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AN.1546.

L.

à Granvelle

ce de reconciliation, il n'avoit pû fe refufer au I defir de fes fujets qui foupiroient après la reforme; qu'il avoit corrigé la doctrine, & établi quelque changement dans les ceremonies; ce qu'il efperoit entretenir dans la fuite, & en faire même une profeffion publique.

Le dix-feptiéme de Janvier, les députez des Le lant- électeurs de Cologne, de Maïence, de Treves, grave écrit & du comte Palatin, dont les états font fur le fur la guer-Rhin, s'affemblerent à Wefel pour la défense de re qu'on l'archevêque de Cologne: mais il n'y eut que le veut faire Palatin pour lui, les autres refufant de lui être ftans. favorables, parce qu'ils vouloient ménager l'emSleidan ubi pereur. Dans le même tems il fe répandit un fopra lib. bruit de tous côtez, que Charles V. fe prepa16. p.552.roit fecretement à faire la guerre aux Protestans, 553.

aux Prote

ce qui obligea le Lantgrave d'écrire à Granvelle le vingt-quatriéme de Janvier, pour lui mander qu'on publioit non-feulement en Allemagne, mais encore en Italie & dans les autres païs, que l'empereur & le pape faifoient des preparatifs de guerre contre les Lutheriens, afin de maintenir le concile, & qu'on fe mettroit en campagne au printems prochain, pour venir fondre fur l'életorat de Cologne, dans la Saxe & dans la haute Allemagne : Que l'empereur auroit dix mille hommes de pied & quelques troupes de cavalerie qui le conduiroient à Ratisbonne : Que les officiers mêmes répandoient ces nouvelles, & affuroient avoir déja touché de l'argent de l'empereur, qui aïant fait, dit-on, fa paix avec le roi de France & même avec le Turc, vouloit emploïer fes troupes contre les Proteftans. Le Lantgrave ajoûte que lorfque lui & fes alliez penfent à l'accord de Nuremberg, confirmé à Ratisbonne, à Spire & ailleurs, ils ne peuvent se perfuader que la chose soit vraïe, attendu qu'ils n'ont rien oublié pour fecourir l'empereur & le roi des Romains contre les Turcs. Qu'ils le fup

plient de porter ces princes à la paix; & de leur faire réponse fur les refolutions de fa majefté im- AN.1546. periale, qu'ils croient leur être toûjours favorable.

553

LI.

Granvelle répondit le feptiéme de Février au Réponse Lantgrave, que l'empereur n'avoit fait aucune de Granligue avec le pape, qu'il ne levoit point de trou- velle au pes, & qu'il n'avoit avancé aucun argent aux ca- Lantgrave. pitaines. Que quand même il affembleroit quel- Sleidan ubi ques foldats, on n'en devroit point être furpris, fupra pag. dans des conjonctures où les rois & les princes fes voisins faifoient la même chofe : Qu'il étoit étonné qu'il y eut des gens affez imprudens & temeraires pour publier de femblables nouvelles, d'un prince que chacun connoiffoit fi zelé pour la paix & la tranquillité. Qu'on fçavoit tout ce, qu'il avoit fait pour pacifier l'Allemagne, qu'il n'avoit pas changé d'inclination. Que c'étoit dans ces vûës qu'il avoit convoqué une diete à Ratisbonne, où il devoit fe rendre, non pas avec dix mille hommes, comme on le publioit, quoi qu'il eut droit de le faire, ainfi qu'il l'avoit déja fait en fe rendant à Ausbourg avec un pareil nombre de foldats, mais que ce qu'il y avoit d'affuré étoit que ce prince étoit fur fon départ, qu'il paroîtroit accompagné de peu de perfonnes, parce qu'il étoit perfuadé qu'on connoiffoit fon bon cœur, & que perfonne ne lui donneroit fujet d'agir autrement. Quant à l'archevêque de Cologne, Granvelle dit que ce prelat fçavoit tout ce que l'Empereur avoit fait pour le remettre dans fon devoir, avec combien de douceur & de bonté il l'avoit traité, n'aïant rien ordonné contre lui quoiqu'il y eut raifon de le faire. Qu'il Pavoit fait avertir par Naves de fe défifter de fes entreprifes, & d'attendre le refultat de la diete de Ratisbonne, d'autant plus que fa conduite étoit fort reprehenfible, & qu'il ne convenoit pas à un empereur de la fupporter plus long-tems, après l'avoir fi charitablement averti. Le Lantgrave

C 6

AN.1546. grave ajoûta foi à cette lettre & ne crut plus les bruits de l'armement de l'empereur, quoiqu'ils lui fuffent confirmez de beaucoup d'endroits; & c'étoit avec raison, puifqu'en effet Charles n'avoit d'autre deffein que d'amufer les Proteftans, pour avoir plus de tems, & fe pourvoir de tout ce qui lui étoit neceffaire, afin de les reduire par la force..

de theolo

LII. Mais quoique les affaires d'Allemagne fe difpoColloque faffent ainfi à la guerre, l'empereur ne laiffa pas giens à Ra- de faire tenir la conference qui avoit été ordontisbonne. née par le decret de la derniere diéte de WorSleidan ubi mes. Il envoïa pour cet effet à Ratisbonne quafupra lib. 16. tre théologiens, qui furent Pierre Malvenda dominicain Efpagnol, Eberard Billie religieux cara.&fcript. me, Jean Hofmefter augustin & Jean Cochlée, Luther hot pour difputer avec quatre autres théologiens ; & anno pag pour auditeurs George Loxen, Gafpard Calten

P.555.

