forte de nacre, ou de coquille, & une autre dans la région des reins. Tous ont le mufeau allongé les deux pattes de devant leur fervent de mains, & chaque patte a cinq doigts. Il y a une efpece de Lapins que les Espagnols nomment Apercos, qui

n'ont point, ou prefque point, de queue, dont le poil eft d'un gris argenté, & dont la chair eft fort délicate. Un autre Lapin a la gueule fi petite, qu'à peine une Fourmi peut y entrer.

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Les Lions & les Tigres font communs Des Lions & partout, depuis que les Bœufs, les Chevaux des Tigres. & les Cochons d'Efpagne s'y font multipliés à l'infini. Les premiers y font plus petits, & beaucoup moins féroces qu'en Afrique; les feconds ne font nulle part ailleurs ni plus grands, ni plus furieux. Les Indiens ont cependant trouvé un moïen für de les faire fuir devant eux. Comme ils font fort alertes, dès qu'ils voient un Ti gre, qui vient à eux & contre lequel ils n'ont pas de quoi fe défendre, ils ont bientôt gagné le haut d'un arbre : l'Animal qui ne fauroit les fuivre, fe tient au pied de l'arbre, & y demeureroit affez long-tems pour obliger fa proie à fe livrer à lui, ou à tomber de foibleffe, fi on n'avoit pas obfervé qu'il ne fauroit fouffrir l'odeur de l'urine de l'homme. L'Indien profite de cette connoiffance, & le Tigre s'enfuit affez loin, pour lui laiffer le tems de s'aller mettre en fureté. Ceux, qui ont l'usage des armes à feu, font encore moins embarraffés; car ils tirent fi jufte, qu'on les a fouvent vus percer en l'air des Tigres, qui s'élançoient avec fureur contre eux.

On diftingue, dans ces Provinces, trois Cerfs, Sanefpeces de Cerfs. Les uns font prefque de gliers, Chevres, Chela taille des Bœufs, & ont le bois fort bran- vreuils & chu ils fe tiennent ordinairement dans Daims. les endroits marécageux. D'autres font un

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L'Anta

peu plus grands que les Chevres, & paiffent dans les Plaines. Les troifiemes ne font guere plus forts qu'un Chevreau de fix mois. Les Chevreuils du Paraguay n'ont rien, ou prefque rien, qui les diftingue des nôtres. Les Sangliers ont le nombril, ou peut-être une efpece d'évent, fur le dos. Leur chair eft délicate, & fi faine, qu'on en fait manger aux Malades. Les Plaines du Chaco font Couvertes de Chevres noires, rouges & blanches; mais ces dernieres ne fe trouvent que fur les bords du Pilco Mayo. Les Daims, auffi-bien que les Chevreuils, vont toujours par trouppes, comme les Moutons qu'on éleve en Europe.

Un autre Animal, affez commun dans cette partie de l'Amérique, eft une espece de Bufle, qu'on appelle Anta. Il eft de la groffeur, & a beaucoup de la figure, d'un Ane, mais il ne lui reffemble point par les oreilles, qu'il a fort courtes. Ce qu'il y a de plus fingulier dans cet Animal, c'est une trompe qu'il allonge & retire quand il veut, & par laquelle on croit qu'il refpire. Chacun de fes piés a trois ongles, aufquels on attribue une vertu fouveraine contre toutes fortes de poifons, furtout à ceux du pié gauche de devant, fur lequel il fe couche, quand il fe trouve mal (1). Il fe fert des deux piés de devant, comme font les

(1) Mémoires de Trevoux, Octobre 1751, page 2194. On ne dit point que cet Animal foit fujet à l'épilepfie, ni qu'il fe guérile de ces

accès, en fe frottant l'oreille avec la corne du pié gauche, comme on le dit des Originaux du Canada; à cela près, il leur reffemble beaucoup

Singes & les Caftors, & avec la même facilité. On trouve dans fon ventre des pierres de Bezoard, qui font fort eftimées. Il broute l'herbe pendant le jour, & la nuit il mange une espece d'argile, qu'il trouve dans les Marais, où il fe retire au coucher du Soleil. Sa chair eft fort faine, & ne differe de celle du Boeuf, qu'en ce qu'elle eft plus legere & plus délicate. Sa peau eft fi forte, qu'on prétend que quand elle est feche, elle eft à l'épreuve d'une balle de moufquet; auffi les Espagnols s'en font-ils des cafques & des cuiraffes, quand ils en peuvent avoir. La chaffe de l'Anta ne fe fait que la nuit, & elle eft fort aifée. On va attendre ces Animaux dans leurs retraites, où ils fe rendent ordinairement en trouppes, & quand on les voit venir, on va au-devant d'eux avec des torches allumées, qui les éblouiffent & les étourdiffent de telle forte, qu'ils fe renverfent les uns fur les autres. Alors on tire fur eux à coups furs, & quand le jour eft venu, on en trouve un grand nombre couchés par terre, ou morts, ou dangereufement bleffés.

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Les Volatiles de toutes les fortes fourVolatiles, millent prefque partout dans ce Païs, & Poiffons l'on y compte jufqu'à fix efpeces d'Oies. Loups marins Les Corbeaux font blancs; les Moineaux, & Autruches, de couleur d'or, & les Perdrix groffes. comme des Poules, & en fi grand nombre, furtout dans les vaftes Plaines qu'il faut traverfer pour aller de Buenos Ayrès au Tucuman, qu'on les prend à la ligne comme les Poiffons, fans defcendre de cheval ou des chariots. Les Autruches & los

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