cre, mais de ces Peintures où les moindres détails font peints avec nobleffe, & qui ne partent que de main de Maître : j'envifage à cet égard le Poëme Epique comme une longue galerie remplie d'excellens tableaux, où après une Bataille de le Brun, on verroit le portrait d'un homme illuftre peint par Rigaud, enfuite une incendie de Raphaël, puis une Vénus de Vanlo, des animaux peints par Oudri, des fêtes galantes crayon, nées par Wateau, ici des campa gnes riantes & tous les charmes d'un jour serain, là les flots agités & toutes les horreurs de la tempète & du naufrage, avec cette diffé rence qu'ici ces divers morceaux ne partant pas du même Auteur, chacun d'eux auroit un caractére particulier qui feroit fentir que leur origine n'eft pas la même ; & que dans le Poëme Epique, tout par tant de la même main, doit con ferver une forte d'unité dans le deffein & dans l'exécution, C'est fur-tout par le mélange, la va ? Iliad. Liv. X. riété des figures, la hardieffe des métaphores, la jufteffe des com— paraisons, la propriété des termes fimples, la force des Epithétes; en un mot par l'art d'affortir les couleurs aux objets que le Poëte donne à fes pensées, ce tour vif heureux, & en même-tems naturel qui peint les chofes avec des traits fi marqués qu'on ne peut les méconnoître; mais c'eft peu de raifonner fur cette matiére, il en faut donner des exemples pour mieux expofer la force du pinceau des grands Maîtres. Rien n'eft plus noble ni mieux exprimé que la defcription du combat des Dieux dans Homere: L'Enfer s'émeut au bruit de Neptune en furie, Pluton fort de fon Trône, il pâlit, il s'é crię, Il a peur que ce Dieu dans cet affreux sé jour, D'un coup de fon trident ne faffe entrer lo jour, Et par le centre ouvert de la terre ébranlée, Ne faffe voir du Stix la rive défolée, Ne découvre aux vivans cet empire odieux Dans Virgile, Vénus veut-elle représenter à fon fils que Troye va périr de fond en comble. Quelles Images! Eneid Hic ubi disjectas moles avulfaque faxis fumum, Neptunus muros magnoque emota tridenti bem Eruit hic Juno Scaas fæviffima portas agmen Ferro accincta vocat. Jam fummas arces tritonia (refpice) Pallas fils de Dieu qui monte fur fon char Henriade Coligni languiffoit dans les bras du repos Et le fommeil trompeur lui versoit ses pa Chant 2. vots; Soudain de mille cris le bruit épouvan table Vient arracher fes fens à ce calme agréable; armes, Son Palais embrafé, tout fon peuple en allarmes, Ses ferviteurs fanglans dans la flamme étouffés, Les meurtriers en foule au carnage échauf fés, Criant à haute voix,, qu'on n'épargne perfonne , C'eft Lieu, c'eft Médicis, c'eft le Roi Il entend retentir le nom de Coligni. mille, Qui fanglant, déchiré, trainé par des Soldats, Lui demandoit vengeance, & lui tendoit les bras. Tout ce qui fuit dans ce même. chant n'eft pas moins vif. Je e puis me difpenfer d'en citer cet autre trait; c'eft Henri IV. qui parle. Onuit! nuit effroyable! ô funefte fommeil, Ibidy tiques, Le fang de tous côtez inondoit mes por- Et je n'ouvris les yeux que pour envisager gorger: |