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ne fe rebutera point de mettre couver des Poules quand ce feroit même plûtard: fi l'on n'en fait des Chapons, on s'en fert en Poulets pour la Cuifine.

Le temps de mettre couver les Poules ne partage point l'opinion des Anciens, ils difent tous unanimement qu'il faut que ce foit au croiffant de la Lune, & depuis le deuxième jufqu'au quinziéme, & que ce temps paffé, on doit differer la couvée, parce, ajoûtent-ils, que la Lune qui décroît n'a plus de force, & que les oeufs par confequent ne fe couvent pas bien; qu'ils deviennent clairs. Quelle illusion! Quelle chimere! comme fi les Poules & mille autres Oifeaux qui fe mettent couver d'eux-mêmes confultoient cette quadrature; & fi bien plus ils ne réuffiffoient pas mieux dans leur ouvrage, que fi une main étrangere leur y aidoit.

C'est donc un abus tout pur que de s'arrêter à la Lune, quand on veut mettre couver une Poule, & fi cette envie lui prend le fixiéme de la Lune ou après, eft-on sûr qu'elle lui dure jusqu'à ces jours fi religieusement obfervez; & quand par malheur cela arrive, c'eft donc une couvée qu'il faut perdre: mauvaise maxime. Lorfqu'une Poule gloffe, on doit profiter de ce temps fans s'embarraffer de la Lune, dont il faut admirer la fplendeur & le mouvement, en adorant le Maître qui l'a formée, & rien de plus.

Les oeufs de Poules ne font que de vingt & un jour à éclore, c'eft pour- Temps quoi il eft bon de remarquer le jour qu'on les met couver, afin de ne point pour éclore s'impatienter: ces oeufs doivent être frais, ceux de trois femaines ou un les œufs. mois y peuvent néanmoins être propres, parce qu'une Poule qui couve Choix des d'elle-même à la dérobée met bien ce temps à achever fa ponte, & fi pas aufs. un de fes œufs ne manquent, c'est l'experience qu'on a tous les jours, & dont on ne fçauroit, douter.

Les plus gros oeufs font toûjours les meilleurs, parce qu'il eft à préfumer qu'ils fortent d'une groffe Poule, & qu'il n'en peut venir par confequent que de beaux pouffins. Voici quelques erreurs affez particulieres Erreurs. fur la figure des oeufs pour avoir mâles ou femelles.

an. C. 2.

Ariftote dit que les oeufs longs produifent des animaux femelles, & L. 6. Hift. que les ronds en produifenr des mâles. Scaliger paroît être de ce fentiment. In comm. Pline foutient un parti tout oppofé; car il prétend que les oeufs longs font des oeufs de mâles, & que les ronds font de femelles. Columelle, Avicen- L. 8 c. §. de Serre & Liebaut foufcrivent au fentiment de Pline, & toutes ces opinions font des plus faufles ; les oeufs longs auffi bien que les ronds peuvent produire indifferemment des mâles ou des femelles, cela ne dépend que des differentes configurations que prennent les parties qui concourent à la formation de l'animal dans l'oeuf.

Autre erreur la plupart de nos femmelettes qui fe mélent de mettre couver des oeufs, difent qu'il faut toûjours qu'ils foient nombre impair & mis tout à la fois au nid avec un plat de bois, n'étant pas permis de les toucher de la main, ni les compter l'un après l'autre.

C'eft une chofe furprenante de voir que les anciens Auteurs qui ont écrit fur l'Agriculture, ayent donné là dedans, & qu'il y ait encore mille & mille gens à la campagne qui foient entachez de ces fauffes maximes & qui feroient bien fâchez de s'en défaire,

Columelle & plufieurs autres après lui, ont une'opinion auffi chimeri→ que fur la maniere d'empêcher que le Tonnerre n'endommage les oeufs qu'une Poule couve & n'y tue les pouffins avant qu'ils foient éclos. Voicy le fecret de cet Auteur, & fes propres termes.,, Il y en a qui metttent L, 8 C. 5., fous la paille de leur nid de l'herbe verte & de petites branches de ,, Laurier, quelquefois des fommitez & des têtes d'ail, ou des cloux de ,, fer, qui font tous des moyens fuffifans pour détourner les mauvais effets du Tonnerre fur les oeufs. En verité il faut avoir l'efprit auffi ruftique pour avancer de femblables chofes, que la feule pensée en eft ridicule; comme fi tous ces colifichets mis dans ces nids pouvoient empêcher que le bruit extraordinaire du Tonnerre n'agitât l'air quelquefois avec tant de violence, que venant à froiffer les parties difpofées à former le pouffin dans l'oeuf, il n'en dérange toute l'oeconomie, de telle forte que ne pou vant plus fe lier les unes aux autres, il faut neceffairement que l'animal refte imparfait dans fa formation, & periffe.

