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R. 1. Du moins faudra-t-il fuppofer un Dieu qui a créé la matiere attractive, ou bien admettre une matiere éternelle, & toutes les abfurdités qu'elle renferme. 2.° L'Attraction a-t-elle formé le monde de toute éternité, ou bien depuis un certain nombre de fiécles? Si vous adoptez la premiere de ces propofitions, vous adoptez une fucceffion infinie, & par conféquent une abfurdité. Si vous admettez la feconde, je de- v. l'article mande pourquoi cette attraction a été oifive fuivant. durant toute une éternité; il en faudra néceffairement revenir à un premier Moteur & Directeur de cette attraction créatrice.

D. ne peut-on pas dire, que fuppofé la matiere & l'attraction, il n'eft plus néceffaire de recourir à une intelligence fuprême pour expliquer les merveilles de la nature?

R. En fuppofant la matiere & l'attraction, on fuppofe un Dieu, qui les a produites, & par-là on réfute l'Athéifme. Au refte, il eft très ridicule, 1.o de croire que Dieu ait donné commiffion à l'attraction de former le monde, & qu'il fe foit contenté de la laiffer agir; 2.° de prétendre expliquer par l'attraction tous les effets de la nature; de lui attribuer la production de l'homme, des animaux, des plantes, &c. ( a ). S'il y a vingt mille fortes de plantes & autant d'animaux, voilà, 40000 loix de mouvement; puis il faudra multiplier ces Hiftoire d 40000 loix par autant d'autres fubordonnées qu'il Ciel. T. I, y aura de différents vaiffeaux de chaque efpece, Tome 1,

(a) On peut voir les Obfervations philofophiques fur les fyftemes de Newton, &c, imprimées à Liege, chez, Balompierre, pag. 96, 97, 100.

Préf. xvij.

P. 359, &c.

ne,

verbum

nem & gene

rationem ve

ritas tua :

manet. Ordi

natione tuâ

le même mouvement ne pouvant produire que les mêmes organes. Quel ordre y auroit-il encore aujourd'hui dans le monde, fi le mouvement & les attractions pouvoient produire quelque chofe? Les anciennes natures fe diffiperoient & feroient place à de nouvelles. De nouveaux cahos: ou de In ter- nouvelles combinaisons devroient former de nounum Domi- veaux foleils. Mais depuis qu'il y a des hommes, quel uum perma- changement eft-il arrivé au monde? Le mouve net in Calo, ment varie ce qui eft fait, mais il n'a rien proIn generatio- duit.... Si l'Ecriture à la narration fimple & augufte de la création, avoit fubftitué les imagina fundaji ter- tions de nos Philofophes; des atomes raffemblés ram, & per- au hafard, devenus un tableau magnifique & inimitable; une attraction qui fait un anneau à Saperfeverat turne, une lune à la terre, &c. qui forme le monde dics. Pf. 118. entier; une comete qui fillonne le foleil, & en fait partir des étincelles, lefquelles deviennent des planetes; une autre comete qui eft devenue notre terre; une autre qui a caufé le déluge par fa queue; une autre qui nourrit le foleil de fon corps, en s'y incorporant en vertu de l'attraction; une autre qui caufera un embrafement général à la fin des fiécles, &c. Alors ces Meffieurs auroient déployé tout le talent qu'ils ont pour le ridicule, Penfées de toutes les richelles de la fatyre. Tous les PhiloM. de Volt. fophes, dit M. de Volt. qui font un monde, ne » font gueres qu'un monde ridicule....ils fe font mis à la place de Dieu. Ils penfent créer un uni apart. p. 4.vers avec la parole..... Les Philofophes qui font des fyftêmes fur la fecrete conftitution de l'univers, font comme nos Voyageurs qui vont à Conftantinople, & qui parlent du Serrail; ils n'en ont vu que les dehors, & ils prétendent. favoir ce que le Sultan y fait.... Nous pefons

2 part. p. 20. édit. 1765.

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la matiere, nous la mefurons, nous la décompofons, & au-delà de ces opérations groffieres, fi nous voulons faire un pas, nous trou»vons dans nous l'impuiffance & devant nous l'abyme.... Plus je vais en avant, & plus je fuis » confirmé dans l'idée que les fyftêmes font pour les Philofophes ce que les Romans font pour » les femmes. Ils ont tous la vogue les uns après les autres, & finiffent tous par être oubliés.»

D. L'attraction n'eft-elle pas le principe de toutes les révolutions céleftes, qui font une des grandes merveilles de l'univers?

