LES OTSEAUX. Idylle. L'Air n'eft plus obfcurci par des brouillards épais. Les Prez font éclater les couleurs les plus vives, L'hyver ne retient plus les Nayades captives. Ranimant leur voix languiffante, Réveillent les échos endormis dans ces bois. Fait feul tant de métamorphoze, Il fournit au Printems tout ce qu'il a d'apas. Si l'amour ne s'en mêloit pas, On verroit périr toutes chofes. Qui defolent nos champs par une rude guerre, D'un cœur indifferent il banit les froideurs. L'in L'indifference eft pour les cœurs, Que nous fervent, helas! de fi douces leçons ! Un lieu vous déplaît-il, vous paffez dans un autre ; Il n'eft de liberté que chez les animaux. Contre nos trahifons la nature en courroux, Nous cultivons les vergers, & la plaine, Tandis, petits oyfeaux, qu'elle fait tout pour vous: Tome 1. G Les filets qu'on vous tend font la feule infortune Que vous avez à redouter: Cette crainte nous eft commune. Sur nôtre liberté chacun veut attenter : Par des dehors trompeurs on tâche à nous furprendre. Des rufes du chaffeur fongez à vous défendre! CHANSON. R Evenez charmante verdure, Faites regner l'ombrage, & l'amour dans nos bois : Tout eft encor glacé dans le plus beau des mois? REFLEXIONS DIVERSES. I. Q [ hende, Ue l'homme connoît peu la mort qu'il appre- 1686. Elle naît avec luy: fans cefle luy demande Un tribut dont en vain fon orgueil se défend. Il commence à mourir long-tems avant qu'il meure: Le nom de mort qu'on donne à nôtre derniere heure II. Eftres inanimez, rebut de la nature, Ne vous rends que plus précieux. On cherche avec ardeur une Médaille antique : [ fique, D'un Cirque, d'un Tombeau, d'un Temple magni- III. De ce fublime esprit dont ton orgueil fe pique, Des plantes, des métaux, tu connois la vertu, Tu ne te connois pas toy-même ! IV. La pauvreté fait peur, mais elle a fes plaifirs. V. Pourquoy s'applaudir d'être belle ? Quelle erreur fait comter la beauté pour un bien? A l'examiner il n'eft rien Qui caufe tant de chagrin qu'elle. Je fçay que fur les cœurs fes droits font absolus, Que tant qu'on eft belle ont fait naître Des defirs, des transports, & des soins affidus : Mais on a peu de tems à l'être, Et long-tems à ne l'être plus. VI. Miferable jouet de l'aveugle fortune, |