Suite du

دو

C'eft de cette maniere que ce Phénomene dangereux agit für bien des corps fufceptibles d'impreffions de l'air; & nous avons en cela dans le bruit terrible que fait la poudre à tirer, un exemple qui en approche affez & qui peut nous le prouver; car fi l'on tire des Canons dans un endroit où l'air foit un peu renfermé, il eft d'experience qu'il faut ouvrir les fenêtres des maifons qui les environnent, autrement le verre fe brise, ce qui ne peut arriver que par les parties de l'air qui font pouffées avec impetuofité contre ces corps: ainfi tout ce qu'on vient de dire fur l'obfervation des Anciens, quand il eft queftion de mettre couver des oeufs, n'est que fuperftition, chimere & bagatelles toutes pures: mais revenons aux ceufs qui font à prefent le fujet de nôtre matiere.

Suppofé qu'on foit dans l'obligation d'aller chercher des oeufs ailleurs que choix des chez foi pour mettre couver, parce qu'on aura negligé d'en amaffer pour ufsm cela, & qu'on croira que ceux qu'on aura n'y feront point propres, il faut toûjours en prendre chez des gens où l'on fçait qu'il y a un Coq, & un bon Coq: car il ne fuffit pas de l'oeuf pour avoir un pouffin, il faut qu'il foit vivifié par les efprits de la femence du mâle, & fans cette vivification, le principe de l'animal s'anéantit & ne produit rien par confequent.

Et c'eft une abfurdité de croire que l'oeuf dans le corps d'une Poule foit P'ouvrage du Coq; elle contient en elle-même tout ce qui eft propre à la formation du foetus de fon efpece, les oeufs qu'elle donne s'y forment fans autre fecours que celui de la nature, & il n'eft pas rare de voir tous les jours que des Poules pondent fans Coq. Dieu qui agit toûjours par les voyes les plus fimples & les plus conftantes en formant au commencement du monde les deux premiers animaux de chaque efpece, renferma dans la femelle tous les oeufs de fa pofterité, de forte que le mâle ne fert qu'à contribuer à la generation du pouffin par la partie fpiritueufe & volatile de fa femence.

U

Pourquoi une Poule ne donne fes œufs que l'un après l'autre.

Ne Poule ne donne fes oeufs que l'un après l'autre, & dans un certain intervale de temps affez confiderable, ce qui fait juger qu'ils

ne

ne font pas tous entierement formez à la fois : la raison de cela eft que n'ayant pas tous une égale adherence dans l'ovaire, & qu'il y en a toûjours qui tiennent moins dans leurs calices que les autres, ceux-ci fe détachent les premiers, & par une fermentation des liqueurs nourricieres, fe gonflent & deviennent enfin parfaits dans toutes leurs parties.

Les œufs étant bien choifis, on les met fous la Poule, & dans le nid Remarques qu'on lui prepare, il doit être un peu creux dans le fond, & évafé par neceffaires, les bords, afin que les oeufs ne roulent point. On peut mettre couver une Poule dès le mois de Février fi elle en a envie : mais il faut observer en cette faifon qui eft froide, de ne lui donner environ que dix à douze oeufs, afin que les embraffant tous fous elle, elle les échauffe mieux ; en Mars quelque peu davantage, & en Avril & mois fuivans ce qu'elle en pourra couvrir. Il y en a qui déterminent le nombre des oeufs depuis quinze jufqu'à vingt ou vingt-un, felon que la Poule eft plus ou moins groffe; après cela on met cette Poule fur ces oeufs, qu'on lui laisse couver en lui apportant les soins dont nous parlerons.

Conduite de la nature en formant un Poulet d'un œuf.

