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tion. On ne fçauroit nier que cette divifion ne serve à répandre beaucoup de lumiére dans un fujet & à jetter de l'ordre dans les mouvemens. Cette difpofition des Scénes exige principalement qu'elles naiffent les unes des autres naturellement fans effort, fans contrainte; que les personnages qui les rempliffent y foient amenés par quelqu'intérêt fenfible & relatif à F'intérêt général. Dans la compofition cet Art dépend uniquement du génie & de la connoiffance du Théâtre. Pour juger de la convenance & de l'oeconomie, il fuffit de confulter les excellens modéles. Lorfqu'on lit Moliere avec atten→ tion, l'on découvre fans peine l'enchainement toujours vraifemblable de fes fcenes, comment les premiéres préparent aux fuivantes, & comment fes perfonnages paroiffent ou quittent la Scéne fans qu'on puiffe où les retenir, ou les fupprimer, à moins de retrancher de la piéce des morceaux dont on fentiroit d'abord le défaut & la néceffité.

La vraisemblance exacte y eft par-
tout fi bien obfervée, que
, que l'action
fe développe fucceffivement par
dégrés & comme d'elle-même,
tout marche, tout fe lie naturel-
lement, & l'efprit fatisfait croit
moins voir l'image d'une action
qu'une action véritable.

propre

Je n'entreprens point de tracer De la ici les regles du dialogue propre à Diction la Comédie, mais de faire quel- la Coques obfervations générales fur la medie. diction qui lui convient. Il a toujours paffé pour conftant que la Comedie devoit être écrite d'un ftyle aifé, naturel & coulant, plûtôt élegant que véhement, approchant de celui de la converfation, & par conféquent moins Poëti que que celui de la Tragédie, car dans celle-ci où l'on introduit des Rois & des Grands, l'illufion peut fubfifter davantage & permettre qu'on leur prête un langage plus relevé; mais dans la Comédie dont les fujets font pris dans la vie commune, on eft encore plus obligé de copier la nature,

Art Que fon style humble & doux se relève à

Poët.

propos;

Chant 3. Que fes difcours par-tout fertiles en bons

mots,

Soient pleins de paffions finement maniées.

Rien ne feroit en effet plus ridicule que d'entendre Scapin ou Sganarelle s'entretenir fur le Ton d'Horace ou de Cinna. Les bienféances & le vrai demandent que l'on conferve à chacun fon caractére, & que pour le peindre on n'employe point des couleurs étran geres. Or il eft certain que rien ne le manifefte tant, que les difcours qu'on fait tenir aux personnages introduits, & comme nous l'avons dejà vû, ils doivent avoir un rapport néceffaire avec leur condition: Sur ces principes, il paroîtroit plaufible que la profe convient mieux à la Comédie que les Vers, puisqu'elle a la forme ufitée du langage & des entretiens dans la.vie commune, auffi faut-il remarquer avec un Poëte célébre, que c'eft

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moins la qualité de personnages que la nature des fujets qui doit déterminer la forme de la dic- M.Rou tion, car comme parmi les per- Préface seau, fonnes que la Comédie met en du Fla,, action, le rang, l'éducation, les teur. intérêts, forment des différen,, ces prefqu'infinies, on ne peut pas dire que le même style foit également propre à les bien repréfenter, & c'eft cela que

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رو

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دو

pour

,, nos meilleurs Poëtes ont écrit
,, leurs Comédies tantôt en Profe,
& tantôt en Vers, felon l'exigen-
,, ce des fujets. Les Vers, ajoûte
le même Auteur, arrêtent une
déclamation qui doit courir
mais ils foutiennent celle qui
doit marcher plus gravement,
auffi les Auteurs Comiques, fe
font-ils l'ordinaire fervis de
pour
la Poëfie, lorfqu'ils ont eû des
actions plus férieuses à décrire
,, ou des perfonnes plus importan-
,, tes à faire parler:" ainfi le Mi-
fantrope, le Tartufe, les Femmes
fçavantes, le Joueur, le Philofo-
phe marié,perdroient beaucoup de

رو

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prix, fi elles étoient en Profe; comme les petites pieces de Moliere & de Regnard paroîtroient guindées, fi elles étoient en Vers. Les réflexions que je viens de puifer dans Mr. Rouffeau, fervent de réponse folide à l'objection ufitée, qu'il n'eft pas naturel de voir des perfonnages du commun s'entretenir en Vers. Mais pour juger de la diction qui convient le mieux à la Comédie, le moyen le plus fùr eft de confulter les grands modéles: celle des Grecs ne feroit furement pas admife de nos jours, quoiqu'en difent les Adorateurs aveugles de l'Antiquité. Le langage d'Ariftophane eft quelquefois bas, obfcur, entortillé, il joue fur les mots, & mêle fouvent le Tragique avec le Comique, le boufon & le férieux, le grave & le familier d'une maniere fade; enfin fes plaifanteries manquent fouvent de fineffe & de légéreté. Ménandre à en juger par les fragmens qui nous font reftez de lui, a un Byle pur, élevé, net & naturel. Plaute

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