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La nourri

tire de la nourriture & de l'éducation ture & l'éque l'on a donnée à l'enfant. La nourriture eft une feconde naiflance: quand

ducation

font les

filiation.

preuves de la les titres de la premiere font obfcurs on les explique par la feconde. C'eft ce que le pauvre dans fon interrogatoire à bien fçû dire: lorsqu'on lui a demandé s'il étoit le pere de cet enfant eft bien pere, a-t'il répondu, qui nourrit.

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Un fait important, qui eft prouvé par l'information, c'eft qu'en enlevant à Monrouffeau fon fils on ne l'arrêta point d'abord. Ce fut la conftance à demander fon fils qui fut la caufe de fon emprisonnement. Si la fuite fait la honte des coupables, la fermeté fait la gloire des innocens. Si la fuite eft un effet de la crainte, qui eft inféparable du crime, la fermeté eft une marque du repos & de la tranquillité du cœur, qui eft la récompenfe de la vertu.

Pourquoi donc Monrouffeau n'a-t'il pas pris la fuite? Parceque la confcience, qui eft le premier mobile de notre crainte & de notre affurance, ne lui reprochoit rien qui l'obligeât de fe dérober aux yeux de la Juftice.

Voulez-vous encore une feconde

raifon? C'est que fon fils ne pouvoit pas fuir avec lui. On lui laiffoit la liberté en apparence; mais on l'enchaînoit en retenant fon fils. Les Jurifconfultes difent que le fils eft une partie du corps du pere, (a) comme il est dit dans la Loi, (b) au Livre XI. du Code; ou comme il eft dit aux Inftitutes; (c) de forte que le pere court plus de rifque quand la vie de fon fils eft expofée, que le fils même.

Il ne faut donc pas s'étonner fi Monrouffeau a fuivi fon fils par tout où on le traînoit. Eft-on furpris lorfqu'une partie du corps étant entraînée, on voit le refte du corps emporté par le même mouvement?

Dans la prifon même, pour avoir sa liberté, Monrouffeau n'avoit qu'à dire que l'enfant n'étoit pas fon fils, qu'il l'avoit rencontré dans le chemin. Il n'y avoit point de preuve du vol: cette déclaration fermoit la bouche aux Officiers les plus féveres: il étoit renvoyé abfous. La force de fa tendreffe paternelle lui a fait foutenir toutes les rigueurs de la prifon, & ne lui a pas

(a) Pars quodammodo corporis ejus.

(b) Cùm fcimus de Agricolis.

(C) Ut penè per filii corpus pater magis quam filius periclitetur.

permis de recouvrer fa liberté par la perte de fon fils. Il n'a donné dans aucun des pieges que les Juges lui ont tendus. M. de Fourcroy fait voir enfuite que la dénonciation de Jacques le Moine, faite à Vernon, eft irréguliere, mendiée, faite après coup, antidatée, fans engagement, fans garantie.

Il dit que lorfque l'enfant, dans fon interrogatoire, appella Jeanne Vacherot fa mere, il avoit été inftruit comme un Perroquet. Il ne lui avoit point donné ce titre auparavant, lorf qu'il fut d'abord amené tumultueusement chez elle. La vérité est enfin førtie de fa bouche dans fon dernier interrogatoire à Paris, parcequ'il n'a...voit pas devant les yeux les féducteurs..

M. de Fourcroy ne s'attache point à réfuter les dépofitions des vingt-un témoins de l'information: il fe repofe fur Meffieurs les Gens du Roi: il oppole à la preuve littérale la poffeffion de Monrouffeau Il remarque qu'on a 'fait dépofer l'enfant, comme s'il eût eu une connoiffance claire & diftincte dr ce qu'il auroit vû à l'âge de quatre ou cinq ans, s'il eût été Jacques le Moine. Quoiqu'il y eût un grand nombre de parens à Vernon, le Juge

n'a ouï que deux parentes. Il faut que toute la parenté ait confpiré avec les Juges contre cet enfant: ou bien il faut que ce foit un enfant étranger, qui ne tient point à cette parenté. La veuve Cretté qui étoit parente, chez qui Jeanne Vacherot demeuroit quand elle étoit à Vernon, n'a point reconnu l'enfant ; & il ne l'a point reconnue: & elle a dit que Jacques le Moine étoit l'enfant le plus chéri de fa mere. Qu'on nous dife comment l'on peut accorder cette dépofition avec la furieuse averfion que cette mere doit avoir pour cet enfant, fi elle ne veut pas le reconnoître. Aucun des témoins qui ont reconnu l'enfant n'a figné la dépotion, & n'a été interpellé de figner. C'est une nullité effentielle. Monrouffeau eft interrogé une feconde fois; il perfifte à foutenir que l'enfant eft fon fils: on lui met les fers aux pieds; il ne fe rétracte point. M. de Fourcroy le compare à Cefetius, à qui Cefar commanda d'abdiquer l'un de fes trois enfans: il répondit qu'on pouvoit les lui ravir tous trois; mais qu'il n'en abdiqueroit jamais pas un.

Trois interrogatoires conformes de Monrouffeau font des preuves certai

nes de la vérité qu'il a dépofée. L'enfant a répondu à Paris, lorfqu'on lui a demandé fi Jeanne Vacherot étoit fa mere, qu'il voudroit bien être fon enfant; mais qu'il ne l'eft pas. Ne voiton pas clairement que le changement de Juges a changé le langage de cet enfant? En un mot, l'enfant parle à Paris: onle faifoit parler à Vernon. Ou plûtôt, il n'a point parlé: on a écrit ce qu'il n'a point dit. Il répond ici qu'il s'appelle Louis Monrouffeau: il dit le nom propre de fon pere, de fa mere ; le décès de fa mere à l'Hôtel-Dieu de Tours: il rappelle les endroits où il a paffé. On lui demande s'il eft un gueux: il répond qu'il falloit bien qu'il le fût. Enfin, quelle eft fa derniere réponse qui couronne toutes les autres, & qui feroit digne d'une naiffance plus heureufe. On lui demande s'il veut toujours aller avec Jean Monrousseau mendier fa vie : il dit qu'il le falloit bien, puifque c'étoit fon pere; qu'il ne vouloit pas renoncer fon

pere.

Seneque, dans la premiere controverfe du fecond Livre, a fait parler de même le fils d'un pauvre qui ne veut point quitter fon pere, quoiqu'un

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