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·AN.1546.

CXLVI.

Divifion entre les

des éle&teurs.

Sleidan ibid. 8.582.

tion du roi de France, mais que comme elle ne s'étendoit que jusqu'à la fin d'Octobre, & que fon frere Ferdinand craignoit beaucoup que les infidéles ne repriffent auffi-tôt les armes, il fe flattoit que les princes ne lui manqueroient pas au befoin.

Ce difcours au lieu de réunir les princes pour déliberer ensemble, felon la coûtume, ne ferenvoyez vit qu'à les divifer. Les ambaffadeurs des électeurs de Maïence & de Tréves s'étant feparez de ceux de Cologne, du comte Palatin, de Saxe & de Brandebourg, s'unirent avec les Catholiques, & aïant mis l'affaire en déliberation, ils approuverent le concile de Trente, & exhorterent l'empereur à le maintenir, & à engager les Proteftans à le recevoir, à s'y trouver, & à fe foumettre à fes decrets & fes décifions. Les Proteftans au contraire demandoient à l'empereur qu'il établit par tout une bonne paix & une égale juftice, & qu'il permit qu'on traitât des affaires de la religion, ou dans un concile legitime de toute l'Allemagne, ou dans une diete de l'empire, ou dans une conference de fçavans théologiens, parce qu'il n'y avoit aucune apparence de recevoir le concile de Trente, qui n'étoit pas tel qu'on l'avoit fi fouvent promis. Mais l'empereur n'écouta aucune de ces propofitions. Il fe trouva au contraire fi vivement piqué contre Jean Frederic électeur de Saxe, qu'il lui fit écrire en fon nom: Qu'il n'étoit pas d'un homme d'honneur de n'avoir aucun égard aux peines qu'il s'étoit données pour folliciter la tenuë d'un concile general, afin de tâcher conjointement de donner la paix à l'églife, & qu'il ne lui convenoit pas de fe moquer ainfi de lui, de Fempire & de l'églife. Non content de cette lettre, il chargea particulierement le baron de Krazel miniftre de félecteur, d'écrire à fon maître, à peu près fur le même ton.

Tou

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le cardinal

Toutes ces menaces confirmerent les Prote- AN.1546. ftans dans la pensée que l'empereur vouloit leur CXLVII. faire la guerre & ils n'en douterent plus auffi- L'empetôt qu'ils eurent appris que ce prince avoit envoïéreur envoïe en pofte le cardinal de Trente à Rome pour re- de Trente prefenter au pape l'état déplorable dans lequel la à Rome. religion catholique alloit tomber en Allemagne, Seidan, ubi fi l'on n'y apportoit un promt remede. Qu'on fupra. avoit déja diftribué de l'argent aux colonels & aux capitaines pour lever des troupes; que l'empereur avoit donné ordre à Maximilien comte de Bures, de faire dans la baffe Allemagne les plus grandes levées qu'il pourroit d'infanterie & de cavalerie: qu'il avoit commandé à Albert & à Jean de Brandebourg, & à Wolfgang maître de Pordre Teutonique, de faire des compagnies d'ordonnance. Ces deux premiers étoient toutefois Proteftans, & même étoient entrez dans leur ligue; mais perfuadez que l'empereur n'en vouloit point à la religion & qu'il n'avoit point d'autre deffein que de châtier la revolte de quelquesuns, ils s'étoient unis à lui. Le Lantgrave qui veilloit exactement à tout, écrivoit fouvent à Ratisbonne, que ces bruits de guerres étoient bien fondez, & confeilloit à fes alliez de mettre leurs anciennes troupes fur pied, & d'en lever de nouvelles. Ils eurent d'abord de la peine à le croi re, & à fe perfuader que l'empereur voulut rompre la paix; mais parce que l'effet montroit affez que le Lantgrave penfoit jufte, ils allerent trouver l'empereur le feiziéme de Juin, & lui demanderent fi c'étoit par fes ordres qu'on affembloit tant de gens de guerre dans l'empire, vũ qu'il étoit en paix avec le Turc & la France, & qu'ils le prioient de leur apprendre à quoi tendoient tous ces preparatifs. A quoi l'empereur ré pondit par Naves, qu'il n'avoit pas d'autre def fein que de reconcilier & unir les états & faire fleurir la paix dans l'empire: Que ceux qui lui

obéiroient pouvoient s'aflurer de fon amitié & de AN.1546.fa bienveillance, mais qu'il uferoit de fon droit & de fon autorité contre ceux qui n'aimoient que le trouble & la divifion.

CXLVIII.

reur fait

Le lendemain il fit écrire à plufieurs villes de L'empe la ligue des proteftans, & particulierement à écrire à Strasbourg, Nuremberg, Ausbourg & Ulm. plufieurs Les lettres furent adreffées aux magiftrats à qui villes des ce prince mandoit qu'ils ne devoient pas douter Proteftans. combien le falut de l'Allemagne lui étoit cher, Sleidan. ubi combien de travaux il avoit fouffert, & de défara pag. penfes il avoit faites pour fa conservation, au

