Les Démonstrations faites à la maniere des Anciens, éclairent plus l'esprit que les Démonstrations Algebriques, quoiqu'elles ne foient pas plus certaines: mais aussi elles ne font pas fi faciles à trouver, comme il est aisé de juger par les Démonstrations des Problêmes précedens, que l'on auroit pû démontrer par l'Algebre aussi facilement que les deux derniers. SECTION III. Où l'on donne la Méthode de démontrer les Theorémes VIII. A de Geometrie. метноDE. PRE'S avoir mené les lignes que l'on juge necessaires, en suivant les Observations de l'article 4, on nommera celles qui doivent entrer dans la question, comme lorsqu'on veut résoudre un Problême avec cette différence, que l'on peut se servir de toutes les lettres indifféremment : car comme l'on ne cherche la grandeur d'aucune ligne, on les peut regarder comme étant toutes connues, ou inconnues. Cela fait, on exprimera en termes Algebriques, les veritez que l'on veut démontrer, & on cherchera des équations par les proprietez du triangle rectangle, & des triangles semblables, ou autrement, que l'on ramenera par le moyen des substitutions aux mêmes expressions, que celles qui expriment les veritez dont il s'agit, & alors le Theorême sera démontré. S'il arrive que tous les termes de l'équation sur laquelle on opere, se détruisent, de forte qu'il reste o = 0, le Theorême sera encore démontré : car c'est une marque que la chose est telle qu'on l'a supposée, sans qu'il foit necessaire de déterminer la grandeur d'aucune des lignes qui ont été nommées. Ceci arrive ordinairement lorsque l'on regarde les Theorêmes qu'on veut démontrer, comme des Problêmes qu'on veut résoudre. Il arrive aussi quelquefois que l'on croit résoudre un Problême, & il se trouve par la mutuelle destruction des termes de l'équation, que c'est un Theorême, qui se trouve aussi par ce moyen démontré. Tout ceci sera éclairci par les exemples qui suivent. EXEMPLE I. Theorême. FIG. 37. 1. SI une ligne droite donnée AB, eft coupée également en C, & inégalement en D; le quarré de la moitié CB moins le quarré de la partie du milieu CD, sera égal au rectangle des deux parties inégales AD, D B. Ayant mommé AC, ou CB, a; CD, b; AD, sera; a+b; & DB, a-b. Il faut démontrer que aa - bb (CB'-CD')=AD × D B. DEMONSTRATION. EN multipliant a+b (AD) par a-b, (DB) l'on aura aa-bb (CB*—CD')=AD × DB. C. Q. F. D. EXEMPLE II. Theorême. FIG. 38. 2. SI une ligne droite AB, coupée par le milieu en C, eft prolongée en D d'une grandeur quelconque. Je dis que le quarré de CD moins le quarré de CB, fera égal au rectangle de la toute AD, par la partie prolongée BD. Ayant nommé CD, a; AC, ou CB, 6; AD sera a+b; & BD, a-b. Il faut démontrer que aa - bb (CD'—CB')=AD x DD. DEMONSTRATION. SI l'on multiplie a+b (AD) par a-b (DB), l'on aura aa - bb (CD — CB2) = AD × DB. C. Q F. D. On démontrera de même les autres propositions du second Livre d'Euclide, où il s'agit des proprietez des lignes divisées de différentes manieres. EXEMPLE III. 3. DANS tout triangle obtufangle ABC, dont l'angle FIG.39. ABC eft obtus, fi l'on prolonge un des côtez BC du côté de B, & que l'on abaisse du point A fur le prolongement, la perpendiculaire AD; le quarré du côté AC opposé à l'angle obtus, fera égal à la somme des quarrez des deux autres côtez AB, BC, & outre cela