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vit en particulier à Maurice pour lui reprocher AN.1546. fon ingratitude envers l'électeur : il ajouta que l'affaire dont il s'agiffoit regardoit la religion, & qu'il ne pouvoit ni l'ignorer ni le diffimuler. Qu'il étoit évident que l'empereur n'avoit d'autre but dans cette guerre, que de reduire l'Allemagne avec les forces de l'empire même; & par le moïen des divifions qu'il y excitoit, la remettre fous le joug du pape qu'elle avoit fi genereusement fecoué. Qu'ainfi il devoit peu fe mettre en peine & de la déclaration de l'empereur & de l'excommunication du pape, puifque c'étoit des traits directement lancez contre la religion, dont les Proteftans avoient pris la défense.

XV.

fe du duc

Cette lettre du Lantgrave ne changea rien dans Entrepri-le projet de Maurice. Revêtu du pouvoir de l'inMaurice veftiture que l'empereur lui avoit donnée, il fit fur la Saxe. des progrez confiderables en Saxe. Outre les trouDe Thes. pes qu'il avoit pû lever dans fes états & dans ceux hift. lib. 2. du duc Augufte fon frere, le roi Ferdinand lui Belcaries avoit donné, à la follicitation de Charles V.quin1.24.11.29. ze cens hommes de pied commandez par AliSleidan uli prand Madrucce frere du cardinal de Trente, & fupra. 18. quinze cens chevaux fous la conduite de George pag. 637. Rensburg ancien officier, lefquels joints à fes

in comment.

autres troupes, faifoient fept à huit mille hommes, ce qui étoit plus que fuffifant pour envahir un pays où il n'y avoit prefque perfonne en état de faire une longue réfiftance. Cependant le nombre de fes troupes ne tarda pas à s'accroître par un parti de Hongrois qui avoient d'abord combattu fous la conduite du Huffar Sebastien Vertmulh, & qui après avoir commis toute forte de défordres dans le pays de Voëtland, fe trouvant abandonnez par la plus grande partie des Bohemiens qui combattoient avec eux, allerent chercher l'impunité de leurs crimes en fe joignant au prince Maurice. Celui-ci fier de ce renfort porta dans tout le pays la terreur de fes armes, & fe

ren

rendit maître en moins de quinze jours de Zuiccau, de Schenberg, d'Aldembourg, & de prefque toutes les autres villes des états de l'électeur, excepté Wirtemberg, Eyfenach & Gotha, parce qu'elles étoient trop fortes; & de plus il défit trois mille hommes de pied, & trois cens chevaux. La nouvelle de ces fuccez aïant été mandée à l'électeur par Sibylle fon époufe, fille du duc de Cleves, & à l'empereur par le duc Maurice, l'un en conçut beaucoup de joie, & l'autre un extrême chagrin. Cependant Maurice fe rendit extrêmement odieux par ces exploits; on le diffama par des libelles aufquels il tâcha inutilement de répondre, infiftant fur ce qu'en toute cette guerre il ne s'agiffoit point de religion; mais le fuccés fit voir que l'intention de l'empereur étoit bien differente.

AN.1546,

XVI.

teftans veu

reur.

hift. lib. 2.

Les affaires de ce prince qui jufques-là avoient peu réuffi, reçurent un fi grand avantage de cet- Les Prote expedition, qu'il conçut l'efperance de fub- lent faire la juguer toute l'Allemagne, & fe confirma dans la paix aves réfolution de poursuivre ses ennemis. Les confé- l'empederez fort troublez des nouvelles qu'ils avoient reçûës des ravages commis en Saxe, & voiant l'é- De Thom lecteur difpofé à retourner promptement dans Belcar. fon pais, quoique le Lantgrave fut d'avis que ibid. ut fnParmée ne fe féparât point, s'affemblerent à Ulm pra. le vint-feptiéme d'Octobre, avec les députez des villes qui y étoient arrivez. On y conclut qu'il n'étoit pas expedient que l'électeur de Saxe quittât l'armée. Mais on changea de réfolution quand on eut appris la trifte fituation de ce païs, & les ravages que le duc Maurice y avoit caufez : ces députez fe rendirent enfuite au camp des conféderez prés de Ginghen. On y propofa les difficultez & les incommoditez de la guerre, & aprèsde longues déliberations, l'on prit le parti de faire la paix avec l'empereur, ou du moins de convenir avec lui d'une tréve. Cette réfolution prife, ils

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envoïerent Adam Trotte ami du marquis de Bran AN.1546. debourg à Jean fon frere qui étoit au camp des Imperiaux, afin de le prier de fonder les intentions de l'empereur, & s'il étoit disposé à leur accorder la paix. Mais Charles V. averti des réfolutions de fes ennemis, & du fâcheux état dans lequel ils étoient réduits, manquant de vivres & d'argent, leur fit dire, qu'il ne consentiroit jamais à aucune paix ni tréve, qu'auparavant l'éle&teur de Saxe n'eût remis à fa difcretion & fa perfonne & fes états. Une condition fi rude fit qu'on ne parla plus de paix ; & l'on confentit que l'électeur de Saxe emmenât avec lui le reste de l'armée, à l'exception de huit mille hommes d'infanterie & mille chevaux, qui feroient mis en quartier d'hyver, entretenus par le duc de Wirtemberg, & par les villes de la haute Allemagne, qui étoient de la ligue. Ainfi les deux armées se retirerent.

