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re le refpect qui lui eft dû, ne fouffrant pas qu'elle fervît de matiere à l'étude & aux recherches des curieux.

AN.1546.

LXXIV.

& de Soto.

Ce dernier fentiment fut pouffé fi loin, que sentimens Richard du Mans Cordelier, dit que les fcolafti- de Richard ques avoient fi bien démêlé les dogmes de la foi, du Mans qu'on ne devoit plus les apprendre de l'écriture, & qu'au lieu qu'elle fe lifoit autrefois dans l'église pour inftruire le peuple, elle ne s'y lifoit plus maintenant que par forme d'oraison, à quoi elle devroit fervir uniquement, & non point à étudier, & que c'étoit en cela que confiftoit le refpect qu'on doit à la parole de Dieu. Que du moins cette étude devoit être défendue à ceux qui n'étoient pas verfez dans la theologie fcolaftique, d'autant que les Lutheriens ne trouvoient leur avantage qu'avec ceux qui étudioient l'écriture. Dominique de Soto Jacobin, diftingua la matiere de la foi & des mœurs d'avec les autres, & dit que pour la foi & les mœurs, il étoit jufte de contenir les efprits; mais que pour le refte, il n'y avoit point d'inconvenient à laiffer à chacun la liberté de penfer & d'écrire fans bleffer la pieté & la charité. Que les peres n'avoient point pretendu impofer de neceffité de les fuivre, parce qu'aïant parlé felon la maniere de leur tems, leur expofition ne convenoit pas toûjours au nôtre. Que quand les papes ont interpreté quelques paffages de l'écriture dans leurs decretales, ils ont laiffé la liberté d'y donner un autre fens raisonnable: & que c'eft ainfi que l'entend S. Paul, quand il dit, qu'on doit emploïer Rom..xIMj la prophetie, c'eft-à-dire, l'interpretation de l'écriture felon la raifon de la foi, c'est-à-dire, par rapport aux articles de foi. Que fans cette distinction, on donnera dans l'absurdité, à cause des contrarietez & même des contradictions qui fe trouvent dans les differentes expofitions des anciens peres.

D6

Tou

fur l'écri

Toutes ces raifons furent portées dans une conAN.1546. LXXV. gregation generale tenue le premier d'Avril, où Refolution parlant des peines qu'on devoit impofer à ceux drs Peres qui expliqueroient l'écriture autrement que l'églidu concile fe & les faints peres; l'évêque de Clodia averture & les tit prudemment, qu'il falloit se restraindre feuletraditions. ment à ceux qui donneroient des explications Pallav. ubi contraires, puifqu'il paroît permis de tirer des Supra lib. 6. livres faints un nouveau fentiment, quand l'encap. 15. n. droit qu'on explique n'a pas encore acquis une 3.04.

interpretation certaine fondée fur l'autorité de P'églife & fur le confentement unanime des peres. Pour obvier à cet inconvenient, l'évêque de Jaën dit, qu'il falloit interdire l'explication de Pécriture à tous ceux qui n'auroient pas quelque degré de bachelier ou de docteur dans une univerfité, & il infifta beaucoup là-dessus, faifant paroître autant de zele pour foutenir cette opinion que d'ardeur à s'opposer au cardinal de Trente qui lui étoit contraire, & qui croioit qu'on devoit accorder la liberté d'expliquer l'écriture à tous ceux qui avoient de la pieté & de l'érudition; mais avec cette restriction, que leur ouvrage feroit approuvé par les cenfeurs avant que de paroître : & ce dernier avis l'emporta, parce qu'il étoit plus du goût des legats, qui n'avoient pas écouté avec plaifir ce que le cardinal Pacheco avoit propofé, que l'écriture avoit été expliquée par tant d'habiles gens, que l'on ne pouvoit pas efperer de rien faire de meilleur, & que les nouveaux fens donnez à l'écriture avoient produit les nouvelles herefies. On propofa fi l'on formeroit des canons avec anathême, fi l'on condamneroit comme heretique quiconque ne recevroit pas l'édition vulgate; & enfin l'on fe détermina à deux decrets, dans l'un defquels on renfermeroit ce qui concerne le catalogue des livres faints & les traditions, avec anathême; & dans l'autre on mettroit ce qui regarde la tradi

tion & le fens de l'écriture. Le premier comme appartenant à la foi, & le fecond à la reforma-AN.1546. tion, pour contenter ceux qui demandoient cette union.

:

à Trente.

Pendant qu'on agitoit toutes ces matieres dans LXXVI. des congregations particulieres & generales, Fran- Arrivée de François çois de Tolede ambaffadeur de l'empereur arriva de Tolede à Trente le quinziéme de Mars. Plufieurs évê- ambaflaques allerent le recevoir à une demie lieuë de la deur de ville. Ses ordres portoient, ou qu'il feroit feul'empereur ambaffadeur, ou qu'il feroit collegue de Mendo Pallav.ubi za, fi celui-ci après avoir rétabli fa fanté se trou1-fupra c. 13. voit en état d'affifter au concile. Après avoir de-n. 1. & 2. meuré quatre jours à Trente, il s'en alla à Padoue Raynald. trouver Mendoza qui y étoit malade, & quiad hunc an. avoit appris avec quelque chagrin que l'empe-44. reur lui envoïoit un collegue, quoiqu'il l'eût demandé, mais en fe flattant mal-à-propos qu'on le lui refuferoit; outre qu'il étoit neceffaire que ce nouvel ambaffadeur conferât avec lui pour fçavoir les deffeins de l'empereur, qui avoient été confiez à Mendoza. Il fe determina à cette demarche par le confeil du cardinal de. Trente contre l'avis de Pacheco, qui croioit que c'étoit une baffeffe, & déroger à la nobleffe de la mai fon des Toledes, de rendre cette vifite, foit que ce cardinal ne fût pas ami de Mendoza, comme on le publioit, foit qu'il fût bien-aise qu'on s'adreffât à lui feul comme à un homme qui avoit toute la confiance de l'empereur. Quoi qu'il en foit, de Tolede vifita les legats en particulier & leur dit que l'empereur fouhaitoit fort d'avoir une entrevûë avec le pape, & qu'il avoit fignifié aux Proteftans que le concile étoit assemblé à Trente; & qu'il defiroit ardemment qu'on le continuât.

