PARODIE
De la Scene fixième de l'Acte premier du Cid de Monfieur Corneille,
Contenant les Regrets de M. du Perrier.
SUR LE PRIX DE L'ACADEMIE.
P Ercé jufques au fond du cœur
D'une atteinte imprevûë auffi-bien que mortelle, Trop miferable auteur d'une injufte querelle, Et malheureux objet d'une injufte rigueur, Je demeure immobile, & mon ame abattuë Cede au coup qui me tuë :
Si prés de voir mon Art recompensé, O Dieu, l'étrange peine !
En cet affront Malherbe est offensé, Et l'offenfeur eft Pere de Chiméne.
Que je fens de rudes combats!
Avec ma vanité ma bourfe s'intereffe,
Je ne fçay qui des deux doit être la maîtresse; L'une échauffe mon cœur, l'autre alonge mon bras: Reduit à fignaler le dépit qui m'enflâme,
Ou de vivre en infame,
Des deux côtez mon mal eft infini,
O Dieu, l'étrange peine !
Puis-je laiffer cet affront impuni?
Dois-je attaquer le Pere de Chiméne ?
Fenfion, mon unique amour,
Qu'on alloit rétablir fans cette tyrannie, Vous ne reviendrez plus, & ma gloire est ternie Par le choix qu'on a fait dans ce funeste jour. Prix, legitime espoir d'une ame genereufe Dela gloire amoureuse,
Toy, qui pouvoit faire tout mon bonheur, Et qui caufe ma peine,
En te donnant on fit de mon honneur Un facrifice au Pere de Chimène.
C'en eft trop, courons au trépás: On oze rejetter des vers dont je fuis Pere: J'attire en murmurant des Auteurs la colere, J'attire leur mépris en ne me vangeant pas. Falloit-il que ma langue à mon Ode infidelle Fit cabaler contre elle ?
Pourquoy parler?.... ha, je n'en puis guérir! Tout redouble ma peine.
Allons, ma Mufe, allons il faut mourir En refpectant le Pere de Chiméne.
Mourir fans tirer ma raifon ?
Avoir un fentiment fi fatal à ma gloire ?
Endurer qu'en Provence on charge ma memoire D'avoir mal foûtenu l'honneur de ma Maifon : Refpecter un Rival dont la veine égarée Tient ma perte affûrée.
N'écoutons plus ce penfer fuborneur Qui ne fert qu'à ma peine,
Ma Mufe allons rétablir mon honneur En me vangeant du Pere de Chiméne.
Quy, ma douleur m'avoit déçû.
Ma raifon cette fois en fera la maîtreffe.
Que je fuccombe aux coups, ou meure de trifteffe, Je rendray mon bon fens comme je l'ay reçû. Je m'accufe déja de trop de negligence,
Courons à la vangeance,
Et tout honteux d'avoir tant balancé, Ne foyons plus en peine,
Puifqu'avec moy Malherbe eft offenfé, Perdons au moins le Pere de Chimène.
DE MADEMOISELLE DE VILENNE,
Fait par Madame Deshoulieres.
E ne puis m'empêcher de faire la peinture Du plus charmant objet qu'ait formé la nature ; C'est la jeune Philis, dont les divins appas, Se font rendu fameux par cent mille trépas, Je connois fon efprit, fa beauté, fon mérite, Sa taille n'eft encor ny grande, ny petite, Elle eft libre, mignone, & pleine d'agrément, Toute feule elle peut faire plus d'un Amant;
Ses cheveux font fortmoirs, fon teint n'eft pas de mê
Il eft vif, délié, fa blancheur eft extrême.
Son nez n'eft. pas mal fait; mais que fes yeux font beaux !
Qu'ils font fins! qu'ils font doux! & qu'ils caufent de maux !
Ses yeux noirs & brillans où l'amour prend fes ar
Font naître des defirs, & répandre des larmes. Tant d'illuftres Amans que l'on voit en ces lieux,
Sont, chere Amarillis, l'ouvrage de fes
Sa bouche eft d'un beau tour, elle eft vive & char
Par fa forme on connoit qu'elle eft trés- éloquente; Elle a je ne fçay quoy qu'on ne peut exprimer, Qui fait qu'on ne peut pas s'empêcher de l'aimer; Elle a de belles dents; le tour de fon visage Eft fi beau, qu'il n'eft rien qui le foit davantage; Elle a de l'embonpoint comme il en faut avoîr; Sa gorge eft blanche, pleine, & l'on ne sçauroit voir En toute la nature une gorge plus belle;
Et fes bras & fes mains sont auffi dignes d'elle ; La fraicheur de fon teint, & fa vivacité, Font bien voir que Philis a beaucoup de fanté ; Elle a cet air galant qui fçait plaire, & qui donne Un charme inexplicable à toute fa perfonne. Pour faire une Conquête & pour la conferver, Elle a tout ce qu'il faut, & l'on doit avoüer Que fa gorge, fes bras, & fa taille admirable
Sa bouche & fes beaux yeux, n'ont rien de comparable.
Son efprit tout divin, répond à fon beau corps, Le Ciel en le faisant épuifa ses trélors ;
Ce n'eft point un efprit qui n'a que l'apparence, Le fien eft éclairé d'une aimable science
Il eft grand, plein de feu, folide, égal, & doux, Il fait dans ces beaux lieux mille & mille jaloux, La fierté luy fied bien ; & pour comble de gloire
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