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Hancque poteftatem dat Chriftus habere perennem.
Nec labor ifte tibi, frater, jam proderit uni,
Sed queifcumque velis detur pars magna laboris.
Hæc merces operis, quam dat fcriptoribus ipfis
Sanitus Vedaftus, pater optimus, atque benignus,
Hac mercede librum perfcripfi fedulus iftum,
Quem fi quis tollat, tellus buic ima dehifcat,
Vivus & infernum petat amplis ignibus atrum. Fiat, fiat.

On peut voir par ces vers quelle étoit l'efperance de ceux qui écrivoient autrefois les livres, & combien leur travail leur paroiffoit utile, puifqu'ils croyent qu'autant de mots qu'ils écrivoient, autant de pechez leurs étoient remis, & qu'ils étoient perfuadez que leur travail profitoit à plufieurs, en quoi ils ne fe font pas trompez, puifqu'il profite encore tous les jours par l'ufage faint & religieux qu'on en fait. Parmi les manufcrits recens, il y en a un qui a pour titre la Violete, qui parle des vertus chretiennes, dont l'auteur s'eft fait connoître par ces paroles. Jou Godefrois fiex de Jehan le Coifpelier jadis bourgois de S. Omer, moyne de l'ordre S. Benoit de Pabie feint Eugene de les Sene le veille en Toskane, nés en le ville de S. Omer fufdite, fit cheft livre en la fovent dite vile, en l'onneur de Dieu, de fe mere, & de tous feins, fpecialement de monfieur feint Georges l'an de gruße M. CCC. & XL. deux, environ le feint Jehan Baptiste en efté, pour le commun pourfit & l'amour des habitans, où je me tenoie molt aloijes tant de char & de fanc, comme de lynage, comme pure benivolent bien defervie envers mi fouvent. Après avoir examiné la bibliotheque, monfieur le grand Prieur nous mit entre les mains quatre grands cartulaires très-beaux, & où il y a d'excellentes chofes, qui peuvent fervir à éclaircir l'histoire. Nous en copiâmes quelques endroits, dont nous pourrons faire part au public. Ce que nous venons de rapporter nous fait voir que les fix incendies qui font arrivées à S. VVaft, n'ont pas tout confumé, & nous font aifement juger des trefors immenfes que nous y trouverions, fi nous avions tout ce que les flammes nous ont ravi; mais ce n'eft pas feulement la bi

de

bliotheque & les archives qu'on doit admirer à S. VVast. Tout y eft grand & magnifique. L'eglife eft comparable aux plus belles du royaume, grande, large, élevée, delicate & ornée: fur tout le tour des chapelles & le chocur. Les chaires font d'un travail immense. L'hiftoire de l'ancien & du nouveau teftament y eft reprefentée. L'autel eft simple selon l'ancien usage, mais derriere l'autel on voit une pyramide de pierre foutenue par quatre colomnes de porphyre, au-deffus de laquelle font les corps de S. V Vast, de S. Adulfe & de S. Ranulfe dans trois chaffes d'argent, & je ne comprend pas comment monfieur Baillet a avancé que le corps de S. VVaft n'étoit pas dans l'eglife de l'abbaye qui porte fon nom, mais à la cathedrale. Car les deux auteurs qu'ils citent pour les garans, n'en difent pas un feul mot, & s'il avoit confulté les chanoines de la cathedrale d'Arras, ils lui auroient avoué de bonne foi qu'ils n'ont pas le corps de S. VVaft, qu'ils s'eftiment fort heureux d'avoir une partie de fon chef & un offement d'un de fes bras, qu'ils gardent comme un très-riche threfor.

Le tombeau de Thierry I. roi de France, fondateur du monaftere, se voit dans le fanctuaire du côté de l'evangile avec cette epitaphe.

Rex Theodoricus, ditans ut verus amicus

Nos ope multimoda, jacet hic cum conjuge Doda.
Regis larga manus, & præful Vindicianus,
Nobis regale dant & jus pontificale.

In decies nono cum quinquagies duodeno
Anno, defunctum fciet hunc qui quattuor addet.
Qua legis het hora, Dominum pro regibus ora,
Muneribus quorum ftat vita Dei famulorum.

Un peu plus bas eft le tombeau de Jean Sarrafin ar. chevêque de Cambray, qui fe reffouvenant qu'il avoit été religieux & abbé de S. VVaft, voulut y être enterré. Celui de Philippe Gavrel un des derniers abbez reguliers eft du côté de l'epitre. Ces deux abbez ont été deux grands hommes, naturellement porté à de grandes

entreprises. Sarrazin s'étoit élevé par fon propre merite, il fut employé dans des négociations & dans les affaires de l'état. Son zele pour fon prince lui procura fon affection & l'archevêche de Cambray. Etant encore abbé de S. VVaft, il fit bâtir le convent des Capucins aux depens de fon monaftere, & fonda les filles de fainte Agnés, deftinées pour l'éducation des jeunes filles. Gavrel fit encore de plus grandes chofes, car il bâtit le beau college des Jefuites d'Arras, & le dota d'un bon revenu, il fonda le convent des Auguftins de la Baffée, le monaftere des Benedictins Anglois & le fuperbe college de Douay. Je ne parle pas ici de tout ce qu'ont fait les autres abbez de faint VVaft. On peut dire feulement en general qu'il y a peu de maifons religieufes à Arras, qui n'ayent reffenti leurs liberalitez, foit dans la fondation de leur convent, foit dans plufieurs autres occafions.

