Imágenes de páginas
PDF
EPUB

dente, n° 4, pour faire évanouir toutes les ténèbres de ce prétendu mystère (a). Au refte, après les différences que nous avons remarquées entre ces fortes de régularités & celle des œuvres de Dieu, il est inutile de s'arrêter davantage fur cette matiere.

S. II I.

D. Si le hafard avoit effectivement produit le monde, que faudroit-il penser d'un principe fi admirable & fi puiffant?

R. L'Auteur des Lettres juives prétend que les Athées, en reconnoiffant le hafard pour le créateur & le confervateur du monde, ne peuvent fe difpenfer de lui rendre un culte ; &, quoique cette affertion puiffe paroître plus plaifante que folide, elle fert admirablement à faire fentir l'abfurdité du fyftême des atomes. « Si je croyois le systême

d'Epicure, dit-il, chaque jour en examinant le » cours du foleil, en le voyant paroître fur notre

(a) Voici ce que dit un Manufcrit que nous avons actuellement fous les yeux. Notare forfan juvat, 1o ad plantas multigenas, maximè qualiter in femine ordinantur, hafce figuras pænè omnes alludere, 29 Spermaticis fpiriti bus plantarum aliarumque etiam rerum aëra effe plenum. Vide M. Subt, part 2, L. 12, c. 7. 3.o Illos fpiritus eo ordine, quo vel in femine vel alid re clauduntur atque ex illá profeci funt, fe collocare & figere, ut in Palingenefi conftat: & explicatur parallelifmo cum foco radiorum. Vide Mund, Subt. p. 2, L. 12, c. 5. Experim. 1. 4. Spiritus illos plafticam vim in omnem materiam mollem fibi fubjectam & commixtam exercere, ut conftat in petrificationibus (Mund. Subt. p. 2, L. 8. Modus tertius.) & maximè in plantis Antropomorphis. Ibid L. 12, c. 9. 5.o In locis potiffimum, ubi vapores multi & varii; ut in latrinis, ejufmodi figuras fpedari, &c. &c.

[ocr errors]
[ocr errors]

horifon & s'acheminer à grands pas vers les Antipodes, je m'écrierois : je te falue, ó hafard » éternel, dérangement incompréhenfible, confufion » admirable, qui maintient l'ordre & l'arrangement! fouffre que je te rende les hommages que » d'autres mortels aveugles rendent à un Dieu tout »bon, tout puiffant & tout fage.

[ocr errors]

ARTICLE V.

Fécondité de la Matiere.

S. I.

D. A U-LIEU de recourir à la collifion des ato-
mes pour produire un monde, n'est-il pas plus
fimple d'attribuer la fécondité à la matiere, &
d'en faire la mere de toute chofe?

R. Je ne fais fi cela feroit beaucoup plus fim-
ple; mais je fais que cela ne feroit pas plus rai-
fonnable. Qu'est-ce que cette fécondité de la ma-
tiere? I n'eft pas aifé de faire un fens de cette
expreffion. La matiere effentiellement inerte &
pallive, n'a ni mouvement, ni action, ni vie, ni
fécondité, elle ne peut que fervir & obéir.

D. N'eft ce pas une propofition reçue, que la nature eft d'une fécondité inépuifable, qu'elle eft le principe & la mere de tous les êtres?

R. Il faut convenir de la fignification des mots. La nature eft le fyfteme des Loix établies par le Créateur pour l'existence des chofes & la fuccef Tom. XII, fion des étres. C'eft la fage définition qu'en donne M. de Button & cette définition une fois reçue, la nature eft féconde fans doute: mais la nature n'est pas la matiere, ou, fi l'on veut, c'est la ma

P. iij, iv.

[ocr errors][ocr errors]
[ocr errors]

[ocr errors]

tiere mue, dirigée, employée felon les loix dictées par la fageffe & la puiflance du Créateur. «La nature n'eft point une chofe, ajoute M. de Buffon, car cette chofe feroit tout: la nature » n'est point un être, car cet être seroit Dieu; mais on peut la confidérer comme une puillance » vive, immenfe, qui embrafle tout, qui anime tout, & qui fubordonnée à celle du premier Être, n'a commencé d'agir que par fon ordre, & n'agit encore que par fon concours ou fon confentement. Cette puiffance eft de la puiffance divine la partie qui fe manifefte.... Miniftre de fes ordres irrévocables, dépofitaire de »fes immuables décrets, la nature ne s'écarte jamais des loix qui lui ont été prefcrites; elle n'altere rien aux plans qui lui ont été tracés, &, dans toutes les œuvres, elle préfente le sceau de l'Eternel, &c. &c.

[ocr errors]

D

S. I I.

D. S'il eft vrai que la nature ne viole pas le plan du Créateur, & qu'elle n'eft autre chose que le fyftême de fes Loix, pourquoi produit-elle des monitres de toute e pece?

