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D'ordinaire on n'exprime ce Coin qu'en profil par fon triangle générateur AEB, dont la pointe E en exprime le tranchant; fa bafe AB exprime celle du Coin ou fa tête; les côtez AE, BE, de triangle expriment ceux de ce Coin ou les faces; & la hauteur de ce triangle, c'eft-àdire, la diftance de fa pointe E à fa base AB, eft ellemême la hauteur de ce Coin. C'eft pour cela qu'il s'appellera ici ifofcelle comme ce triangle, pour le diftinguer des autres Coins de figures quelconques, dont nous allons parler, & que nous ne reprefenterons ainfi qu'en profil, pour moins d'embarras de lignes dans les Figures.

DEFINITION XXXI.

On appellera ici Résistance abfolue d'un corps à rompre, à caffer, ou à fendre en quelqu'endroit que ce foit, ce que les fibres de ce corps en feroient à fe caffer ou à se détacher toutes à la fois en cet endroit: mais parce qu'on peut douter qu'il y ait aucun corps dont les fibres caffent ou fe détachent ainfi toutes à la fois à l'endroit où il fe romproit, de quelque maniere qu'on le rompît, même en le tirant fuivant la longueur; nous appellerons en general Réfiftance de Tenacité, ou Réfistance totale des fi"bres d'un corps, ce que celles qui s'oppofent à fa rupture, en font toutes enfemble à la force qui tend à le rompre, ou à le fendre, foit que vaincues par cette force, elles caffent ou se détachent toutes à la fois, ou feulement les unes après les autres, en prêtant fucceffivement jufqu'à certaines longueurs avant que de fe caffer ou de fe détacher, en quelque proportion de longueurs qu'elles prêtent jufqu'à ce terme d'alongement. Enfin nous appelleTons Réfiftances des côtez de la fente d'un corps à fendre par le moyen d'un Coin, ce que ces côtez de la fente, retenus ensemble par la réfiftance des fibres qui s'oppofent à leur féparation, en font aux efforts des côtez du Cain contr'eux pour les écarter malgré ces fibres, & les forcer. ainfi de permettre à ce Coin d'entrer plus avant dans le Corps à fendre.

REMARQUE

Je ne fçais point d'Auteur qui ait recherché la force du Coin fur d'autre que fur l'ifofcelle; je n'en fçais non plus aucun qui avant M. Defcartes l'ait confideré indé-pendamment de toute autre Machine: de tous ceux qui ont parlé des proprietez du Coin avant cet Auteur, je n'en fçais point qui n'ayent rapporté la force de cette Machine à celle du Levier, ou à la réfistance du plan incliné, en prenant la force du Coin pour celle d'un coup dont il feroit frappé perpendiculairement à fa bafe, ou (ce qui revient au même pour celle dont il tend à s'enfoncer dans le corps à fendre.

I. Les premiers ont regardé les côtez du Coin comme des Leviers, dont les uns ont mis les appuis à la pointe de ce Coin, & les autres à l'entrée de la fente qu'il fait dans le corps à divifer: mais ne fçachant à quelles diftances de chacun de ces appuis fuppofez, ils devoient confiderer la force employée pour enfoncer le Coin & la réfiftance du corps à fendre, ils n'en ont pu conclure aucun rapport entre cette réfiftance & cette force.

II. Quant à ceux qui ont regardé les côtez du Coin comme des plans inclinez, ils ne nous ont donné guéres plus de lumiere: la plupart fe contentent aufli d'expliquer la question fans la décider; & les autres, en la décidant, fe partagent en deux fentimens. Il y en a parmi eux qui difent qu'à l'inftant d'équilibre entre la force dont on frappe le Coin perpendiculairement à fa tête, & la rési-ftance du corps à fendre, cette force du Coin eft toûjours à cette résistance, comme la demi-bafe de ce Coin eft à fa hauteur ; d'autres prétendent que c'est comme fa demi-bafe à un de fes côtez...

III. Enfin ceux qui ont confideré le Coin indépendamment de toute autre Machine, fe trouvent encore de deux fentimens differens: les uns croyent qu'à l'instant d'équilibre entre la force du Coin & la résistance du corps à fen-dre, cette force eft toujours à cette réfiftance comme la!

bafe du Coin eft à fa hauteur; & d'autres foûtiennent que c'eit comme la plus grande largeur de la fente à sa profondeur. Ce qui eft encore tout different; puifque ceuxci ne veulent pas que la pointe, ou le tranchant du Coin aille jufqu'au fond de la fente, ni par confequent que la bafe du Coin foit à fa hauteur comme la largeur de la fente eft à fa profondeur.

IV. Outre ces Auteurs, il y en a encore qui confiderant d'abord le Coin indépendamment de toute autre Machine, & le faifant enfuite dépendre du Levier, difent que fuivant chacune de ces deux manieres, la force du Coin eft à la résistance du corps à fendre comme la base de ce Coin eft à la fomme de fes côtez ; ce qui s'accorde avec le fecond des fentimens du précedent art. 2.