Dans le même tems Pierre-Paul Verger, évê- LXXVII. que de Capo-d'Iftria arriva à Trente. Il y avoit Paul Verdéja du tems que ce prelat étoit foupçonné de ger évêque

fa

AN.1546.

de Capod'Iftria,

fans

favorifer les heretiques & leur doctrine, & la fuite fit voir que ces foupçons n'étoient pas fondement. Čependant fâché de les voir fe repandre, & voulant en arrêter le cours, il avoit Pallav.ubi quitté l'Allemagne où fon féjour fortifioit les Supra lib. 6. foupçons, & s'étoit retiré dans fon évêché pour

feduit.

6.13.

lui refufent

Paule ad

y travailler à fe juftifier. Afin de faire plus d'impreffion, il commença un livre de controverfe contre les apoftats d'Allemagne. Mais foit qu'il n'en fût pas fi fort éloigné qu'il vouloit le faire croire, foit qu'en examinant leurs livres pour les refuter, fon efprit foible fe laifsât feduire ; il entra dans leurs fentimens, & y entraîna son frere Jean-Baptifte Verger, qui étoit évêque de Pola. Tous deux convinrent d'enseigner le LuLXXVIII. Il vient à theranisme à leurs peuples, & l'executerent en efTrente où fet: mais l'inquifiteur nommé Annibal Grifon les legits fit paroître tant de zele pour arrêter les progrez l'entrée du de l'herefie dans Pola & dans Capo-d'Iftria, que concile. Paul Verger ne fe croïant pas en sûreté dans fa Pallav.ubi ville, fe retira à Mantouë chez le cardinal HerSupra Fra- cule de Gonzague. Il n'y trouva pas long-tems une retraite affurée, parce que Jean de la Cafa legat du pape à Venife, fit tant d'instances auprès de ce cardinal pour se défaire d'un tel hôte, que celui-ci jugea à propos de quitter Mantouë. Alors loin de reconnoître le mal qu'il s'étoit fait à lui-même, il vint à Trente dans le deffein de fe difculper devant le concile. Mais les legats inftruits qu'il avoit déja été cité à Rome comme fufpect d'herefie, lui refuferent abfolument l'entrée des congregations, à moins qu'il ne fe fut auparavant juftifié auprès du pape, vers lequel ils le prefferent d'aller; & s'ils n'euffent craint de faire parler contre la liberté du concile, ils ne s'en feroient pas tenus aux fimples exhortations. Verger exclus, contre fon attente, du droit de féance parmi les peres, partit de Trente chargé de lettres de recommandation des legats, qui ob

bunc an

Sleidan. I.

21.

tinrent

tinrent qu'il ne comparoîtroit point à Rome, & que fa caufe feroit renvoïée devant le legat Jean de la Cafa & le patriarche de Venife. Mais le prelat y étant arrivé, & fçachant que ces deux évêques avoient ordre de lui faire fon procès, & n'aïant pas deffein fans doute d'abandonner fes erreurs, il quitta l'Italie & fe retira chez les Grifons, où il fit profeffion ouverte du Lutheranifme.

AN.1546.

au pape

refufe.

Pallav, ubi fupra c. 13.

Comme il y avoit un an & plus que les legats LXXIX. étoient à Trente, ils demanderent au pape la per- Les legats miffion de fe retirer, & le prierent d'en nom- demandent mer d'autres en leurs places. Le cardinal de Mon- permiffion té avoit des infirmitez réelles, qui l'obligeoient de fe retifouvent à garder la chambre & l'empêchoient rer, & il la d'affifter aux congregations. A l'égard de Cervin & de Polus, ils prétendoient que d'autres s'acquitteroient mieux de la commiffion dont on les ». 5. avoit chargez, & leur modeftie leur fuggeroit toutes les raifons qu'ils croïoient pouvoir faire impreffion fur le pape. Mais loin de les recevoir, il les exhorta à continuer leurs travaux pour l'églife, & leur fit fur cela de vives instances: il comprenoit aifément que s'ils fe retiroient, il auroit beaucoup de peine à en trouver parmi les cardinaux qui fuffent auffi propres que ceux-ci à conduire les affaires difficiles, & à concilier les efprits affez divifez à caufe des differentes nations dont le concile étoit compofé. Le pape leur envoïa en même-tems un projet de reforme fait depuis plufieurs années, afin de faire voir qu'il avoit réellement deffein de reformer la cour Romaine, & qu'il n'avoit pas eu besoin que le concile le lui fuggerât.

Dans les congregations tenues le troifiéme & LXXX. le cinquième d'Avril, on parla de l'abus qu'on Congre faifoit des paroles de l'écriture fainte, lorfqu'on Fabus des gation fur l'emploïoit à des ufages tout-à-fait contraires à paroles de leur institution: à des enchantemens pour trou-l'écriture.

4.

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