à deux rectangles dont BC est un côté, & le prolongement BD, l'autre. Ayant nommé AC, a; AB, b; BC, c; DB, d; AD, g; DC fera C+d. Il faut prouver que aa (AC)=bb + cc + 2cd (AB +BC+2bc × BD). DEMONSTRATION. A Cause du triangle rectangle ADC; aa (AC)=gg (AD)+dd+2cd+cc (DC*): mais le triangle rectangle ADB donne bb=gg + dd; mettant donc en la place de gg + dd sa valeur bb; l'on aura ad C. Q. F. D. = 66 +2cd+cc. Si l'on fait DB (=d)=0, le point B tombera en D, FIG.40. & l'angle ABC fera droit; & l'on aura aa=bb+cc:car 2cd devient nulle à cause de d=0: mais si l'on fait d negative, & moindre que c = BC; le point D tombera entre B, & C; & partant les deux angles ABC, & C feront aigus, & l'on aura en changeant le figne du terme où d se rencontre, aa=bb-2 2cd+cc, ou aa+2cd=bb+c“, ou AC*+ 2BC × B D = A B2 + BC'; c'est-à-dire que dans tout triangle, le quarré du côté opposé à un angle aigu, avec deux fois le rectangle du côté sur lequel tombe la perpendiculaire, par la partie interceptée entre la perpendiculaire, & cet angle aigu, est égal à la somme des quarrez & des deux autres côtez. EXEMPLE IV. Theorême. Fig. 41. 4. SI dans un cercle ABGD, dont le centre eft C, l'on mene librement deux droites BE, DF qui se coupent en O. Je dis que BO x OE=DO x OF. L'on menera par le point o, le diametre ACOG, les rayons CB, CD, & les perpendiculaires CI sur BE, & CK fur DF; & ayant nommé les rayons CA, CG, CB, CD, a; BI, ou 1E, b; DK, ou KF, c, OI, d; OK, f; CI, g; CK, h; CO, k; BO fera, b+d; OE, b-d; DO, c+f; & OF, c-f. Il faut démontrer que bb - dd (BO x OE) = cc - ff (DO × OE). DEMONSTRATION. Les triangles rectangles CIB, CKD, CIO, CKO, donnent 10. aa bb+gg, 2°, aa = cc + hh, 3°. kk =dd+gg, 4°. kk=ff+bh; & faisant évanoüir aa dans les deux premieres équations, kk dans la troisfiême & quatriême, l'on aura 5°. bb+gg = cc+hh, 60. dd+gg =ff+bh; & foustrayant les deux membres de la sixiême équation des deux membres de la cinquiême, le premier du premier, & le second du second, il viendra bb - dd = cc-ff. C. Q. F. D. EXEMPLE EXEMPLE V. Theorême proposé en forme de Problême. 5. UN cercle AEBF, dont le centre est C, & un diame- FIG. 42. tre AB étant donnez; il faut trouver au dedans du cercle le point D, d'où ayant abaissé la perpendiculaire DI fur le diametre AB; & par où ayant mené une droite quelconque EDF; ED × DF + DI' foit= AI x IB. Ayant mené par Dla droite GDH parallele à AB; puisque GD × DH=ED × DF, on peut mettre GD x DH en la place de ED × DF; de forte que le Problême se réduit à trouver le point D; en forte que GD x DH + DI = AI × IB. Ayant supposé le Problême résolu, mené CK parallele à ID, le rayon CH, & nommé les données CH, AC, ou CB, a; & les inconnues CI, ou KD, x; CK, ou ID, y; AI fera a-x; IB, a+x; KH, √aa-yy; DH, Vaa-yy + x; DG, Vaa-yy-x, & les conditions du Problême donneront aa - yy - xx (GD × DH)+ (DI2) = aa-xx(AI × IB) qui se réduit à o = 0. C'est pourquoi le Problême proposé est un Theorême, & comme il ne reste aucune ligne pour déterminer la pofition du point D; il suit que l'on peut prendre ce point par-tout où l'on voudra dans le cercle. yy L'on auroit pû démontrer ce Theorême comme le pré cedent, & l'on pourroit aussi démontrer tous les Theorêmes, comme on a fait celui-ci, en les considerant comme des Problêmes. I |