R. Il n'y a point de violation de régles où il n'y a point de régles; point de monftres où il n'y a point de figures déterminées & deffinées fur un plan général. Je n'examine pas pourquoi Dieu, permet ces écarts paffagers aux principes exécuteurs de fes décrets; ni fi ces écarts même ne relevent pas le mérite d'une opération réguliere & parfaite dans toutes les parties, égale dans fon âge à la durée des fiécles entaffés, dans fon étendue à toutes les efpeces des êtres exiftants; ni li les monftres, au moins ceux de la race humaine, ne

font pas la fuite de quelque trouble étranger & poftérieur à la création; ni fi l'attention & les foins de l'homme ne peuvent point prévenir la plupart des monftruofités de fon efpece (a); ni i un fiftême de Phyfique, où les monftruofités feroient impoffibles, ne renverferoit pas l'état actuel de la nature, & toutes les loix établies pour la réproduction des êtres & la confervation des efpeces (b): il fuffit que les monftres fuppofent l'exiftence d'un type tracé avec deffin, & donné pour modèle à toutes les productions de la nature felon l'exigence des efpeces & le maintien de l'état actuel du monde.... Dans les monftres même les traces du plan général & du modèle des efpeces font fenfibles; ce font, dit un Phyficien célèbre, des morceaux d'une architecture admirable, quoique détachés du corps de l'édifice (c).

[ocr errors]

(a) Voyez la Théologie-phyfique de Derham. Des Effarts, Traité de l'éduc, corp. des enfants, p. 18 & fuiv. Muis, inveftig. Fabricæ, quæ in partibus mufculos componentibus extat. Præfat.

(b) On peut voir la-deffus S. Aug. L. 12 de Civit. Dei, C. 2. 5.-Stengelius, de monftris. - Schott, Phyf. cur. T. 2 , part. 2, L. 5. - Bonnet, Contemp. de la Nat. T. r, p. 177, &c. Voici comme un Philofophe fage & profond s'exprime fur ce fujet, Natura autem mutabilis, Deo obtemperans, etfi juxtà inferioris mundi feriem à folita lege defledat, rapitur tamen Divini Spiritus vi, jam feipfå propè divinior facta, quippe que legi antiquiori & fanctiori Dei porrigens manum; toti fe fubjicit totam, & vel deerrando ad deftinatum à Deo collimat finem. Corn. Gemma in Cofmo-criticis. L. 1, c. 6.

(c) Exhibet fe ubique harmonia inordinata, confufio ordinatiffima; natura femper variata femper eadem: architedura ordo decompofitus, fed artificii infiniti. Scheuchzer, Phyf. fac. T. 5, p. 1045. Buffon appelle cet ouvrage puéril,& fait pour amufer des enfants. Cette cenfure vraie

D. Des géants de trois à quatre cents pied occupent-ils quelque place dans le plan du Créa

teur ?

R. S'il y avoit eu des individus de cette taille, ce feroit des écarts qui entreroient dans la réflexion que je viens de faire; mais tous ces géants de 400, de 140, de 120 pieds, font des exagérations puériles. On peut s'en convaincre par les obfervations d'un homme qui n'a peut-être eu que trop de goût pour les traditions populaires (d). L'Ecriture rapporte que Goliath étoit haut de dix pieds fept pouces: Og pouvoit en avoir autant (e): ce font apparemment les plus illuftres & les plus vrais de tous les géants. Theudobochus eft encore un monftre imaginaire (f). Les offements que l'on nous montre comme des reftes de géants, font des os de baleine, d'éléphants, de rhinoceros, de chameaux, &c. Turner a montré à Lon

à certains égards, eft trop forte pour ne pas faire foupçonner quelque jaloufie de métier. Les idées fyftématiques de Buffon ne le cedent en rien à celles de Scheuchzer pour le hardi & l'arbitraire.

(d Mund. fubt. part. 2, p. 58. On peut confulter auffi Schott. Phyf. cur. T. 1, p. 512. Diet, encycl. art. Géant. Calmet, Differt. fur les Géans, Comment. T. 1, p. xxij, édit. 1734.

(e) Son lit étoit de quinze pieds quatre pouces & demi, fans doute qu'il y étoit à fon aife, les Rois ne fe gênent pas. Ces lits étoient quelquefois une mefure trompeufe, comme on va le voir ici par l'Hiftoire d'Alexandre.

(f) Ses os ont été reconnus pour des os d'éléphants. Tout ce que l'on a raconté du tombeau & de l'épitaphe de ce Theudobochus, ou Theudolochus, n'eft qu'une impofture, qu'une vifion d'Antiquaire. Voyez le Didion. d'Hif toire naturelle de Valmont, art. Géant, édit. 1769. La Gygantomachie de J. Riolan, en 161}, &c. Dom Calmet a donné fon fuffrage à ce conte.

« AnteriorContinuar »