Our être inftruit de la méthode que la nature fuit en formant un Pouffin d'un oeuf en le confiderant avant & durant l'incubation, on fçaura que dans le premier cas on trouve dans la tunique du jaune de l'oeuf une petite tache blanche en forme de cercle qui reffemble à une petite lentille, ce qu'on nomme Cicatrice. Durant l'incubation la cicatrice fe dilatte, & s'étend le premier jour en certains cercles, & on y obferve le même jour & le fuivant certaine liqueur claire & luifante, plus pure qu'un cristal, qn'on appelle Gelée.

Le troifiéme & le quatrième jour on apperçoit dans la gelée une ligne de fang vermeil, & le point faillant au milieu, qui eft le commencement du coeur. On remarque enfuite au tour de ce point quelque chofe de groffier & de blanchâtre, en forme de petit nuage divifé en deux parties dont la plus grande fait la matiere de la tête qu'elle commence, & on remarque quatre petites yeffies, qui font le cerveau, le cervelet & les deux yeux.

L'autre partie eft plus petite, & au deffous elle reprefente la quille d'un Vaiffeau, & produit l'épine du dos, d'où l'on voit fortir peu à peu les jambes. Enfin ces vifceres s'attachent fucceffivement aux vaiffeaux qui renferment le fang, & forment le foetus parfait, qui eft le Poulet.

Hervés

Un habile Anatomifte remarque que ce foetus eft renfermé dans la ciMalphit catrice déja avant l'incubation; enforte que la tête, l'épine & fes appen- gius. dices fe diftinguent manifeftement dans la petite tunique qui nage dans la gelée de la cicatrice, & qu'ainfi les parties du Poulet préexiftent dans l'oeuf, & precedent l'incubation; qu'enfuite ce petit animal déja formé, reçoit fa nature entiere des fucs nourriciers & fermentatifs mêlez enfemble, qui par leur action mutuelle engendrent fucceffivement le fang, & font paroître & croître les parties effentielles au Poulet.

Toute cette petite machine néanmoins ne fçauroit s'acheyer ainfi fans

P

le fecours d'une chaleur étrangere, & dont les parties ayent des rapports de convenance avec celles du Poulet. Tous Oifeaux feroient bons pour cela s'ils vouloient avoir la patience de fomenter les oeufs comme il faut ; mais comme les Poulets & autres Oifeaux de la Baffe-cour font plus à portée, on s'en fert pour couver les oeufs qu'on destine pour augmenter l'espece de la Volaille.

Pour avoir des Poulets en Hyver.

Nous avons de com menne la ponte qu'elles font eft un préjugé de

Ous avons dit comment on devoit nourrir les Poules pour avoir des

leur couvée: il faut, fi l'on fouhaite les employer à cet ouvrage dans cette faifon, les entretenir de même : la chambre où l'on met ces couveufes doit être chaude, la nourriture ni l'eau ne doit point leur manquer: il fera bon de leur donner un peu de fenevé de temps en temps. ou de la rotie au vin pour les échauffer; la graine d'ortie leur eft encore merveilleufe

Lorfqu'on entend gloffer ces Poules, on leur cherche un endroit pour les placer. Ce lieu doit toûjours être détourné & hors du bruit, afin que les couveufes ne foient point détournées de leur travail en aucune maniere. Pendant qu'elles couvent on a foin de les traiter comme auparavant, parce qu'elles n'ont pas moins befoin de chaleur pour fomenter leurs eufs, que pour fe difpofer à l'incubation.

Quelques-uns, pour avoir des Poulets en Hyver, fe fervent de gros Pigeons de voliere fous lefquels ils mettent des oeufs de Poules. Ces Pigeons n'en peuvent embraffer que quatre ou cinq, & on les met dans des grandes Cages en un lieu bien chaud. Il ne faut pas les laiffer manquer de nourriture, & leur donner fur tout du chenevis une fois par jour.

Secret pour faire éclore des œufs fans Poules.

D'autres curieux oifeau ; ils ont pour cela un petit fourneau, préAutres plus curieux encore que les premiers font éclore des œufs

paré exprès, échauffé par le deffous d'un feu continuel, moderé néanmoins, & toujours égal; ce fourneau eft pour l'ordinaire de fer ou de cuivre, & fabriqué comme un four à cuire du pain.