Cochlans in

313.

LIIL Ouverture

tal, George Ilfinger, & Barthelemi Latomus. Les Proteftans ne manquerent pas d'y envoïer auffi leurs théologiens, qui furent Bucer, Brentius, George Major & Erard Schnef pour difputer: Volrat comte de Valdec, Balthafar Gult King, Laurent Zoch jurifconfulte & George Vol chemer pour auditeurs. Ambroife Pelargue étoit furnuméraire du côté des Catholiques, & trois pour les Proteftans, qui étoient Jean Piftorius, Martin Frecht & Theodore Wite. Les deux présidens de la conference nommez par l'empereur, furent Maurice Huttem évêque d'Eichftet & Frederic comte de Furftemberg. Le premier arriva à Ratisbonne le premier de Janvier, & le fecond quelques jours après. Tous les théologiens s'y étoient déja rendus.

L'ouverture de la conference fe fit le vingtde la con- feptiéme de Janvier, & les préfidens après avoir ference. expofé leur commiffion & excufé leur retardeSleidan. P ment, exhorterent les théologiens à ne fe point conduire par paffion; mais à faire tout en con

156.

Co hlæus mbi fupra,

3

fcien

:

fcience, aiant Dieu pour témoin. Ils dirent enfuite que l'ordre de l'empereur étoit qu'on s'en tint à la confeffion d'Ausbourg, fans rien dire toutefois des trois premiers articles; fçavoir, de la Trinité, de l'Incarnation du Verbe, & du pechéoriginel, parce que les deux premiers ne fouffroient aucune difficulté & que le troifiéme avoit été affez difcuté. Qu'il falloit feulement traiter par ordre de la juftification, de la remiflion des pechez, de l'accompliffement de la loi, de la foi, des bonnes œuvres, du merite des facremens, du purgatoire, des fuffrages des morts, de la veneration & invocation des Saints, des reliques, des images, des voeux monaftiques, du celibat des prêtres, du difcernement des viandes, des fêtes, des traditions ecclefiaftiques, de l'églife, de la puiffance des clefs, de l'ordre hierarchique, de l'autorité du pape, des évêques & des conciles. Les Proteftans requirent que les actes fuffent écrits par des notaires, & après beaucoup de difputes, l'on convint, que deux perfonnes de part & d'autre écriroient tout ce qui fe, diroit, que les actes feroient enfermez dans un coffre, & qu'on ne les communiqueroit qu'en la prefence des autres, Toutes ces chofes arrêtées, Pierre Malvenda commença la difpute le cinquiéme de Fevrier.

Il traita l'article de la juftification fort au long, & d'une maniere fcolaftique. Bucer l'interrompant dit que c'étoit contre les loix de la conference & les ordres de l'empereur; que la confeffion d'Ausbourg étoit prefente, qu'il en devoit prendre le titre de la juftification, & refuter par ordre ce qu'il y trouveroit de mauvais: Malvenda ne laiffa pas de paffer outre, & en concluant, il releva beaucoup le libre arbitre, & dit que l'homme n'étoit pas feulement juftifié par la for; mais encore par l'efperance & par la charité. Le lendemain Bucer remontra qu'il y avoit cinq ans

qu'on

AN. 1546.

par

AN.1546. qu'on étoit convenu de cet article à Ratisbonne, & expofa ce que l'empereur, les princes & les états avoient ordonné là-deffus, demandant qu'on en prît acte. Puis, fuivant l'ordre établi par l'empereur, il repeta le même article, & le divifa en quatre parties; Que l'homme n'étoit justifié ni par les œuvres, ni par les merites, mais gratuitement par la foi à caufe de J. C. & que fes pechez lui font pardonnez à cause du même Sauveur; que J. C. par fa mort a fatisfait pour nos pechez; que Dieu nous impute la foi pour juftice. Il confirma & expliqua ces quatre chofes des témoignages de l'écriture fainte, faifant voiren quoi il étoit d'accord avec Malvenda, & refutant fes raisons contraires. Le carme Billie prit la place de Malvenda,& refuta quelques propofitions que Bucer avoit avancées, principalement fur la juftification, & nia qu'elles euffent jamais été accordées. Le treiziéme de Fevrier, Malvenda répondit à Bucer, que les œuvres difpofoient & preparoient à la juftification'; que la charité étoit la forme de la justice, que les œuvres des juftifiez rendoient la juftification parfaite, & meritoient la vie éternelle.

LIV.

L'empe à ceux de la confe

reur écrit

rence.

Sleidan

bid. pag.

557.

Pendant qu'on agitoit ces queftions, on reçut le quinziéme de Fevrier des lettres de l'empereur, par lefquelles il mandoit que Jules Phlug évêque de Naimbourg fût admis entre les prefidens; qu'on n'augmentât point le nombre des' theologiens difputans ni celui des auditeurs; que pour recevoir les actes on s'en tînt aux notaires feuls que les prefidens avoient choifis, & qu'ils promiffent de tenir fecret tout ce qui feroit écrit, & de ne le communiquer à perfonne avant que l'empereur & les états de l'empire en éuffent été informez, Que les articles accordez feroient fignez de part & d'autre, & ceux qui feroient difputez, marquez fommairement en rapportant les Sentimens de part & d'autre, que les notaires

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