Le threfor eft très-riche & dans tous les Pays-Bas, il n'y en a point qui lui foit comparable. Il y a quatre buftes d'argent d'une grandeur qui n'eft pas commune, dans lefquels on conferve les chefs de S. Leger evêque d'Autun, de S. Vindicien evêque d'Arras, de S. Aubert evêque de Cambray, & de S. Omer evêque de Terouenne. Six autres chefs d'argent, qui renferment des reliques de divers Saints, une croix magnifique pour fa grandeur & pour fon travail, dans laquelle il y a une portion confiderable du bois de la vraye croix, un calice qu'on croit avoir fervi à S. Thomas de Cantorberie, des colombes dans lesquelles on confervoit autrefois la fainte Eucharif tie, un vafe d'yvoire en forme de tour, où l'on prétend que fainte Marie-Magdelaine mettoit des parfums, mais il paroît par une ancienne inscription, qu'on y confervoit autrefois le faint Sacrement dans un vafe d'or, quatre chandeliers d'argent d'une grandeur & d'une groffeur prodigieufe.

Les lieux reguliers repondent à la grandeur de la maifon. Il y a deux refectoires, un pour le maigre & un pour le gras. Le refectoire où l'on fait maigre eft grand, large & élevé, mais il n'eft que lambriffé, dans le fond on a

peint à frefque la ceremonie de l'année Sainte, faite à Rome en mil fept cens, par le cardinal de Bouillon doyen du facré college & abbé de S. VVaft. Le refectoire où les religieux mangent de la viande n'eft pas fi grand, mais il est vouté & très-beau. C'est une ancienne coûtume du monaftere confervée par la tradition, qu'aux graces, qui fe difent après le repas, les religieux prononcent ainsi ce verfet. Difperfit dedit pauperibus, juftitia ejus manet in gloria. Je ne parle pas du carillon, qui paffe pour le plus agréable, qui foit dans les Pays-Bas, ni de l'orgue qui est toute dorée.

Les religieux de S. VVast se levent entre onze heures & minuit, pour chanter matines, ils difent tous les jours l'office de la Vierge, chantent trois grandes meffes & quelquefois quatre. & celebrent les divins myfteres avec beaucoup de gravité. Tous les jours le prieur, ou celui qui prefide au chœur, offre à la meffe la matiere du sacrifice. Le jour de S. Jean nous affiftâmes à l'office, nous y remarquames quelques ceremonies particulieres, que les perfonnes zelées pour les anciens rites feront bien aifes de trouver ici. Le celebrant va à l'autel precedé de deux prêtres feculiers en furplis, qui portent des maffes, & qui le ramenent de même maniere. Les Acolythes tiennent leurs chandeliers prefque durant toute la messe. Ils les depofent néanmoins au Kyrie fur un marbre, qui est devant le grand candelabre. Alors ils vont à l'autel preparer la matiere du facrifice, les hofties pour ceux qui doivent communier, & versent du vin dans le calice, qu'ils portent enfuite derriere l'autel. Ce font eux qui chantent le graduel avec le thuriferaire. L'evangile fe chante au candelabre. Avant le Pater le diacre & le fous-diacre font à genoux, auffi-bien qu'au Domine non fum dignus. Les religieux qui ne font pas prêtres communient à la messe, & vont faire leurs actions de graces derriere le grand autel au tombeau de S. VVaft, où ils demeurent jufqu'à la fin de la meffe. Le diacre chante l'Ite miffa eft à côté du celebrant & non au milieu de l'autel. Durant le carême on fait le mandatum tous les famedis aux religieux, &

tous les jours aux pauvres. Lorsqu'un religieux meurt, le prieur l'école au col frappe la tablette dans le cloître avec un marteau. Quoique les religieux de S. VVaft ne foient pas gênez, ils font pourtant fort retirez, il fe paffe des mois entiers fans en voir un en ville, & il y en a qui feront fix mois fans fortir. Tous les jours les quatre prieurs s'af femblent après prime pour conferer de la difcipline monaftique, & au chapitre qui fe tient immediatement après, on impofe penitence à ceux qui se trouvent en faute. Avant le repas ils s'affemblent encore pour voir, fi on doit faire mifericorde à quelqu'un.

L'abbaye de S. VVast est la plus illuftre de tous les Pays-Bas, la plus puiffante, la plus riche & celle qui a de plus grands privileges. L'abbé lorsqu'il eft regulier, est prefident d'une petite congregation des exempts, compofée de fix abbayes des Pays-Bas, S. V Vast, S. Bertin S. Amand, S. Pierre de Gand, Lobbes, & Ehinam. Enfin S. VVast a été de tout tems un feminaire d'hommes illuftres, qui a donné à l'eglife plufieurs evêques, & à l'ordre monaftique un grand nombre d'abbez. Nous raporterons ici ceux qui font tombez entre nos mains, car il feroit difficile de les rapporter tous.

LES PERSONNES ILLUSTRES QUI SONT SORTIES DE S. VVAST POUR GOUVERNER D'AUTRES MONASTERes.

LEDUINUS établit la difcipline monaftique au monaftere de Marchienne l'an 1024. Il y mena une colonie de ses religieux, pour prendre la place des religieuses, qu'on en avoit expulfées. Il gouverna le monaftere neuf ans, au bout defquels il fe démit, & fe retira à fon premier monaftere.

ALBERIC fut abbé de Marchienne quinze ans & mou rut en 1048.

S. POPPON abbé de S. VVast le fut auffi de Marchienne, mais très-peu de tems, car on ne lui donne qu'un mois de gouvernement.

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