Enfuite ils prennent de la plume la plus molle, ils en mettent fur ce fourneau autant qu'ils le jugent à propos, & deffous l'aire quatre lampes aux quatre coins, qui reftent toûjours allumées, & qui font pofées de telle forte que leur flamme échauffe cet air, qui communique fa chaleur à tout le refte du fourneau.

Ces curieux ayant adroitement obfervé tout cela, prennent dix ou douze oeufs ou davantage, s'ils le jugent à propos; ils les pofent dans la plume dont ils les couvrent auffi, puis un oreiller de plume par deffus; ils les laiffent en cet état pendant dix-huit ou vingt jours que les pouffins font formez, après cela ils les élevent comme nous le dirons. Il faut avoir foin de bien entretenir ce feu toûjours dans un même degré de chaleur, &

par ce moyen on pourra avoir des Poulets fans Poules, ni autre Oifeau qui y foit propre.

Les Poulets ainfi éclos font fort délicats à élever, & fujets à des fluxions dangereuses, fi l'on n'y prend garde; c'eft pourquoi il les faut mettre dans une chambre qui foit chaude, les tenir enfermez dans quelque petit vaiffeau garni de plume dans le fond, & couvert par deffus d'un petit oreiller de duvet fort leger, afin que les pouffins ne s'étouffent pas deffous, & couvrir le vaisseau de quelque couverture, ou d'autre chofe femblable: on laiffe ainfi ces petits Poulets toute la nuit, & on ne les en tire pendant le jour que pour leur donner à manger, ce qui peut arriver à cinq ou fix reprifes, ou pour mieux dire toutes les fois qu'on entend ces petits Oifeaux piauler; car c'eft une marque alors qu'ils demandent à manger. Cette curiofité, comme on voit, exige un peu de foins, & beaucoup d'attention; mais que ne fait-on pas quand il s'agit de faire de ces fortes d'experiences; qui ne coûtent guéres, & qu'on veut éprouver comment, & jufqu'à quel point on peut aider la nature dans fes productions? Il faut gouverner de même les Poulets qu'on aura mis éclore fous des Pigeons, parce que ces Oifeaux ne les conduifent point.

Soin qu'on doit, avoir des Couveufes.

tout

couvent, on met leur mangeaille près d'elles, afin qu'elles n'aillent a mis couver les Poules, pas loin pour l'aller prendre, & que par ce moyen elles ne laiffent point morfondre leurs oeufs : il eft même à propos que cette nourriture foit tellement à leur portée, qu'elles puiffent la prendre de deffus leur nid; car il y a des Poules qui font fi griêches, que du moment qu'elles font hors de deffus leurs oeufs, on a de la peine à les y faire retourner. Il faut pour qu'elles le faffent d'elles-mêmes, qu'elles foient bien franches, & d'un naturel très-porté à leur ouvrage,

On fe donnera bien de garde durant toute l'incubation de toucher aux oeufs de la Poule, quoiqu'en difent nos anciens Auteurs, la nature ne l'inf truit que trop à faire fon devoir, & l'on n'eft que de très-mauvais raisonneurs fur cet article, quand on dit, que lorfque la Poule eft fortie de fon nid, on doit en vifiter les oeufs & les tourner avec la main, afin qu'étant également échauffez de tous côtez, les Poulets s'en forment plus fûrement: ce font les propres termes de Columelle, & le fentiment de Columel.. fes adherans qu'il faut rejetter comme une vifion plus préjudiciable qu'a- 8. ch. s. vantageufe. Nous avons une preuve de cela dans les Poules qui fe mettent à couver d'elles-même à la dérobée, & dont la couvée eft toûjours bien plus heureuse que celles qu'elles font à la maison, & cela, fouvent par la chimere qu'une femme fe met en tête, & fur laqu'elle il faut qu'elle fe fatisfaffe. Tant d'autres Oifeaux ont ils befoin d'une main étrangere pour leur aider à fomenter leurs oeufs, la nature encore un coup qui les conduit leurs dicte mieux ce qu'il faut qu'ils faffent, que tout ce que nos foibles raifonnemens peuvent nous en apprendre là-dessus.

Il y a encore des femmes fi impatientes, que lorfqu'elles ont mis une Poule couver, & qu'il y a feulement quatre jours qu'elle fomente fes œufs,

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