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aux hommes; je le crois comme eux; & c'eft; à mon avis, une preuve que ce qu'ils enfei * gnent, n'est pas la vérité. Les Théologiens difputent auffi; mais ils ne difputent pas fur le fondement de leur foi, fur les articles effentiels de leur Religion; en un mot, ils ne fe contredifent pas dans l'enfeignement public des Peuples: fi Pierre avoit prêche un Dieu, & Paul le Matérialisme ; fi Jean avoit dit, Jefus-Chrift eft reffufcité, & que Jacques l'eût nié, il n'y auroit point aujourd'hui de Chrétiens dans le monde.

S. V I.

D. Quand on fuppoferoit la Religion naturelle fuffifante pour honorer le Créateur d'un vrai culte, pour former les vertus & pour en aflurer la récompenfe, pourroit-elle devenir la Religion des Peuples?

R. L'homme ne s'en contenteroit pas; son ef prit & fon cœur demandent effentiellement un culte cérémoniel & analogue aux fens, fondé fur une révélation vraie ou fauffe. C'eft au moins ce que nos Philofophes affurent par-tout. Pourquoi donc établir une thèse dont on prêche l'im poffibilité ?

CHAPITRE II L

La Révélation.

D. LA RÉVÉLATION eft néceffaire; mais com

ment en démontrez-vous l'existence?

R. Par fa néceffité même. Un Dieu fage & bon n'a pu refuser à fon plus bel ouvrage une

lumiere néceffaire à fa félicité & à la connoiffance des devoirs envers fon Auteur. C'eut été abandonner fa créature, comme les Tartares abandonnent un ennemi au milieu des déferts, & les autruches leur progéniture fur les fables brûlants de l'Afrique.

D. Cette multitude de cultes oppofés qu'il fe glorifient d'avoir Dieu pour auteur, & de pofféder le dépôt précieux de la révélation, ne faitelle pas un argument contre l'existence de la ré

vélation?

R. De ce qu'il y a plufieurs prétendants à une poffeffion, une dignité, un Royaume, doit-on inférer que les objets de ces prétentions font chimériques, & qu'il n'y a ni Royaume, ni poffeffion à prétendre? La comparaifon eft exacte dans toutes fes parties, & montre que cette objection est une preuve folide & naturelle en faveur de la révélation. On a toujours cru que le culte de la Divinité devoit être enfeigné par elle-même. Si c'est là un préjugé, il est d'une efpece bien finguliere, auffi ancien que le monde, auffi étendu que la terre habitée, plus durable que tous les ouvrages de l'induftrie, que tous les établiffements de la politique. Un fentiment fi général & fi profondément enraciné, eft la voix même de la nature, ou le fouvenir ineffaçable d'une tradition perpétuée depuis les Auteurs du genre-humain, dans toutes les branches de leur poftérité. Il n'eft pas étrange que ce fentiment, qu'on trouve par-tout, ait reçu de fauffes applications; mais pour que le fond même en fût faux, il faudroit de deux chofes l'une, ou que l'homme eût été originalrement formé avec une pente invincible vers l'erreur, ou du moins que la vérité, pour laquelle il étoit né, fût fortie

Crudelis qua truthio in deferto. Jer. Thren. iv. 3.

du monde auffi-tôt qu'elle avoit pu y paroître, fans qu'on puiffe efpérer de l'y voir rentrer.

CHAPITRE I V.

La Tolérance.

S. I.

D. EN CONVENANT que l'idée d'une révélation doit foutenir & expliquer les dogmes de la Religion naturelle, ne peut-on pas croire que la nature de cette révélation eft indifférente, & qu'il fuffit qu'elle perfuade?

R. Il y a un grand nombre de cultes fondés fur des révélations fi évidemment abfurdes, qu'il est impoffible à un homme fenfé de s'en perfuader la vérité; & des cultes de cette nature peuvent-ils plaire au fouverain Maître du monde, au principe de toute fagefle & de toute raifon? Il y a des cultes infenfés dans leurs dogmes, corrupteurs dans leurs rits, barbares dans leurs facrifices; qui peut dire férieusement que Dieu accepte ceux-là?