R. Soit (a); mais, 1.° cette attraction eft-ello effentiellé aux corps, ou n'est-ce qu'une loi du Créateur, comme le dit Newton? Dans ce dernier cas, le mérite de l'attraction eft étranger à la matiere & à l'attraction elle-même. 2.° Eft-ce l'attraction qui a formé la terre, le foleil, les planetes & leurs fatellites? (b).... Il eft clair que les

(a) Voyez les Obfervations que nous avons déja citées. Nous parlons ici dans le goût & le ftyle du fiécle. Nous n'ignorons pas que tout cela mériteroit un examen dont le préjugé de la Philofophie dominante rend les hommes incapables. Mais, pour le faire écouter, il faut adopter ce qu'il feroit inutile de contredire, & ne raisonner que d'après ce qui eft généralement reçu.

(b) Je fais qu'on a imaginé des Romans où l'attraction a fait tout cela; mais je fais auffi ce que les hommes fenfés en ont dit. Je crois favoir de plus que les Auteurs mêmês de ces ridicules imaginations s'en font moqués dans le fond de l'âme. Mais un des principaux objets de la gloire philofophique, eft de tromper des lecteurs crédules & prévenus. « Quand les Philofophes feroient en état » de découvrir la vérité, qui d'entre eux prendroit intérêt à elle? Chacun fait bien que fon fystême n'est pas mieux fondé que les autres; mais il le foutient, parce

régles de l'attraction dépendent de la densité du voš lume & de la conftitution de ces globes.... Si

la terre étoit plus ou moins proche du foleil, elle Numquid feroit brûlée ou glacée; il en eft de même des auoftendifti auTora locum 7 tres planetes qui ont chacune la place & la difJob. 38. tance que leur nature exige. Ce n'eft pas à l'attrac

tion qu'elles font redevables de cette heureuse pofition. 3. Eft-ce l'attraction qui a placé les planetes dans leurs pofitions refpectives pour être attirées, & pour rouler de telle ou de telle maniere, &c? 4. L'attraction fans la force de projection ne feroit que précipiter les planetes dans le foleil; or, d'où vient cette force de projection que la Phyfique moderne a cru devoir affocier à Emile, t. 3, l'attraction? Que Newton nous montre la main, dit l'Auteur de l'Emile, qui lança les planetes fur la tangente de leurs orbites. Voilà bien des chofes en aftronomie, & des chofes fondamentales qu'il faut chercher ailleurs que dans l'attracEffai de tion. Leibnitz difoit avec raifon, que les PhyfiThéodicée, ciens avoient beau expliquer, & les Géomètres M. 345. faire des calculs, qu'il falloit reconnoître quan

R. 48.

tité de choses qui n'étoient rien moins qu'un réfultat de Phyfique ou de Géométrie. Newton a bien des fois déclaré la même chose. La fimple vue de la nature découvre la vérité de ces affertions.

venant à

qu'il eft à lui. Il n'y en a pas un feul qu, connoître le vrai & le faux, ne préférât le menfonge qu'il a trouvé, à la vérité découverte par un autre. Où eft le Philofophe qui, pour fa gloire, ne trompe roit pas volontiers le genre humain? Où eft celui qui, » dans le fecret de fon cœur, fe propofe uu autre objet que de fe diftinguer? pourvu qu'il s'éleve au-deffus du vulgaire, pourvu qu'il efface l'éclat de fes concurrents, que demande-t-il de plus ? L'effentiel eft de penser autrement que les autres. Emile, t. 3, p. 30.

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ARTICLE VII.

ARTICLE VII.

Eternité du Monde.

D. NE SEROIT-IL pas expédient de fubftituer

à tous ces fyftêmes ruineux une supposition simple, favoir l'éternité du monde, & une fucceffion infinie d'êtres qui le font produits les uns les au→

tres?

-R. Cette fucceffion infinie renferme une contradiction évidente.

D. Ne s'eft-il pas trouvé des Théologiens qui l'ont cru poffible, & qui ont foutenu que Dieu pouvoit créer un monde de toute éternité?

R. Ces Théologiens avec de fort bonnes intentions faifoient de fort mauvais raifonnements. S'ils avoient considéré, 1.° que tout ce qui eft créé paffe effentiellement du néant à l'être, ils auroient conclu que tout ce qui eft créé n'a point été toujours. 1. S'ils avoient bien conçu la nature d'une fucceffion éternelle, ils n'en auroient jamais affirmé la poffibilité. Au refte, ces Meffieurs ne raifonnoient ainsi qu'en profeffant l'existence d'un Être Créateur, & leur fentiment ne peut favori fer les Athées.

D. Si une fucceffion éternelle de générations futures n'eft point impoffible, pourquoi une fuc ceffion de générations paffées le feroit-elle ?

R. Il n'y a point de comparaifon à faire entre les générations paflées & les générations futures; la fucceffion future ne finiroit jamais, & les hommes qui doivent la compofer, n'auront jamais exifté tous fans quoi cette fucceffion finiroit & ne finiroit pas. Mais fi cette fucceffion eft paflée,

F

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