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préjudice de fes autres états; qu'il n'avoit rien oublié pour établir une bonne paix & une parfaite union, fans pouvoir y réüffir, par les obftacles qu'y avoient apporté certains efprits remuans qui n'aimoient que le trouble fans aucun égard pour la religion dont ils fe foucioient peu, qui n'avoient en vûë que de s'emparer du bien des autres qu'ils retenoient de force, au grand dommage de la republique : & qui étoient enfin venus au point de ne plus rien craindre, de ne faire aucun cas de la justice, & d'affsujettir fous leur tyrannie les états & les villes, en partie par force, en partie par leurs trahisons fecretes. Qu'il ne lui étoit pas permis de le fouffrir plus long-tems; qu'afin donc que fa dignité fût confervée & le droit maintenu, il pretendoit tirer vengeance de ces perturbateurs de l'état, & rendre à l'Allemagne fon premier luftre & fa liberté. Qu'il avoit bien voulu leur faire connoître là-deffus fes intentions, afin qu'ils ne cruffent pas ceux qui interpreteroient fa conduite en mauvaife part, & qui lui attribueroient d'autres deffeins. Qu'il n'avoit en vûë que de les rétablir dans leur liberté. Il écrivit à peu près la même chose au duc de Wirtemberg; & Granvelle & Naves firent connoître aux députez des villes à qui l'on avoit écrit, que la guerre ne les regardoit pas,

que

:2.8.9

que l'empereur vouloit feulement reprimer quel- AN.1546.
ques rebelles qui violoient la majesté imperiale &
s'étoient emparez des biens de quelques princes
& prelats, & que ce prince les exhortoit à lui
demeurer fidéles.

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Lettre de

tre les Pro

Cependant le cardinal Madrucce évêque de CXLIX. Trente étoit déja parti pour Rome. Il avoit or- l'empereur dre de conclure une ligue avec le pape, & de le au pape faire consentir à un promt armement. L'empe- pour une reur lui donna des lettres non feulement pour les ligue concardinaux qu'il croïoit plus zelez en faveur de la teftans. religion: mais encore pour plufieurs barons qui avoient plus de pouvoir fur l'efprit du pape auquel il écrivit auffi en ces termes. Très-faint Pere, quoique les bruits publics de l'orgueilleufe infolence des perfides ennemis du faint fiege & de l'empire, leurs feditieuses affemblées, les forces confiderables qu'ils mettent fur pied pour défendre leur fecte facrilege, foient des motifs fuffifans exciter le zele fi conpour nu de vôtre fainteté, & pour la porter nonfeulement à entrer dans une ligue contre ces ,, rebelles; mais même à folliciter les autres à le faire: cependant comme je vois le mal de plus ,,près, & par confequent la neceffité qu'il y a

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de faire une femblable ligue ; j'ai pris la refo,,lution d'envoïer à Rome avec toute la diligen» ce qu'exige un fi grand befoin, le cardinal Ma,, drucce, afin qu'il raconte à votre fainteté l'état où font les affaires d'Allemagne. Saint Pere il

,, n'est pas neceffaire que je vous dife ce que vous fçavez mieux que moi, que ce n'eft point mon ,, interêt particulier qui me porte à vous follici,, ter de faire cette ligue, puifqu'il eft hors de doute les Lutheriens me feroient toûjours ,, fidéles & obéiffans fi je voulois ceffer de les per,, fecuter. Il s'agit feulement de la cause de Dieu, ,, de la fainte & pure religion catholique qui eft née avec J. C, qui a été formée par les tra

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que

,, vaux,

AN.1546.

CL.

,, vaux, arrofée de fon fang, & je dirai mêmede ,, celui du faint fiege dont vous êtes le digne ,, chef, & contre lequel les heretiques preten

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dent porter leurs plus dangereux coups, croïant ,, que s'ils pouvoient venir à bout de renverfer cette colonne qui foutient & fert de rampart à l'église catholique, celle-ci ne pourroit man,, quer de tomber bien-tôt après. Je n'ignore pas, & vôtre fainteté le fçait mieux que moi, que ,, les portes de l'enfer ne prévaudront jamais contre la veritable églife. Cependant Dieu a établi ,, les princes pour être fes protecteurs, & leur a donné des forces & du pouvoir pour la défen„, dre. J'ai réfolu d'emploier l'épée que la providence m'a mife entre les mains, par le moïen ,, des électeurs de l'empire, & tout ce que je », pourrai tirer de mes fujets, qui par la grace de Dieu font tous catholiques, fans y épargner ,, mon propre fang, à défendre de toutes mes forces la gloire & les interêts de Dieu contre fes ennemis. Je me promets beaucoup de mon ,, entreprise avec le fecours du Seigneur, fur tout lorfque mes forces feront jointes à celles de vôtre fainteté. Le cardinal Madrucce vous dira » quels font les plus grands befoins, & tout ce qui regarde cette ligue.,, Cette lettre étoit dattée de Wormes le deuxième de Juin.

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Le cardinal Madrucce qui en étoit porteur Arrivée étant arrivé à Rome, y trouva le pape & toute du cardinal fa de Trente cour fort confternée des nouvelles qui couà Rome. roient, que les Proteftans avoient réfolu de lever Palav. hifi une armée de quatre-vingt mille hommes de Conc. Trid. pied & de quarante mille chevaux, avec laquelle b. 8. cap. ils pretendoient aller droit à Rome. On foup

1.2.2.

çonna que les partifans de l'empereur avoient euxmêmes répandus ces bruits pour intimer le pape, & l'obliger à accorder à l'empereur de plus grands fecours. Que cette nouvelle fut vraie ou non, il eft certain que le cardinal qui alla des

cendre

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