&

que voulant être honoré, il voit du même œil, & les hommages rendus à des êtres inanimés, phyfiques ou faits de main d'homme, à des animaux, à des génies malfaifants, à de prétendues divinités fouillées des vices les plus infames, & les hommages qu'on lui adreffe comme au Créateur de l'univers, au Maître unique & tout-puiffant de la nature entiere, à la juftice, à la bonté, à la fagefle, à la fainteté par ellence?

D. La tolérance ne feroit-elle pas raifonnable, fi elle se bornoit aux cultes qui reconnoissent un Dieu

Dieu unique, & dont les dogmes n'ont rien de contradictoire à fes attributs?

R. Si, à la foi d'un Dieu unique, on ajoute la foi d'un grand nombre d'erreurs, ce mêlange ne peut que déplaire à la Divinité, qui exige effentiellement un culte pur, faint, & conféquent dans toutes fes parties. Quoi! le Chrétien qui rejette Mahomet comme un impofteur; le Mahométan qui l'honore comme le plus grand des Prophetes; le Juif qui a crucifié Jefus Chrift comme un blafphémateur; le Chrétien qui le reconnoît pour le Meffie prédit par les Prophetes & defiré par les Nations; le Déifte qui nie la révélation; le Juif, le Chrétien, le Mahometan, qui L'admettent; le Chrétien qui adore Jefus-Chrift comme le Fils de Dieu, confubftantiel à fon Pere; le Socinien, qui le met dans la claffe des créatures: tous enfin offriroient-ils à la Divinité un hommage qui lui fût également agréable? Éloignons de nous cet horrible blafphême. L'Etre fuprême ne peut approuver des cultes qui fe détruifent. C'est ici le cas de dire, avec l'Apôtre, que la juftice & l'iniquité, la lumiere & les ténèbres, la foi & l'infidélité, ne peuvent s'allier en aucune façon (a). Une Religion tolérante n'est pas un culte, c'eft la deftruction de tous les cultes. Un des plus grands hommes qu'ait eu le Calvinisme en France, & qui avoit été élevé dans le Tolérantisme, trouva dans l'examen de ce systême les premiers motifs de fon retour à l'Eglife, & de fa converfion. Il comprit & démontra enfuite dans

(a) Quæ enim participatio juftitiæ cum iniquitate? aut quæ focietas luci ad tenebras? quae autem conventio Chrifti ad Belial? aut que pars fideli cum infideli? 2. Cor. 6.

R

M. Papin.

Œuvres de un excellent Ouvrage, que la premiere conféExam, de la quence de cet affreux fyftême, étoit le renverfe Tolérance. ment entier & l'anéantiffement de la Religion.

S. I I.

D. Pourquoi la Tolérance détruiroit-elle tous les cultes ?

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R. 1. Parce que l'indifférence pour tous les cultes contredit l'idée d'un Dieu unique, fage, faint & vrai.

2. Parce qu'elle fuppofe dans l'homme un mépris formel de la vérité, & une indolence à s'inftruire incompatible avec fes devoirs envers

Dieu.

3. Parce que la chaîne des vérités eft indivi fible, tous les anneaux fe tiennent enfemble. Doutez d'un feul dogme révélé, vous ébranlez la croyance de tous les autres.

D. Sur quoi eft fondée ce que vous dites là de l'indivifibilité des vérités religieufes? L

R. Sur la raifon & fur l'expérience. La raifon me dit, que fi je ne me tiens à l'autorité infaillible de la révélation, il n'y a plus de raisonnement ni d'autorité qui puifle fixer ma croyance; & que fi une fois, en matiere de Religion, j'écoute mes caprices & mes goûts, fi je m'érige en juge & en cenfeur des ouvrages & des attributs de Dieu, l'abyme des doutes & des erreurs eft dorénavant pour moi fans barriere & fans fond. L'expérience confirme ce raifonnement par les exemples les XI. Lettre plus multipliés. « Les Miniftres Proteftants, dit de la Mont. J. J. Rouffeau, ne favent plus ce qu'ils croient, ni ce qu'ils veulent, ni ce qu'ils difent.... On Quidam ab- » leur demande fi Jésus-Chrift eft Dieu; ils n'ofent répondre....On leur demande quels » mysteres ils admettent; ils n'ofent répondre...

errantes eon

verfi funt in

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