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l'un de nous, pour obéir aux besoins de la Nature, étoit forcé de s'éloigner; je les ai vus se disputer avec acharnement cette nourriture révoltante.

Rien n'est durable. Il est un terme au malheur comme à la félicité. La fin de Mars amena du changement dans la saison; les pluies devinrent moins fréquentes; les torrens baissèrent; je fis partir quatre Hottentots pour aller à la découverte de mes Boeufs; après quelques jours d'absence, ils me les ramenèrent presque tous. Les uns avoient gagné pays, étoient retournés sur nos pas, avoient même repassé la grande rivière Saumache; les autres s'étoient réfugiés dans différentes habitations ; d'autres enfin s'étoient' abrités comme ils avoient pu. Il en manquoit quatre que mes gens n'avoient point retrouvés et dont je n'ai jamais ouï parler depuis. Sans délai, je me mis en devoir de quitter cette terre ingrate, et de lever le camp pour aller le placer à trois lieues plus loin sur une colline nommée Pampoen-Kraal. Je profitai de deux jours de beau temps, pour sécher tous mes effets, dont une grande partie étoit

moisie, et presque pourrie; la peau du Buffle que nous avions écorché, nous servit à remplacer les traits des chariots et des attelages que l'humidité avoit mis hors de service. Au milieu de ces pluies continuelles et de mes ennuis mortels, j'étois capable encore de quelques efforts; j'avois trouvé dans le bois un vieux arbre mort, dont le tronc étoit creux. C'est là que je passois avec mon fusil presque toutes mes journées à guetter les petits oiseaux et le gibier qui se présentoient. J'y étois du moins à l'abri de la pluie et m'y nourrissois d'espérance. De cette niche sacrée, j'abattois impitoyablement tout ce qui se montroit devant moi. Ainsi l'étude de la Nature l'emportoit sur les premiers besoins! Dévoré sans cesse du désir impérieux de lui dérober ses trésors, , je mourois de faim, et songeois à des collections! Malgré tant de contrarietés, je vis mes richesses s'accroître peu à peu; j'avois fait un petit amas d'objets rares et nouveaux pour l'Europe. Je leur fis' prendre l'air. J'en avois eu tant de soin qu'ils n'avoient point été endommagés comme tous mes autres effets par l'humidité. Nous ne trouvâmes dans

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te bois, en menu gibier, que la Gazelle Bosbock et une autre espèce plus petite, dont j'ai parlé au passage du Duiven-Ochs. La plaine outre les trois espèces de perdrix, que j'ai fait connoître plus haut, en offroit une quatrième nommée Faisan rouge, parce qu'elle a les pieds et la peau nue de la gorge, de cette couleur ; en bêtes carnassières, il y avoit des Hiennes, quelques Tigres, mais pas un seul Lion.

Le ciel s'épuroit de plus en plus et sembloit nous présager une vie aussi douce qu'elle avoit été triste et cruelle. La colline de Pampoen-Kraal, où je venois de placer mon camp, me plaisoit beaucoup. J'avois, non loin de ma tente, une petite éminence couronnée par un buisson de trente à trentecinq pieds de diamètre. Les arbres et les arbustes dont il étoit formé, avoient, en croissant, tellement entrelacé leurs branches, que le tout ne paroissoit offrir qu'un seul corps bien épais et bien garni. J'imaginai de m'en faire un petit palais. Je fis tracer une route jusqu'au centre. On élagua de côté et d'autre, à la hauteur d'un homme,

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suffisamment pour donner un passage facile; dans le milieu de ce fourré, à force de travail et de haches nous parvinmes à tailler deux charmantes pièces d'un quarré parfait. Je fis placer, dans l'une, ma table avec une chaise, c'étoit mon cabinet de travail; j'ornai la seconde des ustensiles de ma cuisine, ce qui n'empêcha pas qu'elle me servit en même temps de salle à manger. Ces deux pièces, naturellement plafonnées par des branches et des feuillages d'une épaisseur impénétrable, étoient pour moi un abri charmant, d'une fraîcheur délicieuse, lorsque tout harassé, couvert de sueur et de poussière, après ma chasse du matin, j'y venois me dérober à la chaleur du jour, et aux atteintes dévorantes du Soleil. Quand la fatigue avoit aiguisé mon appétit, quels repas exquis! Quand la rêverie s'emparoit de mes sens, quelles tendres, méditations! Quand le sommeil venoit m'y surprendre, quel repos voluptueux et doux ! Grottes somptueuses de nos financiers, jardins, Anglois, bouleversés vingt fois avec l'or du citoyen, pourquoi vos ruisseaux, vos cascades et vos montagnes, et vos jolis chemins

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