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efclaves fcélérats & impofteurs caractéres qu'ils ont traités fuivant les moeurs de leur fiécle. Moliere en embraffant une plus grande variété de fujets, a peint par des traits encore plus forts les vices & les ridicules néanmoins on l'accufe d'avoir quelquefois outré la nature & d'être forti du vraisemblable, par exemple, dans fa piéce.de l'avare, lorfque Harpagon veut regarder dans la troifiéme main du Valet qu'il foupçonne de l'avoir volé : ce défaut & quelques autres femblables n'empêcheront pas que cet Auteur ne foit toujours regardé comme le premier comique du monde. Auffi tirerons-nous principalement de fes piéces les exemples dont nous appuyerons nos réflexions. Eh! quelle différence entre le naturel de cet Ecrivain, & l'affectation des Modernes, entre fa fimplicité & la fureur du bel efprit qui s'eft emparé du Théâtre? Une métaphifique fubtile & quinteffenciée régné dans la plûpart de nos Comédies au lieu de

ce vrai qui dans les piéces de Moliere frappe également tous les Spectateurs; on cherche le nouveau, l'on veut des traits, & le goût eft gâté au point qu'on voit aujourd'hui des perfonnes qui regardent Moliere comme un Auteur qui commence à vieillir; mais la preuve la plus convainquante que l'on puiffe alléguer du contraire, c'eft le plaifir toujours vif & toujours délicat que caufent à la représentation & à la lecture, je ne dis pas feulement fes piéces du haut comique, telles que le Mifantrope, les Femmes fçavantes, l'Etourdi, &c. mais encore fes Farces. le Pourceaugnac, le Bourgeois Gentilhomme, &c. dans lefquelles les ridicules quoique chargés font moins éloignés de la nature que tant de traits de pure imagination que nos Contemporains mettent fur la fcéne ce n'eft pas que je regarde Moliere comme abfolument unique en ce genre; Régnard & M. Deftouches ont marché avec gloire fur les traces, &

l'on a vû de tems en tems paroître quelques piéces qui n'ont été véritablement admirées, qu'autant qu'elles refpiroient le goût & le génie de Moliere.L'étude du coeur humain eft une étude épineufe & difficile, & c'eft dans la difficulté même de cette étude qu'on doit chercher la caufe de la difette des bons ouvrages comiques : peu de perfonnes aiment à approfondir, à démêler les motifs & les refforts des actions humaines. Il en coute trop à la pareffe d'aller fouiller dans des replis fi fecrets. On trouve avec bien plus de facilité des jeux d'ef prit, des penfées. fubtiles des Epigrammes, un comique de dialogue & de diction. Dans Moliere tout le comique eft de fituation ou de fentiment. La fineffe & la fimplicité du dialogue naiffent du fond même des fujets. Il préfente ,, dit, M. Riccoboni fes idées avec obferva. des expreffions naturelles, co- tions fur miques, intelligibles même aux médie, Spectateurs les moins éclairés..... fes idées fi vrayes & fi juftes.

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,, en même tems qu'elles peignent ,, au naturel & qu'elles combat,, tent les ridicules des hommes font exprimées avec une fimpli cité noble & convenable. Tel eft, ajoûte-il,l'efprit de Moliere; efprit qui plaira toujours & qui fera également goûté des con,, noiffeurs & des ignorans." Or ces beautés dans Moliere, c'est l'étude de la nature: il l'a connue parfaitement, auffi l'a-t'il peint d'après elle même ? Il a faifi les caractéres dans le vrai, & fait parler fes perfonnages conformément à leurs inclinations, à leurs paffions, à leurs moeurs pourquoi? parce qu'il s'en étoit formé lui-même les idées les plus juftes & les plus précifes, & que plein de fes fujets, métamorphofé, pour ainfi dire même en mifantrope, en avare, en jaloux, il exprimoit tous ces caractéres avec les couleurs qui leur font propres. Un modéle de cette excellence eft bien au-deffus de toutes les régles. Il nous a démontré par fes ouvrages ce que

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c'étoit que la nature, & comment on pouvoit la faisir: fans eux nous ne la connoîtrions peut être encore qu'imparfaitement. Il eft fâcheux que fon exemple n'aît pas été mieux fuivi dans une nation qui fe glorifie d'avoir produit Moliere & qui l'admire encore tous les jours.

Quoique j'aye traité des moeurs Des ca d'une maniére affez circonftanciée ractéres, à l'article de la Tragédie, cependant elles font une partie fi confidé rable du genre comique, que je ne puis m'empêcher d'y revenir. Par moeurs, on entend plus particuliérement les inclinations des hommes dépendantes de leur âge ou de leur condition.

Le tems qui change tout, change aussi ́nos

humeurs,

Chaque age a fes plaifirs, fon efprit & fes

mœurs.

J'ai expofé ailleurs les qualités qu'elles devoient avoir pour répandre de la chaleur & de la vie

Art

Poët. Chant 3.

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