XVIL

de Saxe va

pas de

Les troupes de l'empereur ne laifferent L'électeur faire encore quelques conquêtes; elles fe faifidans fes rent de Bofphingen & de Norlingue, & aïant états avec laiffé dans cette derniere ville le cardinal d'AusFarmée. bourg avec mille Allemands, l'empereur marcha De Thou vers Dinckefpuel, & envoïa le comte de Buren à bf.lib.2. Wiffembourg, & ces deux villes s'étant renduës,

il alla en diligence à Rotebourg, dont les habitans aïant appris fon arrivée, vinrent au-devant de lui, & fe rendirent. Alors le Lantgrave de Heffe avec fes troupes, prit fon chemin à droite & laiffa fa groffe artillerie à Kirchein & à Scorendorf, deux fortes places du duché de Wirtemberg, d'où il fe retira dans fon païs pour traiter avec le duc Maurice; pendant que le duc de Saxe s'avançoit dans la Saxe, s'étant rendu maître en paffant de Gemunde ville de la Soüabe, dont il tira quelque fomme d'argent qu'il distribua à fes gens. Il arriva à Francfort au commencement de Decembre, & y demeura jufqu'au

dou

douziéme, auquel jour il tira des habitans neuf mille écus. Il força l'archevêque de Maïence de AN.1546. lui en donner quarante mille, & condamna à de groffes fommes l'abbé de Fulde & les autres catholiques des environs. Cependant le Lantgrave n'aïant pû aller trouver le duc Maurice, quoiqu'il en eut reçû le fauf-conduit, parce qu'il avoit éte accordé à certaines conditions qu'on n'agréa pas, lui envoïa pour députez Herman Hundelsuse, & Henri Lefner pour traiter avec lui. Mais parce que d'un côté Maurice alleguoit qu'il ne pouvoit traiter qu'avec l'agrément de l'empereur; & que d'ailleurs l'électeur de Saxe qui avoit fon armée toute prête, ne vouloit point differer de faire la guerre & de rentrer dans fes états, on fe retira fans avoir rien terminé.

L'empereur étant à Rotebourg, chargea le xvIII. comte de Buren de trouver les moïens de s'empa- Lettres de rer de Francfort, & le treiziéme de Decembre l'empereur

guer

Wirtem

& feq.

il écrivit à Ulric prince de Wirtemberg pour lui au duc de faire des reproches de ce que malgré tous les té-berg & fa moignages d'amitié & de bienveillance qu'il lui réponse. avoit donnez, il s'étoit allié avec les rebelles, & Sleidan ubi de ce que non content de s'être emparé de quel Supra p:643. ques villes de l'empire, il lui avoit déclaré la re d'une maniere injurieufe. Il ajoûtoit, qu'il avoit donc juftement merité la peine dont on punit les parjures, les profcrits, & les coupables de leze majefté. Que cependant voulant ufer de clemence, & avoir égard aux miferes des peuples, il lui accordoit le pardon, à condition qu'auffi-tôt ces lettres reçûës, il fe rendroit auprès de lui fans aucune condition, & lui livreroit fes états & fes biens, pour être ordonné felon fes volontez; que s'il n'obéiffoit on le pourfuivroit lui & les fiens à feu & à fang. L'empereur étoit alors fur les frontieres du païs de Wirtemberg avec fon armée commandée par le duc d'Albe. Ulric reçut ces lettres au fort de Tuele fur une haute & inaccef

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rend à l'empo

fible montagne où il s'étoit retiré, & il y répon AN.1546. dit le vingtiéme de Decembre en termes fort foumis, mandant à l'empereur qu'il étoit très-fâché d'avoir encouru fa difgrace, & qu'il le prioit de vouloir lui pardonner pour l'amour de J. C, & de ne point fevir contre lui ni contre fes fujets. XIX. Peu de tems après ceux d'Ulm, voïant l'arUlm fe mée des confederez diffipée, & eux-mêmes par confequent fruftrez des fecours qu'ils en efperoient, vinrent trouver l'empereur à Rotebourg: De Thon. mais ce prince ne voulut pas les écouter dans cethift. lib. 2. te ville, & leur fit ordonner de le fuivre à Hall ville de Souabe qui s'étoit auffi depuis peu reconbid. p. 645. ciliée. Ils s'y rendirent auffi-tôt, avouerent leur faute & en demanderent pardon; ce qui leur fut `accordé, à condition de payer cent mille écus, & de livrer douze pieces de canon à l'empereur, qui mit dans la ville une garnison.

reur.

Sleidan.

XX.

reur accor

de le par

latin.

De Thou ibid. ut fu

pra. Belcar.

lib. 24. n.

31.

دو

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L'électeur Palatin intimidé par cet exemple L'empe vint auffi trouver Charles V. à Hall, & pria Granvelle de lui menager une audience, qui lui fut acdon à l'é cordée. Dès qu'il fut en prefence de l'empereur, lecteur Pa- il lui dit en lui adreffant la parole:,, Ce n'est pas ,, tant la crainte de vôtre puiffance, que la confiance que j'ai en vôtre bonté, qui me fait paroître à vos genoux, pour y reçevoir autant de ,, preuves de vôtre bienveillance, que ma faute merite de châtiment. Quoiqu'elle ne foit pas ,, fans excufes, & quelle en ait de legitimes; j'aime mieux néanmoins confeffer librement mon crime, que d'agir d'une maniere qui puif,, fe faire croire que j'ai douté de vôtre clemence. Car voïant que vous avez tant de facilité à par,, donner aux plus coupables, j'aime mieux aban,, donner mon droit, & tout ce qui pourroit fer,, vir à ma défense, que de ravir à vôtre bonté ,, la moindre partie de fa gloire. Recevez donc, s'il vous plaît, en grace, un rebelle qui avoue », fa faute, & qui vous demande avec toute forte

دو

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