V. La diverfité de tous ces fentimens fait déja voir qu'il ́y a là du paralogifme, de quelque côté qu'il foit, & en quelque fens (Def. 30.) que le mot de Réfistance y foit employé: on en jugera par les Th. 39. 40. qui tant pour les réfiftances rélatives ( Déf. 1.22. 31.) que pour les abfolues, comprendront en general tous les cas poffibles de cette queftion, c'eft-à-dire, toutes les configurations poffibles des Coins avec toutes les directions imaginables de la force qui les frappe ou les pouffe, foit que ces côtez enfoncent, ou non, jufqu'au fond de la fente du corps à divifer. On va commencer par le rapport de cette force abfolue( Déf. 31.) aux résistances rélatives ( Déf. 2 2. ) des parties du corps à fendre, que le Coin tend à écarter l'une de l'autre, parce que de la connoiffance de ce rapport dépend celle de cette force abfolue ( Déf. 1. 22. 3 1.) aux réfiftances rélatives des parties du corps à fendre, que ·le Coin tend à écarter l'une de l'autre ; parce que de la connoiffance de ce rapport dépend celle du rapport de cette force abfolue du Coin à la résistance abfolue du corps à fendre, & auffi pour voir en quel fens les fentimens précedens font vrais ou faux.

Ne craignant rien tan que d'offenfer qui que ce soit, je n'ai nommé jufqu'ici aucun des Auteurs que j'ai fait voir s'étre

mepris

mépris, excepté M. Borelli, & le P. Vannius, que j'ai été force de dire dans la réflexion italique qui précede le Corol. I. du Th. 1. être de ce nombre, ne pouvant faire fentir leurs méprifes dans ce qu'ils ont dit de contraire à ce que j'ai établi cideffus, fans citer leurs paroles pour les fuivre pied à pied, &. confequemment fans citer leurs Livres, qui les auroient également décele. Sans cela j'aurois tû leurs noms, comme j'ai tù, ceux des Auteurs que j'ai refutez jusqu'ici dans cet Ouvrage. fur leurs fimples propofitions: c'est pour cette derniere raison que je ne nomme point ici non plus ceux dont je viens de rapporter les fentimens fur le Coin, lefquels je vas faire voir être les uns faux, & les autres trop limite.

THEOREME XXXVII.

2510

De quelque maniere qu'un Coin quelconque AEB foit pouffé F16.148. dans la fente HRK d'un corps à fendres ce qu'il employe 249.250 de force pour divifer ainfi ce corps, est toûjours dirigé fuivant une ligne droite qui passe par l'angle ou la pointe R de la fente, & par un point D, d'où l'on peut toujours mener deux perpendiculaires aux cótek HR, KR, de cette fente HRK, en des points H, K, où le Coin AEB rencontre ces côte de la fente, en quelque rapport que cette direction DR divife l'angle HRK de la fente.

DEMONSTRATION.

Il est visible qu'un Coin AEB, quel qu'il foit, & de quelque force ou maniere qu'il foit pouffé, ne tend à fendre un corps deu qu'en vertu( Déf. 22.) des Momens égaux en fens contraires qu'il caufe aux côtez HR, KR, de la fente HRK, dans laquelle on le fuppofe, par les efforts perpendiculaires (Lem. 3. Corol. 8. 9.) qu'il fait contr'eux pour les écarter l'un de l'autre ; puifque fi ces Momens étoient inégaux, leur difference ne tendroit qu'à mouvoir ce corps entier & dans le fens du plus fort de ces deux Momens, & nullement à le divifer ou fendre. Donc tout ce que le Coin AEB employe de force (que

Tome II.

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j'appelle G) à fendre ce corps, doit être fuivant une di-rection DG, telle que cette force G fe puiffe décompo fer en deux autres (que j'appelle M, N, fuivant DM, DN, perpendiculaires aux côtez HR, KR, de la fente HRK en des points H, K, où ce Coin les rencontre; & qu'il en résulte des Momens égaux à ces côtez HR, KR, de la fente ; c'est-à-dire ( Déf. 22. ) en forte qu'il en réfulte MxHR-NxKR ; & confequemment M. N:: KR.HR. Or la force G fuivant DG eft( Lem. 3. Corol. 6.). à chacune des deux M, N, dans lesquelles elle fe décom◄ pofe, comme cette diagonale DG du parallelogramme DMGN, eft à chacun de fes côtez correfpondans DM,. DN; ce qui donne auffi M. N:: DM. DN. Donc on aura toûjours ici DM. DN:: KR. HR. Ce qui donnant DMx HR=DNxKR, fait voir ( Lem. 1 2.) que la direction DG de la force G employée par le Coin AEB à fendre le corps deh, doit paffer par l'angle R de la fente HRK, & par quelque point D d'où l'on puiffe mener deux perpendiculaires DM, DN, aux deux côtez HR, KR, de la fente HRK en des points H, K, où ces côtez foient rencontrez par le Coin AEB, en quelque rapport que cette direction DR de la force G toute employée à fendre le corps ex, divife l'angle HRK de la fente dans laquelle le Coin AEB tend à s'enfoncer de cette force G. Ce qu'il falloit démontrer.

SCHOLI E.

Si l'on imagine un cercle qui paffe par les trois points H,R,K,il fuit de-là que fon diamétre mené du point R, en rencontrera la circonference en un autre point D, d'où l'on pourra toujours mener deux perpendiculaires DM, DN, aux côtez HR, KR, de la fente HRK, par les deux points H, K, où l'on fuppofe que ces deux côtez font rencontrez par le Coin AEB.

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